Un phénomène de plus en plus courant : les chutes de conteneurs transportés par camion. Des chutes qui provoquent parfois de graves dégâts corporels, matériels et environnementaux.
Le non-respect des règles sécuritaires et du code de la route et l’absence d’entretien de l’état mécanique des véhicules et des chaussées sont les principaux facteurs de ce nouveau danger.
Qui de nous n’a pas vu de camions transportant des conteneurs dénués d’attaches métalliques nommées les «twist-lock», ou n’a pas coupé son souffre en fixant son regard sur le conteneur de crainte qu’il ne lui tombe dessus? Les conducteurs des différents véhicules et des motocycles, ainsi que les piétons paniquent toujours, quand ils aperçoivent un camion poids lourd très proche d’eux et transportant des conteneurs dépourvus d’accessoires antichute. Il est fréquent de voir cette scène sur les artères de Casablanca et dans d’autres villes marocaines: des conteneurs simplement posés sur le plateau du camion ou de la remorque sans «twist-locks», ou même sans câbles d’attachement. Mais on voit aussi des conteneurs circulant en ville en observant les mesures sécuritaires requises en utilisant surtout les «twist-locks» qui permettent à ces «très grosses caisses» de rester stables et de ne pas glisser lors d’un virage mal négocié. Une autre mesure prise par les transporteurs: la fixation des conteneurs par des câbles afin d’empêcher leur chute. Cela on le voit souvent, mais est-ce que cette mesure est efficace comme les twist-locks?
De graves accidents
Le soir du mercredi 4 décembre, un accident est survenu au boulevard Moulay Ismaïl, quartier des Roches Noires à Casablanca, quand un conteneur de vingt pieds s’est renversé et est allé écraser un véhicule en stationnent, heureusement sans occupants. Par bonheur, le camion qui transportait ce conteneur ne s’est pas renversé. Mais il y a eu une importante fuite d’huile, venant du conteneur, qui n’était en fait que la cargaison transportée. Il a fallu de grandes quantités de sable pour absorber la très large nappe d’huile qui s’étalait sur la chaussée; une mesure préventive pour éviter tout dérapage.
Cet accident n’a pas fait de morts mais, en fait, a créé une panique au sein des habitants de ce boulevard et bloqué la circulation. Les forces de sécurité se sont rendues sur le lieu. Finalement le conteneur a été évacué, laissant une voiture aplatie.
Un accident semblable s’est produit, il y a deux mois à Aïn Sebaâ, au km 7,5 à proximité de la chaîne de TV 2M. C’est un conteneur de 40 pieds qui s’est renversé et est allé s’immobiliser sur la chaussée. Il a bloqué toute la circulation pendant plus de deux heures et sa chute a causé une panique chez d’autres conducteurs qui tentaient avec acrobatie de passer en contournant la grosse caisse métallique.
Plusieurs mois auparavant, au moment de la réfection de la chaussée du boulevard Moulay Slimane, au niveau du quartier de Aïn Sebaâ, un autre conteneur mal fixé a quitté la plate-forme du poids lourd et est allé s’écraser sur la chaussée. L’accident a causé la mort d’une mère et de sa fille qui occupaient une voiture en stationnement sur ce même boulevard, quand le père était chez le buraliste. La chaussée, qui n’était pas encore totalement refaite, a été à l’origine de cet accident mortel.
En août 2012, emporté par son élan et le poids du conteneur qu’il transportait, un poids lourd a laissé derrière lui sa charge en passant sous un pont de Mohammedia. La cause en était, comme toujours, le glissement du conteneur (de 40 pieds) mal attaché. Ce dernier a glissé dangereusement sur la chaussée et a écrasé un homme conduisant une motocyclette. On a déploré un mort et des dégâts matériels. L’accident a provoqué la panique chez les passants et les autres conducteurs qui avaient frôlé la mort.
En 2007, quatre personnes dans une voiture ont péri à Tanger, suite à la chute d’un conteneur. Sans compter les autres accidents de conteneurs mal arrimés qui ont eu lieu dans d’autres villes et régions du pays. Chaque année, on comptabilise plus de vingt accidents de ce genre. On constate aussi que des camions citernes transportant des produits dangereux et combustibles ont des fuites et une partie de leur charge se perd sur la chaussée, ce qui provoque parfois des morts et des incendies qui nécessitent l’intervention des pompiers.
Absence de texte juridique
Ce genre d’accidents très fréquents provoque des dégâts corporels et matériels. «Il n’existe pas de texte juridique obligeant les camionneurs ou les sociétés de transport à équiper leurs camions de «twist-locks». Les textes en vigueur ne prévoient pas de normes de sécurité spécifiques pour ces camions, mais il y a des amendes que les professionnels du transport paient quand il s’agit d’une contravention», explique un transporteur. Et d’ajouter: «Les remorques ou les semi-remorques doivent être équipées par de twist-locks. Chaque professionnel doit veiller à ce que les conducteurs de camion fassent leur travail comme il le faut et il ne suffit pas de transporter les conteneurs vers leur destination ou d’expédier des marchandises. Il faudrait aussi travailler en respectant les règles pour éviter tous tracas. Il faut reconnaître qu’il y a des remorques tractées qui circulent avec des conteneurs sans attaches métalliques. On peut dire qu’il n’y a pratiquement pas de contrôle à ce niveau-là. Certains professionnels transportent parfois deux conteneurs sur un même plateau de camion, ce qui est illégal».
Les raisons de ces accidents
Le renversement des conteneurs n’est pas toujours dû au non-respect des règles de sécurité ou aux fautes commises par les conducteurs en cas d’excès de vitesse, ou même à cause de pannes techniques des véhicules, estiment les transporteurs. Ces derniers se plaignent de l’état lamentable des chaussées. «Les accidents ou les chutes des conteneurs sont également dus à l’état des routes et des chaussées qui sont parfois impraticables et dangereuses, ce qui est un réel problème», informe un autre transporteur. L’Etat des camions de transport de marchandises peut aussi être dangereux. Des véhicules dont l’âge est supérieur à 25 ans circulent toujours. Malgré leur vétusté, ils continuent de livrer et de transporter des marchandises. Les autorités concernées ferment les yeux sur de nombreuses transgressions», déplorent-ils.
Outre l’état du véhicule, il y a les violations de la loi commises par les conducteurs des camions dits TIR. «On (les employeurs) nous dit souvent de ne pas utiliser les câbles ou les twist-clocks quand nous transportons les conteneurs. Les patrons préfèrent que le conteneur chute, au lieu de perdre la remorque et de voir le conducteur tué», nous confie un machiniste de camion de poids lourd. Les principaux risques pour les conducteurs sont les accidents, aggravés par les horaires de travail prolongés. Les camionneurs doivent donc être très prudents et conscients des risques que leurs poids lourds présentent pour le public et l’environnement. «Ce qui prime chez les transporteurs, c’est de tirer profit de cette activité. Ces derniers ne recrutent plus de chauffeurs professionnels expérimentés. Ils préfèrent engager des chauffeurs débutants et bon marché. Ces derniers travaillent moyennant un salaire de 1.000 DH par semaine. Ce salaire modeste est compensé par un comportement de la part de ces chauffeurs que tout le monde connaît. Ces débutants ne respectent pas l’éthique du métier. La majorité d’entre eux sont des analphabètes ou ont un niveau d’instruction très modeste. On les voit conduire avec excès de vitesse et, quelquefois, ils ne font pas de pauses pour se reposer. Tout le monde sait que ce genre d’attitude entraîne des catastrophes routières», souligne le chauffeur.
«Un comportement digne d’un chauffeur professionnel expérimenté, devant respecter scrupuleusement le code de la route et travailler de façon consciencieuse, n’est pas toujours observé par la majorité des transporteurs ou des patrons de sociétés spécialisées dans le transport routier de marchandises. On n’accorde plus d’importance à la qualité des services présentés aux clients», révèle un transporteur.
Badia Dref
Connexion routière de la zone de Zénata Le réseau routier de Casablanca ne peut plus contenir tout le flux des véhicules venant chaque jour dans la capitale économique du pays. Le port de Casablanca supporte à lui seul 60% des échanges commerciaux du pays. Certes, les nouveaux projets de connexion routière favoriseront la pérennisation de la croissance et du dynamisme économique du Grand Casablanca et des régions avoisinantes. C’est pourquoi ces projets revêtent une dimension sociale et environnementale dans la mesure où ils vont contribuer à l’amélioration de la circulation urbaine en termes de fluidité du trafic, de prévention routière et de lutte contre la pollution et les nuisances sonores. |