Annexion de Jérusalem-Est, par Israël, en juin 1967
Samedi 7 octobre 2023, les combattants palestiniens du Hamas lancent l’opération «Déluge d’Al Aqsa». L’attaque a pris l’Etat hébreu par surprise. Quelques heures, plus tard, Israël lance une opération de représailles meurtrière sur Gaza.
Pour comprendre le conflit qui oppose le peuple palestinien à Israël, il faut remonter à l’origine du mouvement sioniste et à la création d’Israël qui visait à reconquérir ce que les Israéliens considèrent comme «terre promise».
De la promesse de Balfour jusqu’à la naissance d’Israël, en passant par le plan de partition
En 1917, Arthur James Balfour, alors Secrétaire d’Etat britannique aux Affaires étrangères, adresse une lettre à Lord Rothschild, pour lui communiquer l’engagement du Gouvernement britannique en faveur de l’établissement d’un foyer national juif en Palestine. Par cette Déclaration, le Royaume-Uni se déclarait en faveur de l’établissement en Palestine d’un «foyer national pour le peuple juif». Cette déclaration est considérée comme une des premières étapes dans la création de l’État d’Israël. En 1947, les Nations-Unies adoptaient la Résolution 181, connue sous le nom de Plan de partition, qui voulait diviser la Palestine entre un Etat juif et un Etat arabe. Le 14 mai 1948, Israël est créé, déclenchant la première guerre israélo-arabe. La guerre s’est terminée en 1949 avec la victoire d’Israël. Entre temps, 750.000 Palestiniens ont été déplacés et le territoire divisé en 3 parties, l’Etat d’Israël, la Cisjordanie et la bande de Gaza. Au cours des années suivantes, les tensions se sont accrues dans la région, notamment entre Israël et l’Egypte, la Jordanie, la Syrie. A la suite de la crise de Suez en 1956 et de l’invasion israélienne de la péninsule du Sinaï, ces trois pays signent des accords de défense mutuelle en prévision d’une éventuelle mobilisation des troupes israéliennes.
Guerres israélo-arabes et échec de la paix
En juin 1967, Israël attaqua de manière ??? les forces aériennes égyptiennes et syriennes, déclenchant la guerre des Six Jours. Après la guerre, Israël prend le contrôle territorial de la péninsule du Sinaï et de la bande de Gaza à l’Egypte alors dirigée par le Président Gamal Abdel Nasser. Israël s’empare également de la Cisjordanie et Jérusalem-Est, outre les hauteurs du Golan. Six ans plus tard, lors de ce qu’on appelle la guerre d’octobre ou guerre du Kippour, l’Egypte et la Syrie lancent une attaque surprise sur deux fronts contre Israël pour regagner leurs territoires perdus. La confrontation militaire n’a pas abouti à des gains significatifs pour l’Egypte, Israël ou la Syrie, mais le Président égyptien de l’époque, Anwar Al Sadate a estimé que la guerre était une victoire pour son pays, car elle a permis à l’Egypte et à la Syrie de négocier sur un territoire précédemment cédé. Finalement, en 1979, à la suite d’une série de cessez-le-feu et de négociations de paix, les représentants de l’Egypte et d’Israël ont signé les accords de Camp David, un traité qui a mis fin au conflit de trente ans entre le Caire et Tel-Aviv. Même si ces accords ont quelque peu amélioré les relations entre Israël et ses voisins, la question de l’autodétermination et de l’autonomie palestinienne est restée en suspens. En 1987, des centaines de milliers de Palestiniens vivant en Cisjordanie et dans la bande de Gaza se sont soulevés contre le gouvernement israélien lors de ce qu’on appelle la première Intifada. Les accords d’Oslo I de 1993 ont servi de médiateur dans le conflit, établissant un cadre permettant aux Palestiniens de se gouverner eux-mêmes en Cisjordanie et à Gaza, et ont permis une reconnaissance mutuelle entre l’Autorité palestinienne nouvellement créée et le gouvernement israélien. En 1995, les accords d’Oslo II, ont élargi le premier accord, en ajoutant des dispositions exigeant le retrait complet d’Israël de 6 villes et 450 villages de Cisjordanie. En septembre 2000, le Premier ministre israélien Ariel Sharon (mort en 2014 après avoir passé 8 années dans un coma profond suite à une attaque vasculaire cérébrale), fait irruption dans l’esplanade de la Mosquée Al Aqsa. Il était accompagné d’un groupe de colons juifs extrémistes. Ça sera le début de la deuxième Intifada qui durera jusqu’en 2005. En réponse, le gouvernement israélien a approuvé la construction d’une barrière autour de la Cisjordanie en 2002, malgré l’opposition de la Cour de Justice et la Cour pénale internationales.
Tel-Aviv profite du factionnalisme palestinien
Le factionnalisme parmi les Palestiniens a éclaté lorsque le Hamas a remporté les élections législatives palestiniennes en 2006, détrônant le parti majoritaire de longue date, le Fatah. Cela a donné au Hamas, un mouvement politique et militant inspiré des Frères musulmans palestiniens, le contrôle de la bande de Gaza. Les Etats-Unis et l’Union Européenne, entre autres, n’ont pas reconnu la victoire électorale du Hamas, considéré par le monde occidental comme «organisation terroriste», depuis la fin des années 1990. Après la prise de contrôle de la Bande de Gaza par le Hamas, des violences ont éclaté avec le Fatah. Entre 2006 et 2011, une série d’échecs de pourparlers de paix et d’affrontements meurtriers ont abouti à un accord de réconciliation. Le Fatah a alors formé un gouvernement d’unité avec le Hamas en 2014. A l’été de la même année, des affrontements dans les territoires palestiniens ont précipité une confrontation militaire entre l’armée israélienne et le Hamas, au cours de laquelle Israël a riposté par une offensive disproportionnée à Gaza, contre les tirs de roquettes sur Israël par le Hamas. L’affrontement s’est terminé fin août 2014 par un accord de cessez-le-feu négocié par l’Egypte, mais seulement après la mort de 2.254 palestiniens et 73 Israéliens. Après une vague de violence entre Israéliens et Palestiniens en 2015, le Président palestinien Mahmoud Abbas du Fatah, annonce que les Palestiniens ne seraient plus liés par les divisions territoriales créées par les accords d’Oslo. En mars et mai 2018, les Palestiniens de la bande de Gaza organisent des manifestations hebdomadaires à la frontière entre la bande de Gaza et Israël. La dernière manifestation a coïncidé avec le soixante-dixième anniversaire de la Nakba. Alors que la plupart des manifestants étaient pacifiques, pas moins de 183 manifestants ont été tués et plus de 6.000 ont été blessés par l’armée israélienne. Cette atmosphère tendue a entraîné un retour à la désunion entre le Fatah et le Hamas, le parti Fatah de Mahmoud Abbas contrôlant l’Autorité Palestinienne et le Hamas qui dirige la bande de Gaza. En mai 2018, des combats ont de nouveau éclaté entre le Hamas et Tsahal, ce qui est devenu la pire période de violence depuis 2014, avant de parvenir à un cessez-le-feu.
La loi du plus fort
En janvier 2020, l’Administration Trump publiait son «Plan de Paix», qui a été rejeté par les Palestiniens en raison de son soutien à l’annexion israélienne des colonies de Cisjordanie et au contrôle d’une Jérusalem «indivise de l’Etat juif», après avoir annulé le financement de l’Office de Secours et de Travaux des Nations-Unies pour les Réfugiés palestiniens (UNRWA) qui fournit une aide aux réfugiés palestiniens ; puis transféré l’Ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem et reconnu la ville Sainte d’Al Qods comme capitale d’Israël. En octobre de la même année, un tribunal israélien a statué que plusieurs familles palestiniennes vivant au quartier Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est, devaient être expulsées et que leurs terres devaient être cédées à des familles juives. En février 2021, plusieurs familles palestiniennes de Sheikh Jarrah ont fait appel de la décision du tribunal, provoquant des protestations autour des audiences d’appel, de la bataille juridique en cours autour de la propriété immobilière et du déplacement forcé des Palestiniens de leurs foyers à Jérusalem. Fin avril 2021, les Palestiniens ont commencé à manifester dans les rues de Jérusalem pour protester contre les expulsions imminentes, et les habitants de Sheikh Jarrah, ainsi que d’autres militants, ont commencé à organiser des sit-in nocturnes. Début mai (2021), après qu’un tribunal s’est prononcé en faveur des expulsions, les manifestations se sont étendues, la police israélienne déployant ses forces contre les manifestants. Le 7 mai, après des semaines de manifestations quotidiennes et de tensions croissantes entre les manifestants, les colons israéliens et la police, pendant le mois de Ramadan, des violences éclatent dans l’enceinte de la Mosquée Al Aqsa, la police israélienne utilisant des grenades assourdissantes, des balles en caoutchouc. Bilan, plusieurs morts et blessés dans les rangs des Palestiniens. Le 10 mai, le Hamas et d’autres groupes militants palestiniens lancent des roquettes sur Israël qui répond par des bombardements d’artillerie et des frappes aériennes massives sur Gaza, tuant et blessant grièvement un grand nombre de civils. Tout en prétendant cibler le Hamas entre autres composantes de la résistance palestinienne et leurs infrastructures, Israël a étendu sa campagne aérienne et frappé des infrastructures non-militaires, notamment des bâtiments résidentiels, des sièges de médias, et des centres de soins pour réfugiés. Le 21 mai 2021, Israël et le Hamas conviennent d’un cessez-le-feu fragile qui ne durera pas longtemps. En effet, 2022 a marqué un regain de tensions entre Israéliens et Palestiniens. C’est surtout les premiers mois de 2023 qui se sont caractérisés par une tendance constante aux affrontements en Cisjordanie, avec notamment des incursions israéliennes quasi-quotidiennes. Israël a également approuvé plus de 5.000 nouveaux logements pour colons en juin 2023 qui, comme d’autres colonies sur le territoire palestinien, sont considérés par les experts et les institutions intergouvernementales comme illégaux au regard du droit international. L’armée israélienne a également intensifié au cours des derniers mois ses opérations militaires, dans le camp de réfugiés de Jénine en Cisjordanie et ses interventions musclées dans l’esplanade des mosquées.
Le conflit d’octobre 2023 entre Israël et le Hamas à Gaza, marque une étape grave dans le conflit israélo-palestinien. Ce qui complique davantage la situation c’est que depuis décembre 2022, Israël est dirigé par un gouvernement, considéré comme étant le plus extrémiste dans l’histoire de l’Etat hébreu. Dirigé par Benjamin Netanyahu et son parti le Likoud, l’actuel gouvernement israélien comprend deux partis ultra-orthodoxes et trois autres d’extrême droite.
Mohcine Lourhzal