Pour le Président de l’Institut Marocain des Relations Internationales (IMRI), l’extrême droite française utilise la question migratoire comme un fonds de commerce. De l’avis de Jawad Kerdoudi, immigrer n’est plus une bonne idée, à une époque où le rêve européen est en train de s’effriter.
«Au sein du continent européen, il existe deux modèles migratoires»
Quelle influence de l’extrême droite au sein de l’Europe suite aux dernières élections européennes?
A l’issue du scrutin européen qui s’est tenu début juin 2024, le PPE a obtenu 188 sièges, tandis que les Conservateurs Réformistes en ont eu 78.
Les Souverainistes ont décroché 25 sièges, alors que les Patriotes pour l’Europe qui constituent la véritable extrême droite, ont eu 84 sièges. Ce qui fait au total, 375 députés pour la droite et l’extrême droite, soit 52% du Parlement Européen, sachant que ce dernier compte au total 720 parlementaires.
Le reste des sièges est réparti entre les Socialistes et les Démocrates (136), Renew (77 sièges), les Verts (53) et la Gauche (46 sièges). Ce qui leur fait un total de 312 parlementaires, c’est-à-dire 43%.
Je considère donc, que l’extrême droite ne constitue pas un grand danger au sein du Parlement européen, bien qu’ayant réalisé une nette avancée en termes de sièges.
D’aucune estiment que le danger est toujours présent, dans la mesure où l’extrême droite aura son mot à dire à l’Assemblée Nationale, le RN et ses alliés ayant obtenu 143 sièges. Partagez-vous ce point de vue?
Bien entendu, l’extrême droite qui a un Groupe important au sein de l’Assemblée Nationale, exercera une certaine pression, notamment en essayant de bloquer certaines lois, sauf en cas d’accord entre le Nouveau Front Populaire et les Macronistes.
Heureusement que le Rassemblement National n’a pas eu la majorité absolue au 2ème Tour des législatives, lui qui voulait supprimer le droit du sol et limiter l’accès à la nationalité française, à la seule naturalisation qui est beaucoup plus compliquée, entre autres mesures.
D’autres décisions allaient être prises contre les immigrés, notamment en ce qui concerne la sécurité sociale, l’emploi et l’accès au logement. Je pense que beaucoup de nos concitoyens, notamment les Cadres, allaient à ce moment-là, songer sérieusement à retourner définitivement au Maroc.
Beaucoup sont aujourd’hui convaincus que l’Eldorado européen est révolu et qu’il est plus judicieux en tout cas pour les jeunes Marocains qui souhaitent partir à l’étranger, de bâtir leur avenir au Maroc.
Au sein du continent européen, il existe deux modèles migratoires. Le modèle britannique qui prône les libertés individuelles du moment qu’elles n’empiètent pas sur celles d’autrui. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle, il y a beaucoup moins de problèmes liés à l’immigration au Royaume-Uni.
En France, les immigrés sont obligés d’abandonner leurs coutumes et traditions s’ils veulent s’intégrer pleinement dans la société. C’est ce qui crée des malentendus et des frictions de part et d’autre. En France, la question migratoire est utilisée comme un fonds de commerce par l’extrême droite, ce qui fait que le modèle migratoire français est préjudiciable aux étrangers.
Heureusement que l’extrême droite n’a pas eu la majorité absolue au 2ème Tour des législatives françaises, grâce au sursaut d’électeurs beaucoup plus souples, qui ont placé le Nouveau Front Populaire (NFP) en première position. Le NFP est plus respectueux envers les ressortissants étrangers et leurs droits.
Construire son avenir au Maroc est la meilleure décision à prendre. Le gouvernement doit multiplier les initiatives pour inciter la jeunesse marocaine à rester dans son pays au lieu de s’aventurer vers d’autres cieux à la recherche d’un Eldorado qui n’existe plus. Les pouvoirs publics doivent mettre le paquet sur l’école et l’emploi. Certes, des programmes sont lancés dans ces deux secteurs, mais il reste encore à faire pour renforcer ces deux piliers qui favorisent l’ascension sociale.
Propos recueillis par Mohcine Lourhzal