Suite à la débâcle de la gauche française aux municipales, le gouvernement Ayrault a démissionné et Manuel Valls -alors ministre de l’Intérieur- a été nommé Premier ministre. Qui est-il ?
Le remaniement a été imposé au président Hollande par le résultat des municipales. Comme il n’y pas de possibilité de changer radicalement de politique par un virage à gauche qui serait une rupture avec les obligations européennes, il fallait changer de style. Et comme le style c’est l’homme, le président a dû choisir Valls.
Certes, c’est l’homme de gauche le plus populaire, malgré des baisses fortes récemment dans les sondages. Mais il est tout de même à la droite du PS avec une image de Sarkozy de gauche qui explique, par exemple, que les écologistes politiques n’aient pas accepté de participer à ce gouvernement.
Manuel Valls est né le 13 août 1962 à Barcelone en Espagne. Diplômé en histoire, il obtient la nationalité française en 1982, mais s’engage au PS deux ans avant, à 17 ans, pour soutenir Michel Rocard. Il devient conseiller régional d’Ile-de-France en 1986 et est adjoint au maire d’Argenteuil de 1989 à 1998.
Sur l’aile droite du PS, notamment sur les questions sécuritaires, il est membre du Bureau national et du Conseil national depuis 1993 où il a d’abord été chargé de la communication. Il est élu maire d’Évry depuis 2001 et député de la 1ère circonscription de l’Essonne depuis 2002.
Son attitude sur les Roms lui vaut une image très négative auprès de toutes les associations qui militent en faveur des immigrés. Son bilan sur la sécurité est très contesté. Il inquiète certains par des propos précédents.
Dans (ses entretiens) «Pour en finir avec le vieux socialisme… et être enfin de gauche», il se déclare favorable aux «quotas» d’immigration. Ses déclarations concernant les Roms dans un entretien publié dans Le Figaro, le 14 mars 2013, ont suscité les critiques d’une partie de la gauche, notamment de la ministre du Logement, Cécile Duflot. Manuel Valls a en effet déclaré que les Roms habitant dans des campements illégaux ne souhaitent pas s’intégrer et avaient vocation à retourner dans leur pays.
En juin 2009, se promenant à Evry et oubliant qu’il était équipé d’un micro-cravate, il déclare: «Belle image de la ville d’Evry… Tu me mets quelques Blancs, quelques Whites, quelques Blancos…». Plus tard, il se justifiera de la sorte: «Évidemment, avec les stands qu’il y avait là, [j’avais] le sentiment que la ville, tout à coup, ça n’est que cela, (…) ça n’est que cette brocante, alors que j’ai l’idée au fond d’une diversité, d’un mélange qui ne peut pas être uniquement le ghetto. On peut le dire ça? (…)». «On a besoin d’un mélange. Ce qui a tué une partie de la République, c’est évidemment la ghettoïsation, la ségrégation territoriale, sociale, ethnique qui sont une réalité. Un véritable apartheid s’est construit, que les gens bien-pensants voient de temps en temps leur éclater à la figure, comme ça a été le cas en 2005, à l’occasion des émeutes de banlieues».
Dans «La Laïcité en face», il réclame une refonte de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, en affirmant: «Personne ne veut y toucher, mais elle est contournée en permanence; chacun cherche un subterfuge pour arriver à ses fins. […] Notre pays ne peut donc échapper à la révision, même si ce n’est pas une révision avec un grand R. La loi a d’ailleurs été plusieurs fois modifiée depuis son adoption. La République pourrait s’offrir ainsi un moment symbolique pour donner un souffle nouveau à la laïcité. Il faut une révision publique de l’application de la laïcité qui passe par un débat parlementaire. Voilà un beau moyen de remettre l’idéal laïc au cœur de la société française et d’en faire une valeur partagée».
Manuel Valls avait pris la parole pour évoquer les défis à venir pour la France en matière d’immigration. La poussée démographique africaine va «obliger d’ici à dix ans à repenser notre politique africaine» et la «question du regroupement familial pourrait être revue», a lancé le ministre, selon Libération. Et d’ajouter que l’autre défi pour la France est de prouver que «l’islam est compatible avec la démocratie».
Contacté par Libération, Manuel Valls a assuré que pour ses propos sur l’islam, il s’est «appuyé» sur des déclarations de François Hollande à Tunis et qu’il voulait dire que la France «allait faire la démonstration que l’islam est compatible avec la démocratie», donc, c’est faire preuve de «mauvaise foi que de comprendre autre chose».
Il faudra donc sur ces dossiers sensibles, c’est vrai, le juger aux actes -car la fonction transforme l’homme- et ne pas se contenter d’interprétations de propos.
Sur la politique internationale il est très discret.
On peut souhaiter qu’un gouvernement plus resserré, plus tenu par le Premier ministre et un Fabius élargi au commerce international évitera certaines dérives et comportements stupides qui portent préjudice à la France auprès de ses meilleurs partenaires et amis.
Patrice Zehr