Même s’il est encore tôt pour faire un bilan exact de tous les dégâts des dernières inondations dans le pays, l’heure est à l’assistance des sinistrés. Mais déjà des questions s’imposent. Aurait-on pu éviter la catastrophe si les infrastructures étaient mises à niveau? Et combien cela va-t-il coûter sur le plan interne ou externe?
Des routes effritées, des ponts effondrés, des accès fermés, les inondations qu’a connues le Maroc ces derniers jours ont exigé une mobilisation. D’ailleurs, sur instructions royales, une délégation du ministère de l’Intérieur, conduite par Mohamed Hassad, s’est rendue, vendredi 28 novembre, dans les régions sévèrement frappées par les inondations. Une mobilisation des autorités locales, des forces de sécurité, des Forces Armées Royales, de la Gendarmerie Royale et de la Protection Civile a permis d’atténuer les conséquences des intempéries et de sauver plusieurs vies humaines. Ainsi, les opérations de secours menées depuis le 27 novembre 2014 ont permis le sauvetage de 1.093 personnes, en majorité dans les régions de Guelmim-Semara et de Souss-Massa-Draâ. A titre préventif, 1.690 personnes habitant des zones à risques ont été évacuées en temps opportun, notamment dans les provinces de Guelmim (650), Chtouka-Aït Baha(491), Taroudant (164) et Smara(157). 103 douars répartis sur 9 provinces ont été désenclavés sur un total de 356. Les opérations se poursuivent pour désenclaver les douars restants.
Les efforts menés par les services techniques ont permis de rétablir la circulation sur 9 routes nationales (sur 14), 22 régionales (sur 36) et 35 provinciales (sur 51). Des denrées alimentaires de première nécessité, des couvertures et des tentes ont été acheminées vers les zones enclavées grâce aux moyens aériens déployés par les FAR et la Gendarmerie Royale. Ainsi, près de 2.000 kits alimentaires ont été distribués dans certaines localités relevant des provinces de Taroudant, Sidi Ifni, Ouarzazate, Figuig, El Haouz, Chichaoua et Tinghir. Par ailleurs, 10 bateaux de pêche chargés de vivres, ainsi que de stations de traitement d’eau et de bonbonnes de gaz ont quitté le port d’Agadir, le 1er décembre, à destination du port de Sidi Ifni, pour approvisionner les populations enclavées. Mardi 2 décembre, les parlementaires ont interpellé le ministre de l’Equipement, du Transport et de la Logistique au sujet des inondations qui ont paralysé les régions du sud.
«Nous sommes toujours dans la phase de collecte des données et de recensement des dégâts dans les zones touchées. Une chose est sûre: 505 ponts ont été détruits. Les inondations de 2009 avaient coûté près de 4 MMDH», a rappelé le ministre de l’Equipement.
Dans un premier bilan, le ministère de l’Intérieur a de son côté souligné que ces intempéries ont causé, depuis le 27 novembre 2014, le décès de 11 personnes. Huit parmi elles ont succombé suite à l’effondrement de leurs maisons en pisé, alors que les trois autres ont été emportées par les crues des oueds. Deux personnes sont toujours portées disparues et demeurent activement recherchées.
Les barrages font le plein
Les dix barrages du Souss-Massa-Daraâ ont affiché un taux de remplissage de 90,1%, selon l’Agence hydraulique du Souss-Massa-Daraâ. Le volume est de 1.313,79 millions de m3, sur une capacité de 1.458,54 millions de m3, soit 930,91 millions de m3 d’apports en eau depuis le 20 novembre. Les réserves font ressortir un taux de remplissage à 110,5% pour le barrage Dkhila, 105,2% pour Mansour Eddahbi, 103,2% pour Youssef Ben Tachefine, 102,8% pour Aoulouz, 102,2% pour Imi El Kheng, 101,8% pour Ahl Souss, 101,3% pour Moulay Abdellah, 67,1% pour Tiouine et 57,4% pour Abdelmoumen.
Des retombées…
L’export des fruits et légumes est paralysé à cause des fortes précipitations qu’a connues le Souss. Cette région assure 60% de l’export des agrumes et environ 90% des expéditions de fruits et légumes. D’ailleurs, la région participe à hauteur de 70% à l’approvisionnement du marché national en fruits et légumes.
Indemnités
L’arboriculture fruitière peut prétendre à une indemnisation de l’assurance agricole multirisque, à condition que la zone concernée soit déclarée sinistrée. Les cultures de primeurs sont hors champ de couverture et jusqu’à présent le ministère de l’Agriculture n’a pas évalué les dégâts dans ce secteur. D’ailleurs, les cultures de primeurs et autres légumes sont les plus touchées dans le Souss. Selon les professionnels du secteur, entre 10 et 15% d’exploitations sont inondées. D’autres régions, notamment le Gharb et le Haouz, connaissent la même situation, mais avec une intensité beaucoup moindre que dans le Souss.
Guelmim «zone sinistrée»
Guelmim (200 kilomètres au sud d’Agadir) est déclarée «zone sinistrée». Les fortes précipitations qui se sont abattues, le vendredi 28 novembre 2014, sur la région ont causé d’importants dégâts. Les pluies ont endommagé de nombreuses infrastructures et provoqué le débordement des oueds de la région et des environs, entraînant ainsi l’isolement de la région. La situation est catastrophique à tel point que les autorités de la province ont déclaré Guelmim «zone sinistrée». La crue de l’oued Oum Laâchar qui traverse la ville avait emporté la digue devant protéger cette cité, provoquant ainsi d’importants dégâts dans les quartiers sud de la ville et isolant des quartiers comme Hay Rahma, Moulay Youssouf, Gramiz, Amhairich et le quartier industriel. Les eaux ont également coupé la Route Nationale n° 12 et la RN menant respectivement à Sidi Ifni et en direction de Tan Tan.
Pont aérien
Les dégâts matériels sont considérables. Plusieurs milliers d’habitations ont été totalement détruites, des routes coupées, des ponts effondrés et le réseau électrique endommagé. Au moins 250 villages étaient encore «enclavés» ce lundi 1er décembre. Un pont aérien a notamment été mis en place entre Guelmim et Sidi Ifni (sud-ouest) pour porter assistance aux populations encerclées par les eaux en leur apportant couvertures, eau potable et alimentation, mais aussi une assistance médicale. Ainsi, deux femmes ont été transportées pour accoucher et un homme pour sa séance de dialyse.
Bouchra Elkhadir