Nadia, 38 ans, comptable, est divorcée et mère de deux enfants. Le statut de femme divorcée lui a valu de nombreux déboires. Voici son récit.
«J’ai divorcé et alors? On se mêle de quoi, là? Elle est hallucinante cette mentalité biaisée au sujet des femmes séparées. Je jure qu’une fois seule à élever mes enfants, mise à part ma famille, personne ne m’a soutenue. Au contraire… Et ce n’est pas une impression. Certaines femmes m’ont vite vue comme étant une curieuse bête de cirque, ou une pestiférée… Sinon, une rivale à exterminer. Quant à certains hommes, jeunes ou vieux, je représentais sûrement pour eux l’avatar de la proie facile, voire de la prostituée. Mes enfants, eux aussi, en ont fait les frais. Il n’y a pas pire pour des gamins. Ce qui nous a sauvés mes enfants et moi, c’est de larguer les amarres. N’est-ce pas grave ?
Mon ex-mari et moi, après 10 années de vie commune, avons décidé, il y a un an, qu’il valait mieux nous séparer. Notre couple battait de l’aile et ce, depuis longtemps, trop longtemps même. Faire semblant devenait insupportable pour nous deux. Notre déplorable situation de couple devait donc cesser. Sinon, elle risquait fort bien de porter atteinte à l’équilibre psychologique de nos enfants, ou de nous faire commettre l’irréparable. Nous avons donc fait le nécessaire sans animosité et avec respect des volontés de chacun. J’ai gardé mes deux enfants avec moi, dans notre appartement que mon mari nous a cédé légalement. Il s’est installé ailleurs avec sa maîtresse. Il continue de s’intéresser à eux et ne refuse jamais de régler sa pension et les extras qu’ils réclament. Mon ex-mari n’est pas un père indigne. Je sais que j’ai de la chance, de ce côté-là. Le problème que je rencontre aujourd’hui ne vient pas de lui, mais des gens.
Depuis que je suis une femme divorcée, les premières à m’avoir jeté la pierre ont été certaines personnes que je croyais être mes amies. Non seulement elles m’évitent, mais elles s’arrangent pour que mes enfants ne soient plus les bienvenus dans l’entourage des leurs. Il ne reste que celles qui, professionnellement, sont obligées de continuer à me faire des courbettes, sans jamais me mêler à leur milieu. Il n’y a pas qu’elles. Les voisines qui semblaient être gentilles et polies, elles aussi se sont défendues d’avoir le moindre contact avec moi, pas même un simple salut. Nul doute que ce comportement est lié à mon nouveau statut. C’est avec regret que j’affirme que la solidarité féminine est inexistante dans notre société. Il est honteux de se comporter de la sorte!
Maintenant, je vais parler des hommes. Evidemment, pas tous. Cependant, ils restent quand même nombreux, ceux qui ont eu un comportement odieux avec moi. Surtout ceux qui ont eu la possibilité de savoir que j’étais une femme divorcée et qui se sont imaginé que j’étais ok à toutes leurs détestables tentatives de séduction. Par exemple, j’ai été bouleversée, complètement déstabilisée, quand des collègues mariés -que j’estimais beaucoup- m’ont fait d’indécentes propositions. Aussi, quand certains, ont cru qu’il était désormais permis de me faire les yeux doux tout osant poser leur main sur mon épaule en me saluant. Quand c’est arrivé, je n’ai pas réagi parce que je ne l’imaginais pas possible de leur part ! C’est dégoûtant!
Le pire, qui a été absolument insupportable, c’est la cruelle méchanceté des enfants de ces idiots de parents qui se croient à l’abri d’un divorce. C’est pitoyable que des parents se moquent d’une femme divorcée devant leurs enfants. Ils ne sont pas conscients qu’une fois à l’école, la langue de leurs crétins de rejetons se délie. Cela devient une arme puissante pour railler les petits camarades de classe qui ne sont en rien responsables de la décision de leurs papas et mamans. J’ai vraiment pété un plomb lorsque mes enfants ont été la cible de ces petits bourreaux en herbe. Le scandale que j’ai fait à l’école aurait pu être évité si la bassesse des adultes ne s’était pas mêlée de ma vie.
A cause d’eux et d’autres vicieux, j’ai déménagé dans une autre ville, la capitale. Au moins ici, j’ai la paix pour le moment, vu que personne ne peut lire sur mon front que je suis divorcée, avec des enfants. Moi, j’ai pu… Mais toutes mes pensées vont vers celles avec leurs petits qui endurent l’imbuvable. Il faut se réveiller. La montée en flèche du nombre de divorces chez nous n’est pas une fiction»
Mariem Bennani