Les efforts consentis en matière de rationalisation de la détention préventive ont permis d’en réduire le taux, a indiqué, lundi à Tanger, Moulay El Hassan Daki, procureur général près la Cour de Cassation, Président du Ministère public.
Intervenant à l’ouverture du 5è séminaire régional sur “la rationalisation de la détention préventive”, M. Daki a précisé que les efforts déployés jusqu’à présent ont permis de réduire le taux de détention préventive, atteignant 43% de la population carcérale totale (89.814 détenus) à fin novembre, contre 45,25% à fin septembre.
Ce taux a oscillé entre 44 et 45% tout au long de l’année 2021, a poursuivi le responsable,formulant le souhait que la réduction du taux de détention préventive puisse continuer dans un futur proche, grâce aux efforts concertés par l’ensemble des intervenants dans le domaine de la justice, notamment la justice répressive.
La propagation de la pandémie du nouveau coronavirus a eu des répercussions négatives sur le bon déroulement de la justice en général et sur la cadence de traitement des dossiers des détenus préventifs en particulier, a fait savoir M. Daki, notant que cette situation exige de tous de redoubler d’efforts en rationalisant le recours à la détention préventive lors de l’engagement des poursuites, ou encore de faire montre d’efficience en termes de rendement lorsqu’il s’agit du traitement des dossiers des détenus et de l’émission de jugements ou encore l’accélération de la procédure de transfert des dossiers des détenus préventifs, objet de recours, vers une juridiction suprême.
L’engagement des poursuites en état d’arrestation ne doit être applicable que dans des cas exceptionnels, a-t-il relevé, insistant sur la nécessité d’offrir des arguments juridiques solides, tels que définis dans les articles 47, 73 et 74 du Code de procédure pénale.
La gestion de la détention préventive est parmi les sujets qui jouissent d’un intérêt particulier de la part de la Présidence du Ministère public, comme en témoigne le grand nombre de circulaires à ce sujet, a ajouté M. Daki, notant que ces circulaires reflètent l’importance accordée à la protection des libertés, compte tenu de la responsabilité des magistrats dans la gestion et la rationalisation de la détention préventive, ainsi que la protection des droits et des libertés, conformément à l’article 117 de la Constitution.
La rationalisation de la détention préventive figure à l’ordre du jour de la majorité des réunions et rencontres relatives au suivi et à la mise en application de la politique pénale, ainsi que l’amélioration du rendement du Ministère public, a-t-il relevé, affirmant que ce sujet revêt une grande importance car il touche au droit à la liberté, un des droits fondamentaux consacré par les conventions internationales et les législations nationales.
La bonne gestion de cette question reflète véritablement dans quelle mesure les règles et conditions d’un procès équitable, et le principe de présomption d’innocence, pierre angulaire des systèmes judiciaires modernes, sont respectés, a estimé M. Daki.
Ce cinquième et dernier séminaire régional constitue l’occasion d’examiner l’élaboration d’un plan d’action clair et efficace pour gérer la détention préventive au vu de son impact et de ses répercussions sur la situation familiale, sociale et professionnelle des personnes concernées, a expliqué M. Daki, notant que les affaires d’environ 2.000 détenus se sont soldées par un acquittement ou non poursuite en 2020, ce qui remet en question l’utilité d’une détention dans ces cas.
Pour sa part, le chef de la section gouvernance de la délégation de l’UE au Maroc, Severin Strohal, a estimé que ce cinquième séminaire, qui intervient après ceux de Casablanca, Marrakech, Agadir et Fès, traduit la solidité et l’importance du partenariat entre la délégation de l’UE et les autorités marocaines dans le chantier de réforme de la justice, notant que cette rencontre est l’occasion de prendre connaissance des expériences européennes en la matière.
La rationalisation de la détention préventive est au cœur des débats entre les pays de l’Union européenne à l’heure actuelle, a-t-il fait savoir, notant que le partage d’expériences et d’expertises peut aider les autorités marocaines à réduire le taux de détention préventive, étant le dernier recours, et à chercher des mesures alternatives telles que la liberté sous caution, le placement sous surveillance électronique ou encore l’interdiction de quitter le territoire, qui préservent le principe de présomption d’innocence.
Ce séminaire, qui prendra fin mardi, se déroule avec la participation des magistrats du Ministère public opérant au niveau des circonscriptions judiciaires de Rabat, Kénitra, Tanger, Tétouan et Al Hoceima, de responsables de la police judiciaire, de la Gendarmerie royale et de la Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR), ainsi que des représentants des huissiers de justice et des avocats.
LR/MAP