Située sur l’oued Noun, à 130 km au nord de Tan-Tan et 56 km au sud de Sidi Ifni, Guelmim, qui était autrefois une étape incontournable sur la route des caravanes pour Tombouctou, voit l’Anti Atlas s’incliner progressivement…
Ainsi, au carrefour des routes caravanières, Guelmim abrite le plus grand souk aux dromadaires du Maroc. Ce souk du samedi, appelé aussi souk Amhayrich, a connu son apogée au XIXe siècle. Principalement dédié aux dromadaires, on y voit durant le moussem de Sidi El Ghazi en juillet une des plus grandes concentrations de camélidés d’Afrique du Nord.
Dromadaires, artisanat et produits de première nécessité prenaient la route du sud, faisant alors les affaires des Tekna. Le commerce ancestral de cette tribu d’artisans et d’éleveurs nomades d’origine berbère de la région de Guelmim n’est certainement pas étranger à la naissance de ce grand souk. Aujourd’hui, ce souk a trop perdu de son éclat et de sa réputation qui se répercutaient sur tout un espace géographique et lieu de passage obligé; un espace qui a vu la création même de Guelmim au Moyen Age, dans la vallée du Noun.
Cité liée au commerce caravanier, Guelmim était autrefois appelé «Aguelmim» qui signifie: entourée d’eau. Ce précieux liquide étant prépondérant, sa présence confortait le rôle majeur que la ville a perdu avec l’arrêt progressif, puis définitif de ce commerce…
Si l’économie de la ville se relance depuis la création des Provinces du sud et le développement du tourisme, c’est surtout l’agriculture oasienne des environs proches qui prend maintenant une place importante. Mais cela reste bien en deçà des attentes de la population locale qui combat toujours la pauvreté et le chômage, notamment chez les jeunes. Une lutte acharnée, mue essentiellement par une recherche permanente de développement de la région et de son émergence grâce à ses potentialités, ses ressources humaines et ses richesses naturelles.
L’action est aussi mue par une société civile dynamique qui œuvre inlassablement pour une relance économique et sociale de Guelmim et, à travers elle, de toute la Région de Oued Noun. Une action marquée également par les interventions de la Fondation régionale de l’entreprenariat et l’entreprise (FREE), dont l’objectif est de renforcer essentiellement les capacités des jeunes, en mettant l’accent sur des activités et des services favorisant l’entreprenariat et l’auto-emploi, d’une part et, d’autre part, de transmettre les connaissances et de développer les compétences dans le domaine entrepreneurial, en favorisant l’esprit de créativité et d’innovation.
Et Souk At-tanmia voit le jour…
Une action assidue qui commence d’ailleurs à donner des fruits, puisque c’est sur la base de cette initiative que, après la Tunisie, l’Egypte et la Jordanie, c’était au tour du Maroc de bénéficier du programme «Souk At-tanmia» qui vient d’être officiellement lancé en grande pompe au profit des jeunes et femmes de la région de Guelmim-Oued Noun et qui est un mécanisme combinant l’accès au financement et un accompagnement ciblé.
Souk At-tanmia est un projet phare de la Banque africaine de développement (BAD) en Afrique du Nord, financé par le ministère des Affaires étrangères du Danemark, depuis 2012, à travers son Programme de partenariat dano-arabe (DAPP). C’est une initiative de coopération et de dialogue entre le Danemark et les pays cités contre une enveloppe financière de 150 millions d’euros sur 5 ans. Il a pour objectif de donner un nouvel élan aux jeunes, femmes, associations, coopératives et micro- entrepreneurs, pour innover, entreprendre et concrétiser leurs idées.
Au Maroc le ministère de l’Economie et des Finances est aussi partenaire de ce programme destiné, surtout, à soutenir l’entrepreneuriat et le développement du secteur privé.
Lors de la cérémonie de lancement, Mbarka Bouaida, secrétaire d’Etat chargée de la Pêche maritime, a passé en revue les différentes initiatives et programmes nationaux de développement, notamment dans les provinces du sud, estimant que l’initiative de genre Souk At-tanmia va s’imbriquer parfaitement dans cette dynamique.
Bouaida a aussi relevé que, parallèlement au taux de chômage dépassant les 20% chez les jeunes et 40% chez les femmes dans la région Guelmim-Oued Noun, soit plus que le double du taux national, les jeunes de la région disposent de qualifications et de niveaux d’études élevés par rapport à la moyenne nationale, ajoutant que Guelmim-Oued Noun regorge de ressources humaines importantes pour la promotion des petites et micro-entreprises.
Pour sa part, Nikolaj Harris, ambassadeur du Danemark au Maroc, a indiqué que le Maroc a, durant 20 années, réalisé de grands progrès en matière de croissance économique et de création d’emplois. Cependant, le problème du chômage, surtout celui des jeunes et des femmes, est un défi pour la société et le développement de l’économie en général.
«L’Entrepreneuriat crée des emplois. C’est pourquoi beaucoup d’initiatives dans ce domaine ont été lancées au Maroc», a-t-il aussi relevé, faisant savoir que Souk At-tanmia vise à fédérer tous ces efforts, en créant une plateforme de coordination et en offrant un soutien financier et un accompagnement aux entrepreneurs.
En outre, l’ambassadeur Harris s’est dit certain que ce projet sera un succès au Maroc, ajoutant que «le Danemark est fier d’en être le partenaire financier».
Pour Mohamed El Azizi, DG de la BAD pour la région Afrique du Nord, l’objectif principal derrière ce programme est la création d’emplois. «Ce programme cible les jeunes, les femmes et les entreprises, généralement innovatrices, qui essayent de créer le maximum d’emplois dans la région. D’une manière générale, on sait que les start-up et les petites et moyennes entreprises contribuent plus à la création d’emplois au niveau d’un pays. Donc nous sommes en train de sélectionner, à travers les régions du Maroc, un certain nombre de jeunes, avec des approches intégrées et un processus de sélection bien précis, pour les former et les aider à développer leur business plan. Et on essaye de leur donner du financement, jusqu’à la création de leurs entreprises. On fait également un appui et un coaching tout au long du cycle de la vie de l’entreprise et ce, durant deux ans. On va même plus loin en essayant de leur trouver des marchés pour commercialiser leurs produits et services».
Compte tenu de l’objectif principal de ce programme, à savoir la création d’emplois, l’initiative a été lancée dans une région où il y a un taux de chômage relativement élevé. D’où ce choix de la région de Guelmim-Oued Noun, a encore expliqué El Azizi, ajoutant que ce qui vient d’être fait à Guelmim n’est que le lancement de ce programme qui se veut une initiative nationale devant toucher d’autres régions du Maroc. Et le DG de relever que lors des prochaines étapes, le travail va porter sur la création d’une plate-forme nationale pour coordonner tout l’écosystème entrepreneurial au niveau du Maroc, essayer de faciliter la coordination et la mobilisation des ressources pour les jeunes et faciliter les échanges d’expériences. «Dès qu’on créera cette plateforme, on va aller également dans d’autres régions pour poursuivre ce processus démarré à Guelmim», a-t-il ajouté.
Mohamed El Mostapha Charafeddine, président de la Fondation régionale de l’entrepreneuriat et l’entreprise (FREE), a , quant à lui, exposé le processus de prospection et de sélection de porteurs de projets dans la région Guelmim Oued Noun, faisant savoir qu’à ce titre, la fondation a procédé à la sensibilisation de plus de 3.000 jeunes autour de l’entrepreneuriat et l’auto-emploi, à la présélection de 300 idées de projets dans une première phase, 45 dans une seconde phase et 20 projets pour la phase finale.
Charafeddine a, en outre, relevé que 70% des participants proviennent des couches sociales défavorisées, 75% diplômés de la formation professionnelle et 25% ont un diplôme de l’enseignement supérieur.
A l’issue de cet événement, 10 projets sur les 20 retenus à la phase finale ont été primés. Ces projets sont issus de secteurs divers, de l’artisanat (Assa Arts/Art plastique, Top Lisar Tantan/décoration et gravure) au Digital (Building Solutions/ Smart Building), en passant par l’industrie environnementale (Wat-Solar/Fabrication filtres solaires) …
Les lauréats bénéficieront ainsi d’un capital d’amorçage qui variera selon la nature du projet, mais sans dépasser 50.000 euros. Le programme bénéficie d’une enveloppe de 4,7 millions d’euros, dont seulement 30% iront au financement des entrepreneurs. La logique de ciblage voudrait que l’aide financière aille surtout aux entreprises les plus vulnérables, afin de soutenir leur croissance.
Plus globale, l’approche de Souk At-tanmia repose sur des mécanismes autres que l’aide pécuniaire. Elle tend d’abord à mettre en place un mécanisme de coordination pour une meilleure efficience et une efficacité des actions gouvernementales et privées.
Deux autres dimensions seront incluses. Il s’agit de l’accompagnement non financier, afin d’aider à la création et au développement d’entreprises. La Banque complétera son appui par des actions d’appui technique (pré et post création) et d’appui financier (renforcement des fonds propres) pour les très petites et moyennes entreprises à fort potentiel. Il s’agit aussi de l’appui non financier qui consiste à accompagner les nouvelles start-up, grâce à des groupes de soutien animés par les pairs, du mentorat par des entreprises confirmées, des services de conseil et l’organisation de réunions régulières pour faciliter et développer le réseautage.
DNES à Guelmim Hamid Dades