L’Afrique subsaharienne se positionne désormais comme « le nouvel épicentre du terrorisme mondial » et un terrain fertile pour l’émergence des groupes terroristes les plus meurtriers du monde, révèle le rapport de l’Indice mondial du terrorisme (GTI) 2022 présenté mercredi à Rabat.
Co-présenté par Steve Killelea, président de l’Institut pour l’Économie et la Paix (IEP) basé à Sydney (Australie) et Serge Stroobants, Directeur Europe & MENA à l’IEP, lors d’une rencontre organisée en hybride au Bureau du Programme de l’ONU pour la lutte contre le terrorisme et la formation en Afrique (ONUCT), le rapport a mis en lumière la cartographie du terrorisme mondial avec un focus sur l’Afrique subsaharienne, notamment les pays du Sahel.
Au cours de cette rencontre animée à distance par Carlos Monteiro Reis, Chef du Bureau ONUCT à Rabat, l’accent a été aussi mis sur les indicateurs, les tendances et les développements du terrorisme dans cette région africaine, en proie à des défis polymorphes en termes de multiplication des menaces sécuritaires, politiques, démographiques et environnementales.
Les pays du Sahel représentent 48% du total des décès dus au terrorisme dans le monde et quatre des dix pays ayant connu la plus forte augmentation du nombre de décès liés au terrorisme se trouvent également en Afrique subsaharienne, en l’occurrence le Niger, le Mali, le Nigeria et le Burkina Faso.
A l’origine de cette montée en puissance des actes terroristes dans le Sahel, le document explique que la nébuleuse terroriste dite État islamique (Daech) a délocalisé ses activités dans la région, après son déclin en Syrie et en Irak, d’où la multiplication par dix des décès dus au terrorisme dans cette zone depuis 2007.
M. Killelea a mis l’accent, dans ce sens, sur la concentration du terrorisme dans les zones de conflit, notant que le Sahel s’affiche désormais comme l’épicentre du terrorisme mondial à cause des groupuscules et des organisations criminelles sillonnant cette région aride et tentaculaire, avec un mode opératoire basé principalement sur les actes de violence extrême et les enlèvements contre rançons.
D’après le président de l’IEP, la dégradation de la situation politique et environnementale dans les pays du Sahel est attribuable à la propagation et l’émergence des groupes terroristes. Cette donne, poursuit-il, fait de ces pays un « terrain fertile » de pourvoyeurs de réfugiés et combattants terroristes, ce qui les entraîne quasiment dans un « cercle vicieux ».
L’expert australien a fait observer, par ailleurs, que les terroristes utilisent des technologies plus avancées, notamment des drones, des systèmes GPS et des services de messagerie cryptée.
S’attardant sur les indices d’amélioration ayant marqué ce fléau, le GTI 2022 révèle que la région MENA a gagné deux places par rapport à l’année 2018. Selon le rapport, les décès liés au terrorisme ont diminué de 1,2% en 2021 dans cette région, pour atteindre 7.142 victimes, tandis que les attaques ont augmenté de 17%, soulignant que le terrorisme devient « moins meurtrier ».
De son côté, M. Stroobants a indiqué que les problématiques de sécurité et d’instabilité nécessitent une approche basée sur des solutions systématiques, mettant l’accent sur les défis auxquels font face les pays du Sahel en termes d’instabilité politique, de changement climatique et d’infrastructures de base.
« Quelque 2,7 millions de personnes sont des déplacés dans des zones de conflit » au Sahel, a-t-il dit, ajoutant que les pays de la région débloquent plus de 40% de leur PIB pour combattre le terrorisme alors que cet investissement devrait être alloué aux infrastructures et aux services de base.
Invités à prendre part à cette rencontre, le directeur adjoint de l’ONUCT, Mauro Miedico, , et l’ambassadeur d’Australie à Rabat, Michael Cutts, ont salué le leadership du Maroc au niveau mondial et africain en matière de lutte contre le terrorisme, ainsi que la valeur ajoutée de la mise en place du Bureau l’ONUCT en tant que référence en matière de formation pour les services de sécurité et de la gestion des frontières en Afrique.
Au terme de la rencontre, les responsables du Bureau ONUCT à Rabat ont promis d’adapter les conclusions de ce Rapport GTI-2022 au cursus de formation au sein de l’entité onusienne.
Le siège du Bureau à Rabat, le premier du genre sur le continent africain, a été inauguré en juin 2021. Cet organisme a pour mission d’élaborer et de mettre en œuvre des programmes visant principalement le renforcement de capacités et le développement de compétences dans le domaine de la lutte antiterroriste, notamment en matière de sécurité, d’enquêtes et de poursuites, de gestion des prisons et des frontières, de désengagement, de réhabilitation et de réinsertion.
LR/MAP