Le policier blanc Derek Chauvin a été déclaré coupable mardi du meurtre de George Floyd, une «victoire pour la justice» selon la famille du quadragénaire noir, dont l’homicide l’an dernier à Minneapolis est devenu le symbole des brutalités policières contre les minorités aux États-Unis.
À l’issue de trois semaines d’un procès sous haute tension dans cette ville du nord des États-Unis, les 12 jurés d’origines ethniques diverses, qui délibéraient depuis lundi, ont conclu à la culpabilité de l’accusé sur les trois chefs d’accusation qui le visaient.
Déjà renvoyé des forces de l’ordre, l’agent de 45 ans, masque filtrant sur le visage, n’a pas montré d’émotion particulière à l’énoncé du verdict. Immédiatement menotté, il a été écroué.
Le juge Peter Cahill prononcera la sentence dans quelques semaines. Derek Chauvin encourt 12 ans et demi de prison mais sa peine pourrait être aggravée si le magistrat conclut à l’existence de circonstances aggravantes.
«C’est une victoire pour ceux qui luttent pour la justice contre l’injustice» ainsi qu’un «tournant dans l’Histoire», s’est félicité Ben Crump, l’avocat de la famille Floyd. «Nous quittons Minneapolis en sachant que l’Amérique est meilleure».
«Nous avions besoin d’une victoire dans ce dossier, c’était très important et nous l’avons eue», a confié à l’AFP Rodney Floyd, un des frères de George Floyd. «Nous allons peut-être respirer un peu mieux maintenant», a-t-il fait écho à son frère.
Juste avant de mourir à l’âge de 46 ans, George Floyd avait ainsi crié plusieurs fois «Je ne peux pas respirer», une plainte devenu un slogan mondial contre le racisme et les abus des forces de l’ordre.
Dans une allocution solennelle depuis la Maison-Blanche, Joe Biden a dénoncé le racisme qui «entache» l’âme de l’Amérique. «Le verdict de culpabilité ne fera pas revenir George» mais cette décision peut être le moment d’un «changement significatif», a-t-il ajouté. Le président avait plus tôt téléphoné à la famille de George Floyd.
Barack Obama, premier président noir des États-Unis, a appelé à poursuivre cette «lutte». «On ne peut pas s’arrêter là», a-t-il ajouté dans un communiqué.
Après trois semaines de témoignages parfois bouleversants, le verdict a suscité une explosion de joie parmi une foule de 200 personnes rassemblées devant le tribunal de Minneapolis.
«Cette année a été un tel traumatisme. Désormais j’espère que l’on pourra panser nos plaies», a affirmé à l’AFP Amber Young au milieu des manifestants.
Les réactions au verdict ont émané de toutes les sphères de l’Amérique, qu’elles soient sportives, artistiques, politiques, voire d’au-delà, à l’image du Premier ministre britannique Boris Johnson qui a adressé ses pensées à la famille Floyd.
Dans son réquisitoire lundi, le procureur Steve Schleicher avait insisté sur la violence de l’acte commis par Derek Chauvin, tel qu’on le voit sur une vidéo amateur qui a fait le tour du monde.
«C’était un meurtre, l’accusé est coupable des trois chefs d’accusation et il n’y a aucune excuse», avait-il asséné.
L’accusation, qui a fait défiler à la barre plusieurs témoins issus de la police, avait souligné que ce procès n’était pas celui de l’institution, mais d’un individu ayant «trahi» son serment de policier.
L’avocat de Derek Chauvin, Eric Nelson, avait au contraire appelé les jurés à prendre en compte le contexte d’une interpellation qui, selon lui, avait dégénéré avec un suspect d’un gabarit imposant qui résistait à quatre policiers voulant le maîtriser.
Le verdict de culpabilité est synonyme de soulagement pour beaucoup de villes américaines et en particulier Minneapolis, où la tension a été accrue par la mort récente d’un jeune homme noir en périphérie de la métropole.
Daunte Wright, un Afro-Américain âgé de 20 ans, a été tué par une policière blanche lors d’un banal contrôle routier. Ses funérailles sont prévues jeudi dans une église de la ville.
Minneapolis s’était déjà embrasée après la mort de George Floyd, et les commerces se sont de nouveau barricadés derrière des planches en bois cette semaine alors qu’un couvre-feu est en place.
LR/AFP