La Journée internationale de la femme est un moment de bilan et de réflexion.
Au Maroc, la condition féminine s’est considérablement améliorée au cours des deux dernières décennies. Confronté à moult obstacles, le processus d’émancipation féminine demeure toutefois incomplet.
Réalisations importantes
Les acquis législatifs au profit de la femme marocaine ont été renforcés, d’abord grâce au Code de la Famille. Promulguée en 2004, la Moudawana a répondu à une attente nationale forte, considérant la lutte contre les inégalités hommes-femmes comme facteur de développement et de cohésion sociale. Mais la plus grande consécration féminine, fut sous le gouvernement Abbas El Fassi en 2007. Pas moins de huit ministres femmes y figuraient. Une consécration de la volonté de SM le Roi Mohammed VI, de rendre justice aux femmes marocaines.
Découlant de la volonté de la plus haute autorité de l’Etat, le Maroc a également procédé à l’approbation du Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination basées sur le genre, outre le protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par le Royaume en 1979. Autre mesure phare entreprise en faveur de la promotion de la condition féminine, celle relative à la modification de la loi sur la nationalité qui garantit une égalité totale entre les hommes et les femmes, à travers le transfert de la nationalité marocaine aux enfants nés d’un mariage mixte.
Chassez le sexisme, il revient au galop
L’élan vers l’engagement politique des femmes a connu un coup de frein à partir de 2011. Ainsi, le gouvernement Benkirane I ne comptait qu’une seule femme ministre. Ce nombre est passé à six suite au remaniement ministériel de 2013 (Gouvernement Benkirane II). Le 17 mars 2017, Saâdeddine El Othmani est nommé Chef de gouvernement par SM le Roi, pour remplacer son prédécesseur, Abdelilah Benkirane après cinq mois de blocage dans la formation d’une nouvelle majorité gouvernementale. Comptant neuf femmes ministres, le gouvernement El Othmani I a été bien accueilli par les esprits progressistes. Tous espéraient un nouveau départ sur la voie de la parité hommes-femmes en politique. Malheureusement, cet espoir s’est fracassé à l’annonce de la composition du gouvernement El Othmani II, en octobre 2019. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la parité n’a pas été au rendez-vous. Quatre femmes seulement sur un total de 24 ministres! C’est à se demander si, au Maroc, les femmes ne sont pas dotées de facultés intellectuelles qui leur permettent d’assumer pleinement des postes de responsabilité. La responsabilité de cette situation qui va à l’encontre de la Constitution de 2011 est partagée entre les partis politiques et les femmes elles-mêmes. Si les formations politiques proposent peu de profils de femmes ministrables, il ne faut pas nier que dans un monde d’hommes, il est difficile de s’imposer en tant que femme. Ceci est le résultat d’une culture ancrée dans la société. Pourtant, le principe d’égalité hommes-femmes, est clairement institué dans la Constitution. L’article 19 de la loi fondamentale du Maroc, dispose que «l’homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental (…), dans le respect des dispositions de la Constitution, des constantes et des lois du Royaume (…)».
Rien n’est perdu pour autant
L’idéal d’égalité appartient-il au passé? Bien sûr que non. Sous l’impulsion de SM le Roi Mohammed VI, la femme marocaine est en passe de retrouver une nouvelle fois sa place, comme en témoigne le projet de loi organique 04.21 relatif à la Chambre des Représentants. Le texte, adopté le 5 mars 2021 par la Chambre basse du Parlement marocain, remplace la circonscription nationale par des circonscriptions régionales, afin d’assurer une plus grande représentativité des femmes au sein de l’institution législative. Ainsi, au niveau de la Chambre des représentants, la liste nationale qui était partagée avec les jeunes et qui consacrait 60 sièges aux femmes sera remplacée par des listes régionales. Elles permettront désormais à 90 femmes de faire leur entrée au Parlement.
Le travail sur l’aspect culturel associé aux stéréotypes consacrés chez une large frange de la société marocaine demeure encore limité à cause du poids des préjugés, obstruant ainsi la dynamique de développement de la société et entravant la consécration des valeurs d’égalité et de parité hommes-femmes. Parmi les principaux défis dans le processus de consolidation des droits de la femme marocaine, celui de promotion de leurs droits socio-économiques, compte tenu de la pauvreté et de la vulnérabilité dont souffrent nombre de femmes, notamment en milieu rurales.
Si la mise en place des réformes et les progrès réalisés pour combattre les discriminations basées sur le genre sont en marche, des déséquilibres perdurent, et des chantiers restent ouverts pour consolider et généraliser la matérialisation de l’égalité hommes-femmes au Maroc ainsi que la protection des droits des femmes.
Mohcine Lourhzal