Gouvernement Benkirane II Et eux, pourquoi ?

Enfin ! A 24 heures seulement de l’ouverture du Parlement pour la session d’automne (qui marque le coup d’envoi de la rentrée politique, le Roi y prononçant un discours d’orientation), le nouveau gouvernement a été installé. L’Istiqlal ayant claqué la porte de la coalition gouvernementale dirigée par les islamistes du PJD, il y a cinq mois, il aura fallu tout ce temps d’attente, de suspense et de tractations, avant que le «Gouvernement Benkirane II» ne voie le jour.

La toute première lecture de la liste des membres du nouveau gouvernement donne lieu à 4 constatations.
D’abord, la nouvelle équipe de l’exécutif compte davantage de membres (39 ministres -chef de gouvernement compris- au lieu de 31).
Ensuite, les femmes y sont plus nombreuses. Ce sont désormais 5 autres femmes ministres qui s’ajoutent à l’unique que comptait le gouvernement sortant.
Le troisième constat a trait à la structure du gouvernement qui a connu quelques modifications. C’était une revendication du nouvel allié, le parti du RNI. Mais cela a aussi permis d’augmenter le nombre de portefeuilles afin, à la fois, de satisfaire tous les membres de la nouvelle coalition gouvernementale et de confier quelques départements à des technocrates.
D’où, le 4ème constat: le retour en force des technocrates.
Ce point, en particulier, retient l’attention. A chaque formation d’un nouveau gouvernement, ce sont de hauts cris qui accueillent les ministres sans appartenance politique (SAP). Certains vont même débusquer les technocrates qui sont parfois «repeints» aux couleurs politiques de tel ou tel parti, pour l’occasion.
Cette guerre contre les technocrates, ce sont bien évidemment les partis politiques, en premier, qui la mènent. Et ce, au nom de cette fameuse «méthodologie démocratique» (Al Manhajiya Addimocratiya) dont ils nous rebattent les oreilles depuis une décennie.
Certes, on ne peut leur reprocher de vouloir que la démocratie joue pleinement et selon des règles claires. Et, donc, que les portefeuilles ministériels ne soient répartis qu’au prorata des voix remportées aux urnes (c’est la méthodologie démocratique). Ce qui exclut de facto les technocrates. A moins qu’ils ne soient affiliés aux partis vainqueurs sortis des urnes. C’est ainsi que cela fonctionne dans les grandes démocraties. Quand un ou plusieurs partis gagnent les élections, c’est au (x) gagnant (s) que revient le droit de constituer l’équipe gouvernementale.
On peut donc s’étonner -voire s’indigner- que des technocrates sans filiation politique surgissent au beau milieu de ministres partisans.
Cependant, le fait est que cette situation que les partis dénoncent, ce sont eux qui en sont la première cause. Les partis politiques marocains –et c’est leur grand malheur- ne contribuent pas à renouveler les élites. Le pouvoir en leur sein est disputé entre les membres du bureau politique, souvent des caciques qui ne veulent rien lâcher. La base n’a aucune chance de briser le plafond de verre. Les compétences ne sont pas encouragées. De plus, dans les partis, ce ne sont pas les plus compétents qui gagnent, mais les plus forts en politique politicienne.
Sans compter que l’adhésion aux partis politiques, au Maroc, est dérisoire. Les compétences sont donc ailleurs.
Le recours aux technocrates s’impose ainsi, souvent, du simple fait que les partis politiques n’ont pas su, ou pas pu mettre en avant les hommes (et femmes) qu’il faut à la place qu’il faut.
Le PJD dirigé par Abdelilah Benkirane arrivait, début 2012, pour la première fois au pouvoir. De plus, il y arrivait en pleine période de crise. Crise qui n’a pas été surmontée depuis, loin s’en faut… Ce qu’annonçait son programme n’a pas pu être réalisé. Or, le temps manque et les défis vont grandissants. Aujourd’hui, de grandes et délicates réformes sont attendues, comme celle de la Caisse de compensation ou des retraites. Le FMI ne dessert pas l’étau à ce sujet et les déficits de l’Etat ne permettent plus de tergiversations.
Alors, les technocrates grands sauveurs ? Peut-être pas dans le gouvernement Benkirane II, les portefeuilles qu’ils détiennent n’ayant pas tous vocation à sauver l’économie. Mais qu’on se le dise, l’opinion publique, au Maroc comme ailleurs, ne se soucie plus de défendre un parti contre un autre pour ses crédos et slogans. Seuls comptent aux yeux des citoyens les résultats qu’ils voient dans leur quotidien (nourriture, logement, santé, éducation et sécurité). Aux partis d’en tirer les leçons qui s’imposent: soit faire mieux que les technocrates, soit leur céder définitivement la place.

Le coup de grâce

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