Le Maroc, fort de ses atouts indéniables et de son futur modèle de développement, et l’Union européenne (UE) avec son nouveau “pacte vert” et son plan de relance, sont appelés à repenser autrement leur partenariat en lui conférant une teneur davantage stratégique, ont estimé les participants à une conférence virtuelle organisée, mardi soir, à l’initiative de l’Association des ingénieurs de l’Ecole Mohammadia en Europe (AIEM-Europe).
La crise du Covid-19 a bouleversé radicalement les stratégies, les perspectives et les prévisions à l’échelle locale, régionale et mondiale, entraînant une reconfiguration du monde avec à la clé une crise économique et sociale de très grande ampleur. Dans un tel contexte, les deux parties, le Maroc et l’UE, auront beaucoup à gagner en reconsidérant leurs relations dans le cadre d’un “partenariat de prospérité partagée”, qui va au delà du concept de partenariat traditionnel, ont indiqué les participants à ce webinaire tenu sous le thème “L’après Covid 19, quel nouveau modèle de partenariat de l’UE pour la relance des pays du voisinage sud de l’Europe : Cas du Maroc?”.
En ouvrant cette rencontre, Mohamed Amraoui, président de l’AIEM- Europe, est revenu sur l’importance du choix de la thématique de la conférence, compte tenu des importants changements induits par la pandémie du coronavirus à travers le monde, soulignant que la rencontre planche tout particulièrement sur l’avenir du partenariat et de la politique de voisinage de l’Europe avec ses voisins du sud, avec un focus sur le cas du Maroc, dans le sillage des relations séculaires enracinées qu’entretiennent les deux parties.
A cette occasion, Mounssif Aderkaoui, Directeur de la Direction des Etudes et des Prévisions au sein du Ministère de l’Economie et des Finances est revenu sur les mesures anticipatives prise par le Maroc sous le leadership de SM le Roi Mohammed VI pour lutter contre cette crise inédite de portée systémique et multidimensionnelle.
Dans le sillage de cette crise inédite qui, outre son coût humain, a mis à plat les moteurs de l’économie mondiale impactant les pays de manière différenciée, le Royaume et l’UE devront jeter les bases d’une nouvelle relation reposant sur le développement d’un pacte “rénové et ambitieux” dans le cadre d’une vision commune et partagée transcendant le simple rapprochement économique par le libre-échange qui a démontré ses limites.
Les ruptures notamment au niveau des chaînes de valeurs mondiales dues à la crise de Covid-19 offrent une “opportunité historique” aux deux parties pour envisager une inflexion majeur et progressive dans leur partenariat vers une logique de co-développement mutuellement bénéfique, a-t-il estimé.
Pour sa part, Philip Mikos, chef de Coopération à la délégation de l’UE au Maroc, a souligné que les relations entre les deux parties se sont intensifiées au fil des années pour devenir plus intégrées à la faveur de nombre d’accords comme celui de la pêche.
Après qu’en 2019 le Conseil d’association Union européenne-Maroc a redéfini le cadre de sa coopération avec le Royaume, ses priorités et ses domaines, on parle désormais d’un partenariat de prospérité partagée, qui va au delà du partenariat économique, a-t-il noté, faisant observer que ce cadre s’articule autour de quatre éléments, en l’occurrence les valeurs, la convergence socio-économique, la connaissance et une concertation politique “indispensable” pour accompagner la mise en oeuvre de ce partenariat.
Selon M. Mikos, les priorités de l’action extérieure de la Commission européenne ont été revues pour mettre un accent fort sur le multilatéralisme et sur l’engagement envers les partenaires, notamment les pays du voisinage, dont le Maroc.
En outre, et dans le cadre d’une concurrence régionale accrue afin d’attirer les investissements européens notamment dans le cadre des relocalisations de certaines industries dictées par la pandémie du coronavirus, le Maroc se démarque notamment par sa proximité géographique et culturelle de l’Europe et par un cadre normatif établi, stable et fiable, a-t-il indiqué. Cependant, a relevé le responsable européen, le Royaume est appelé également à se doter de davantage d’instruments notamment en ce qui concerne la convergence réglementaire.
De son côté, Markus Faschina, directeur du Bureau de la Banque allemande de Développement au Maroc, a souligné qu’avec la crise de Covid-19, il est devenu très important de booster le partenariat Maroc/UE et Maroc/Allemagne aussi bien au niveau financier qu’en matière de perspectives.
Cette crise, qui impose une reconfiguration de l’économie pour une meilleure inclusion sociale, offre aussi d’énormes possibilités pour renforcer la coopération avec le Maroc notamment dans le domaine des énergies renouvelables à travers la décarbonisation de l’économie, a-t-il dit, affirmant que l’Allemagne est aux côtés du Royaume pour l’accompagner dans sa politique énergétique notamment pour la production de l’hydrogène vert dans le cadre d’une approche de co-développement.
La crise du nouveau coronavirus donne “plus de sens” à cette trajectoire et au positionnement du Maroc, a-t-il constaté, notant que le post-Covid est une “chance” pour le Maroc, dans différents domaines notamment en matière d’éducation avec la digitalisation des services.
Lui succédant dans la prise de parole, Abed Chagar, président de l’AIEM-Maroc a rappelé que pour l’Europe, le Maroc demeure un “cas exceptionnel” et un pays “exemplaire” en termes de stabilité politique, d’infrastructures, d’économie verte, soulignant la nécessité de construire un partenariat d’égal à égal.
La stabilité du Royaume lui permet de s’ériger en hub et en tremplin vers plusieurs pays, a-t-il dit, ajoutant que le Maroc, partenaire de choix, peut servir de base arrière pour tous les pays européens dans leur quête de nouveaux marchés.
Pour affronter l’après Covid-19, M. Abed a insisté sur l’importance d’une réponse collective, commune, coordonnée et préparée dans le cadre d’un esprit gagnant-gagnant.
A son tour, Mihoub Mezouaghi, directeur de l’Agence française de développement au Maroc a relevé que le contexte de l’épidémie du coronavirus offre une occasion “formidable” pour revisiter et “redéfinir” les partenariats entre l’Union européenne et ses voisins de la rive sud de la Méditerranée.
Mettant en garde contre la crise lié au changement climatique qui demeure un vecteur de crises systémiques importantes à l’avenir, il a souligné que la relance durable et la mise en place de politiques de long terme coordonnées demeurent le principal enjeu stratégique pour l’après Covid-19.
Parmi les priorités de l’après Covid-19, il a relevé les défis de la digitalisation, du numérique, de la décarbonisation de l’économie ainsi que le défi de la protection sociale et climatique. Ces priorités doivent être versées dans les agendas des deux régions, a-t-il recommandé, insistant sur la nécessité de stimuler les initiatives des acteurs économiques, de la société civile et de la diaspora et de la coordination des politiques économiques entre les pays des deux rives de la Méditerranée et entre les pays de l’Afrique.
LR/MAP