Obtenir la majorité la plus large possible pour n’être l’esclave de personne: tel était l’objectif initial de Mario Draghi lorsqu’il a commencé à mener les discussions en vue de la constitution de son gouvernement, le 3 février.
En un peu plus d’une semaine, l’ancien président de la Banque centrale européenne (BCE) a gagné son pari, obtenant, outre l’appui de l’ensemble des forces de gauche et de la majorité du Mouvement 5 étoiles, le ralliement des deux principaux groupes de la droite au Parlement, Forza Italia (pro-Berlusconi, droite modérée) et la Ligue (extrême droite). Seuls restent en dehors de la majorité quelques dissidents du M5S et les post-fascistes de Fratelli d’Italia.
En confiant à Giancarlo Giorgetti le portefeuille stratégique du développement économique, Mario Draghi, tout en tirant les conséquences du ralliement de la Ligue, place son chef de file, Matteo Salvini, dans une situation compliquée. Parlementaire depuis un quart de siècle, Giancarlo Giorgetti est une figure du parti à la stature incontestable, extrêmement populaire dans les milieux d’affaires de Lombardie. Et ces derniers mois, il s’est éloigné du dirigeant de la Ligue, au point d’incarner désormais une ligne très différente de la sienne, nettement plus modérée.
Le gouvernement dirigé par Mario Draghi sera sans doute en mesure de régler les problèmes à court terme, notamment ceux liés à la crise économique produite par la pandémie et à la préparation d’un plan raisonnable d’utilisation de la part italienne du recovery found. Mais le pays a besoin d’un gouvernement qui dure plus qu’un an pour redresser le chemin du déclin des dernières décennies. Or, dans un an viendra à échéance le mandat du Président Mattarella et M. Draghi est prévu pour être son successeur. Même s’il restait à la tête de l’exécutif jusque à la fin de la législature, dans deux ans, le retour au pouvoir des partis politiques sera alors problématique.
P. Zehr