Mamady Doumbouya est l’homme qui a renversé Alpha Condé. En 2017, cet ancien légionnaire est stagiaire de l’Ecole de guerre, à Paris, et invité à témoigner par l’état-major spécialisé pour l’outre-mer et l’étranger (Emsome) sur le thème de «la prise en compte de l’interculturalité dans les actions militaires».
Le jeune commandant s’adresse, sans filtre, aux universitaires et généraux pour dire ce qu’il pense des instructeurs et coopérants militaires en mission en Afrique. «Les officiers [français] ont un défaut: ils sous-estiment les capacités humaines et intellectuelles des Africains […] Ils ont des attitudes hautaines et se prennent pour le colon qui sait tout, qui maîtrise tout […] On n’est pas aussi à la ramasse qu’ils le pensent», témoigne l’ancien caporal de la Légion étrangère, qui précise avoir au préalable «consulté ses camarades africains de la promotion 25 ».
Au fil de ses onze minutes d’intervention, on entend l’agacement et la frustration tant vis-à-vis des militaires français que des supérieurs au sein des armées de la région. «Les militaires blancs ont plus la confiance de nos dirigeants que nous. Les Français sont souvent conseillers de nos [hommes] politiques, alors qu’un colonel ivoirien qui aura fait le même cursus n’aura pas la confiance d’un dirigeant africain», regrette Mamady Doumbouya. Et de questionner: «Est-ce que c’est normal qu’un AD [attaché de défense en ambassade] à Paris n’ait pas accès à Emmanuel Macron alors que l’AD [français] à Abidjan, quand il est prêt, il peut voir le président de la République ivoirienne ?».
P. Zehr