Un événement qui a traversé les frontières pour devenir un événement africain, maghrébin, international. Cette année encore, le Festival Gnaoua et Musiques du Monde d’Essaouira est classé parmi les 5 premiers des 25 meilleurs festivals internationaux du prestigieux magazine Songlines Magazine.
La 17ème édition aura lieu du 12 au 15 juin à Essaouira. Elle promet une riche programmation avec la participation d’une pléiade d’artistes, l’agenda artistique faisant la part belle aux maâlems et aux musiques africaines, qu’elles soient traditionnelles ou plus urbaines.
Cette année, le griot malien Bassékou Kouyaté côtoiera le jazzman Marcus Miller (Etats-Unis), le reggae man sénégalais Meta & the Cornerstones et la soul/folk issue des diasporas avec la somptueuse Ayo, sans oublier la présence d’Ibrahim Maalouf. La participation marocaine est de taille avec les Maâlems Mohamed Guinea, Mustapha Baqbou, Abdelkébir Merchane, Hassan Boussou, Hamid El Kasri, Mohamed Kouyou, Abdelslam Alikane, Foulane Bouhssine…
A côté des ténors de la musique gnaouie, on verra aussi de jeunes artistes marocains, comme les groupes «Derdba» et «Kif Samba», sans oublier la contribution de jeunes talents d’Essaouira qui se produiront sur la scène Ouled Mogador, le vendredi 13 et le samedi 14 juin, à Bâb Doukkala. Il s’agit d’un projet initié par l’association «Les jeunes et l’Avenir» qui concrétise la volonté de quelques souiris partageant une ambition commune: offrir aux jeunes d’Essaouira l’opportunité de s’exprimer dans leur ville natale, mais surtout de voir leur travail reconnu et leurs efforts récompensés. Sans contestation aucune, le Festival Gnaoua et Musiques du Monde a le mérite de mettre en avant un patrimoine immatériel qui était en voie de disparition, tout en le projetant sur les grandes scènes internationales via des fusions et les résidences artistiques.
Le Festival, c’est aussi des moments de débats et de réflexion. Cette année, le Forum du Festival, créé et organisé depuis trois ans en partenariat avec le Conseil National des Droits de l’Homme, a choisi comme thème «L’Afrique à venir». Dans ce berceau de l’humanité qu’est l’Afrique, les relations humaines qui se sont forgées au-delà des frontières géopolitiques ont ainsi donné naissance à une histoire commune.
Insérée depuis des siècles dans l’histoire de l’Afrique, Essaouira renoue avec le continent et ses cultures à travers le Festival Gnaoua et Musiques du Monde; une musique et une tradition spirituelle qui témoignent de cette mémoire partagée et des métissages qu’elle nous a légués. Il était donc normal que le forum du Festival se penche sur ce sujet, d’autant plus que le Maroc initie une ambitieuse politique de l’immigration et renoue sur les plans politique et économique avec l’Afrique subsaharienne. Rassemblant chercheurs et acteurs sociaux, spécialistes et simples festivaliers, il ambitionne de revisiter cette histoire sur la longue durée, tout en analysant ce qui fait l’Afrique d’aujourd’hui, ses contraintes, ses atouts, sa place dans le monde, ses dynamiques régionales et ce que pourrait être le rêve et l’ambition de l’Afrique à venir.
Un Hommage sera rendu à feu Et-Tayeb Houdaïfa, le samedi 14 juin. Houdaïfa était plus qu’un grand journaliste: un intellectuel qui faisait partie de la poignée de personnes qui ont cru au projet et ont soutenu le Festival dès ses débuts en l’accompagnant tout au long des années. Cet amoureux de la culture, du patrimoine marocain et de la langue française était un grand humaniste humble et un homme de cœur et d’esprit. Il a écrit dans son article intitulé «Gnaoua au top», le 5 juillet 2010. On y lit: «Je reviens du dernier Festival d’Essaouira sans en être revenu, tant les flots de sons, de chants et de rythmes déversés généreusement par ce rassemblement inondent encore mon esprit. Pour avoir accompagné Gnaoua et Musiques du Monde depuis sa venue au monde musical, je devais être prévenu -jamais il ne s’est emmêlé les pieds-, mais voilà qu’une bonne stupeur l’a emporté. De fait, j’ai été ébaudi. Dès le prélude. Par le duel au sommet entre la troupe des frères Kouyou et le Sukhishvili national de Géorgie». Une pensée profonde à l’ami qui me pousse de reprendre le titre de son article. Plagiat voulu à « Si Et-Tayeb ». Mais tous ceux qui te connaissent savent d’avance la générosité de ton âme. Plagiat pardonné!
Bouchra Elkhadir