Ce sera donc François Fillon. Il sera le candidat du parti «Les Républicains» à la présidentielle. Il a donc des chances importantes d’être le prochain président français.
C’est une surprise. Tout le monde s’attendait et notre journal s’en est fait l’écho à l’affrontement annoncé: Juppé-Sarkozy. Mais en ce moment, dans les démocraties occidentales, rien de ce qui est prévu ne survient: un signe!
La détestation de Sarkozy a été encore plus forte que prévue et Juppé a fait une erreur capitale. On ne fait pas une campagne auprès d’électeurs de droite pour séduire la gauche.
L’ampleur du succès de Fillon a été amplifiée au second tour. Mais si 600.000 électeurs de gauche n’étaient pas venus voter Juppé, Sarkozy aurait été présent au second tour.
Fillon, sur la dernière ligne droite, a laissé tous ses concurrents sur place. Il est un chrétien libéral: libéral sur le plan économique et conservateur sur le plan de la société. Il représente une droite qui, depuis très longtemps, n’a plus été aux affaires en France plus traditionaliste que bonapartiste. Peu sensible aux fiertés homosexuelles et hostile à titre personnel à l’avortement, il veut un retour à une éducation fondée sur les fondamentaux du récit national. Sa vision du monde passe par les nations et rejoint souvent les analyses de Poutine. La gauche pourra donc l’affronter sur le fond, si elle arrive à sortir d’une spirale suicidaire. Quant au Front National, il ne peut que souffrir de ce candidat soutenu par les Zemmour et autres De Villiers. La droite hors les murs a pris la forteresse républicaine.
«Fillon triomphe par KO», titre Le Parisien/Aujourd’hui en France. La Croix évoque «une très belle victoire». «François Fillon, leader maximo», ose Libération dans un titre qui surmonte celui revenant sur la mort de Fidel Castro . Mais c’est le titre pour le titre, car Fillon ce n’est pas Castro, ce serait plutôt Tatcher. Libération, sous la plume de Laurent Joffrin, reconnaît une victoire «adroite et très à droite» d’un homme «austère, rétif à la médiatisation, allergique à l’esbroufe, bon orateur et exempt de casseroles, qui réhabilite quelque peu le métier politique».
«La première haie vers la présidentielle de 2017 semblait inaccessible pour lui. Il l’aura franchie haut la main», analyse de son côté Isabelle Ficek dans Les Echos , qui voit dans cette primaire une «réussite politique» pour la droite qui a mobilisé davantage que ne l’avait fait le PS lors de sa primaire de 2011.
«La vague n’a pas faibli. La quasi-certitude de victoire n’a pas démobilisé les électeurs de François Fillon», constate Alexis Brézet dans l’éditorial du Figaro, qui a choisi une photo sur toute sa largeur du candidat bras levés, un sourire à peine esquissé et le regard lointain.
«Thatcher à la française», selon CNN. François Fillon a convaincu grâce à ses performances lors des débats, affirme la chaîne américaine qui se demande si la France se trouve à «un tournant». The Daily Telegraph n’évite pas non plus la référence à l’ancienne Première ministre du Royaume-Uni, décrivant le projet Fillon comme une «version française du thatchérisme mélangeant libéralisme économique et conservatisme social. Un mélange que la France n’a encore jamais vu».
«Catholique assumé», mais aussi «homme austère à la mise classique», «aux sourcils broussailleux», écrit La Tribune de Genève qui met en avant la «revanche de l’éternel second». Le quotidien italien Corriere della Sera préfère l’expression «triomphe de l’outsider». Même commentaire dans le tabloïd allemand Das Bild qui souligne le parcours de François Fillon, d’«employé de Sarkozy à champion».
El Pais, qui publie sur son site une photo de François Fillon la main sur le cœur, a retenu avant tout la foi religieuse du candidat à l’élection présidentielle. Le quotidien espagnol parle d’«un catholique traditionaliste pour mener une France laïque», rappelant que «le conservatisme est l’idéologie qui a imprégné sa vie». Le journal cite ses propos sur l’avortement et son opposition à l’adoption pour les couples homosexuels, le décrivant comme un homme «fiable et prévisible, particulièrement en ce qui concerne sa foi».
Journal américain qui publie l’article le plus long concernant cette primaire, le Wall Street Journal voit dans le choix de François Fillon les prémices d’un changement de fond. «La France flirte avec une révolution de l’économie de marché, ce qui serait une rupture décisive avec son passé», analyse le quotidien conservateur. Le WSJ semble s’en réjouir: «Beaucoup diront qu’il était temps. Cela fait trente ans que la France y résiste».
Il prévient également l’ancien Premier ministre que n’est pas Margaret Thatcher qui veut.
Patrice Zehr