Heure légale et nouveaux horaires : Une «mauvaise nouvelle» ne vient jamais seule

Heure légale et nouveaux horaires : Une «mauvaise nouvelle» ne vient jamais seule

Le maintien de l’heure d’été (GMT+1) au Maroc, décidé par le gouvernement sans concertation préalable, suscite toujours une vive polémique. Défiant la volonté des citoyens et allant jusqu’au bout dans ses mesures impopulaires, l’Exécutif en place, en matière d’enseignement et d’administration publique, persiste et signe.

Après l’adoption en Conseil de gouvernement, le 26 octobre 2018, du projet de décret n° 2.18.855 relatif au maintien de l’heure d’été (GMT+1), l’Exécutif a tenu une réunion hebdomadaire, jeudi 1er novembre 2018 au siège de la primature à Rabat, avec à l’ordre du jour l’entrée en vigueur, incessamment, de nouvelles plages horaires. Celles-ci concerneront les écoles publiques et privées et les administrations publiques, ainsi que les collectivités territoriales.

Les élèves et leurs parents savent à quoi s’en tenir

Dans ce cadre, le ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Saïd Amzazi a annoncé, devant ses collègues au gouvernement, que les nouveaux horaires auxquels les établissements scolaires devront se plier entreront en vigueur dès le 12 novembre 2018. Ainsi, l’emploi du temps des écoliers connaîtra des modifications importantes adaptées aux spécificités de chaque région (rurale ou urbaine). En outre, Amzazi a fait savoir que les nouvelles plages horaires ont été proposées sur la base des conclusions faites à l’issue des réunions de concertation menées par le ministère de l’Education nationale avec les directeurs des Académies régionales de l’Education et de la Formation et les représentants des établissements scolaires relevant du secteur privé.

Donnant de plus amples précisions sur les nouveaux horaires dans les écoles marocaines, le ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a affirmé, lors du Conseil de gouvernement (1er novembre 2018), que deux formules vont être appliquées, à compter de lundi 12 novembre et ce, dans tous les établissements scolaires au niveau du Royaume. D’après les explications du ministre, la première formule (une salle pour chaque enseignant) comprend deux séances de 9h à 13h et de 15h à 17h, de lundi à vendredi, alors que la séance matinale de mercredi est fixée de 9h à 13h. La deuxième formule (une salle pour deux enseignants) s’étend de lundi à samedi. Dans ce cas de figure, le premier groupe d’élèves aura des cours de 9h à 11h30 et de 13h30 à 15h30, alors que pour le deuxième groupe d’écoliers, les horaires des cours débuteront à 11h30 pour se terminer à 13h30 et de 15h30 à 17h30.

Le monde rural aura ses propres horaires

Pour ce qui est du cycle primaire dans le milieu rural, deux formules sont également prévues. La première (une salle pour chaque enseignant) s’étend de lundi à vendredi et porte sur un horaire continu de 9h à 15h, avec au moins une demi-heure entre les séances matinale et de l’après-midi. Dans la deuxième formule (une salle pour deux enseignants), les cours auront lieu de lundi à samedi, sur deux séances quotidiennes, l’une de 9h à 13h30 et l’autre de 13h30 à 18h. Dans l’enseignement secondaire, avec ses cycles collégial et qualifiant, deux formules seront en vigueur. La première est fixée de 9h à 12h et de 14h à 18h et la deuxième de 9h à 13h et de 15h à 18h et ce, sous réserve des dispositions de la note 43 du 22 mars 2006, relative à l’organisation des cours dans l’enseignement secondaire.

Heure légale : Mais jusqu’où ira l’entêtement du gouvernement ?

Dans le même sens, le ministre en charge des relations avec le Parlement et la Société civile, porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi, a expliqué, à l’issue du Conseil de gouvernement du 1er novembre, que les nouveaux horaires dans le milieu scolaire peuvent être adaptés aux spécificités des différentes régions (urbaines et rurales).

Enfin, le ministre a fait savoir qu’un retour à l’horaire scolaire normal est à prévoir dans l’ensemble des établissements scolaires en période de printemps. Voilà qui déboussolera davantage les apprenants et leurs parents!

Flexibilité au travail pour les fonctionnaires

Les administrations publiques et les collectivités locales sont également concernées par les décisions unilatérales prises par l’Exécutif. En effet, le gouvernement a adopté, ce même jeudi 1er novembre, un nouveau projet de décret modifiant le décret n° 2.05.916 du 20 juillet 2005. Le nouveau texte fixe, pour ces administrations et collectivités, les journées et horaires de travail. Présenté par le ministre délégué chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l’Administration, Mohamed Ben Abdelkader (USFP), ce projet de décret ajoute un article autorisant les chefs des administrations et des collectivités locales à accorder des facilités dans certains cas, en vue d’être en phase avec les dispositions prises dans le cadre du réaménagement des horaires dans les établissements scolaires à travers le Royaume. Pour beaucoup de citoyens, l’administration publique fait déjà preuve d’un laxisme que le Souverain avait fustigé à l’occasion du Discours du Trône de juillet 2017. En effet, SM le Roi avait appelé à un sursaut de conscience au sein des administrations publiques, dans le but de servir la patrie et les citoyens. Les mêmes avis, perplexes, estiment que le fait d’accorder aux chefs des administrations publiques et des collectivités locales cette possibilité de réaménager les horaires des fonctionnaires ouvrira la porte à toutes sortes de dépassements et à des traitements de faveur. Lesquelles pratiques risquent de créer des frictions et entraver le bon fonctionnement d’un grand nombre d’administrations. Et cela au détriment des citoyens qui s’estiment écartés de toute discussion par leurs représentants politiques.

Un problème de communication…   

De l’avis des observateurs de la scène politique nationale, la décision de maintenir l’heure GMT+1 au Maroc devrait, notamment, être précédée d’une large campagne de consultation, de communication et de sensibilisation de la part du gouvernement, concernant le bien-fondé de cette mesure, laquelle a pris les citoyens de court; sachant qu’à la veille de cette annonce, les Marocains s’apprêtaient à faire retarder leurs montres de 60 minutes. C’est d’ailleurs l’un des points principaux sur lequel le chef de gouvernement a été interpellé, jeudi 1er novembre, lors de son passage sur  la chaîne tangéroise Médi1TV, dans le cadre d’une interview télévisée. En réponse aux reproches des citoyens sur l’absence de concertation avec les citoyens et les composantes de la majorité avant la prise d’une telle décision, Saâd-Eddine El Othmani a admis avoir commis une erreur, en ce sens qu’il n’avait pas avisé les citoyens suffisamment tôt de la décision de maintenir l’heure d’été au Maroc.

GMT+1 : les explications du ministre Mohamed Benabdelkader

… Et de sensibilisation  

Cette situation pousse à se poser une nouvelle fois la question de savoir quel est le rôle exact des partis politiques marocains. Dans toutes les démocraties du monde, les formations politiques encadrent les citoyens et leur expliquent les tenants et les aboutissants de décisions aussi importantes que celle concernant l’heure légale. Hormis quelques déclarations ici et là de responsables partisans, les citoyens n’ont pas été approchés par les partis politiques, dans un but de calmer au moins leurs ardeurs et tenter d’empêcher que s’installe une mésentente avec El Othmani et son équipe gouvernementale.

Le passage du chef de gouvernement, le soir du 1er novembre 2018, sur la chaîne Médi1 TV, a ajouté une dose au mécontentement populaire, quant au rendement du gouvernement actuel, jugé médiocre, de l’avis d’analystes politiques. Ne disposant pas de chiffres, ni d’arguments probants pour défendre sa politique dans des secteurs aussi vitaux que ceux de l’enseignement, de la santé et de l’emploi, entre autres, Saâd-Eddine El Othmani a renforcé chez le téléspectateur le sentiment qu’au Maroc, les responsables gouvernementaux et partisans sont défaillants.

Mohcine Lourhzal

Que faire pour les salariés du privé?

Pour les fonctionnaires, le problème d’inadéquation des horaires entre les écoles ne se pose plus avec l’adoption de la flexibilité au travail. Cependant, les salariés du privé auront certainement de grandes difficultés à s’adapter à ces nouveaux horaires, sachant que, pour la plupart d’entre eux, le travail commence dès 8h15 du matin. Et que dire des ouvriers qui travaillent dans les usines? Pour eux, la journée commence, la plupart du temps, aux alentours de 5 heures ou 6 heures. Au moment où nous mettions sous presse, le gouvernement demeurait encore silencieux concernant leurs cas.

Les infrastructures manquent cruellement

Le ministre de l’Education nationale a expliqué, concernant les changements d’horaires qui toucheront les établissements scolaires durant le mois en cours, que les élèves pourront utiliser les espaces scolaires, notamment durant les pauses déjeuner. Le hic, c’est que ces espaces sont inexistants et ce, dans plusieurs écoles dans le milieu urbain. Parfois, même les toilettes ne sont pas praticables ! Dans le rural, la situation est encore plus dramatique.

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