L’Evénement | 21 Etats africains de la façade Atlantique en conclave au Maroc

C’est avec la participation de 21 pays africainsde la façade atlantique que s’est tenue la 1ère «Réunion ministérielle des Etats Africains Atlantiques» à Rabat, le 8 juin 2022. Un véritable événement pour le continent au vu des enjeux.

Ils étaient 21 Etats africains de la côte atlantique, dont une quinzaine représentés au niveau ministériel, à participer àcette 1ère réunion ministérielle des Etats Africains Atlantiques dont les travaux se sont articulés autour de trois thématiques: «Dialogue Politique, de Sécurité et de Sûreté», «Économie Bleue et Connectivité» et «Environnement et Énergie».

Mais au-delà des thèmes sur lesquels ils devaient se pencher, ce qui compte le plus, c’est l’importance d’un tel groupement qui réalise enfin qu’il peut avoir une vision commune, des intérêts communs et la possibilité d’une action commune.

Certes, ce regroupement avait déjà été ébauché, il y a quelques années. Dans «La Déclaration de Rabat» qui a sanctionné les travaux de cette 1ère réunion des Etats africains de l’Atlantique, les ministres ont rappelé que le projet d’une telle coopération avait été lancéen 2009 et consigné dans la Déclaration de Rabat du 4 août 2009, document fondateur du Processus Africain Atlantique.

En 2013, le Roi Mohammed VI avait appelé à «relancer les activités de la Conférence des Etats Africains Riverains de l’Atlantique et à lui permettre de jouer pleinement le rôle qui lui revient». Preuve que ce projet est cher au Maroc. Appel qui n’a pas été suivi.

Aujourd’hui, il s’agit d’un nouveau départ, dans un nouveau contexte et avec une nouvelle (et ferme) détermination.

Comme l’a longuement expliquéle ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, le processus né à Rabat en 2009 renaît aujourd’hui sous un nouveau jour, «mais avec un même horizon que celui que nous partageons, du Cap Spartel au Cap de Bonne Espérance». Et de rappeler l’importance stratégique de cet espace, avec 23 pays africains atlantiques, représentant 46% de la population africaine, concentrant 55% du PIB africain et dont les économies réalisent 57% du commerce continental.«Nos espaces maritimes recèlent d’énormes ressources biologiques et non-biologiques», a-t-il souligné. Ajoutant que l’Afrique atlantique est un espace de convoitises et de compétitions, qui fait face à des défis sécuritaires inédits, avec la montée en puissance des menaces asymétriques, de la criminalité transnationale, de l’insécurité maritime, de la piraterie, du terrorisme et du grand banditisme.

Insistant sur les dangers qui appellent une action commune, le ministre a indiqué que près de 90% des incidents maritimes, dont la piraterie, ont été enregistrés le long de la façade atlantique continentale, estimant que «notre continent qui souffre de 48% des victimes du terrorisme dans le monde voit la menace terroriste s’implanter le long des côtes atlantiques. N. Bourita a également évoqué la criminalité transnationale, qui est à la fois une cause et une conséquence du faible maillage sécuritaire, de la faiblesse de la présence étatique, de la porosité frontalière et de l’instabilité politique et institutionnelle. Puis il a cité les records en termes de vulnérabilité climatique qu’enregistre l’Afrique atlantique, notant que la littoralisation de nos activités exacerbe les enjeux environnementaux, avec des conséquences majeures sur la sécurité alimentaire et les déplacements, dont près de 1,4 millions de déplacés internes pour la seule région d’Afrique de l’Ouest. Autre défi, le réchauffement climatique qui mène à une montée annuelle des eaux atlantiques africaines, impactant directement les activités économiques et la vie côtière.

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N.Bouritaa rappelé à cet effet que le développement d’un système d’alerte climatique précoce permettrait, selon le Fond Monétaire International, de réduire le risque alimentaire de 30% sur le continent, notamment sa côte atlantique. Enfin, le ministre a déploré que les pays africains atlantiques ne reçoivent que 4% des flux d’IDE (investissements directs étrangers) contre 74% pour les pays de la rive Nord et ce, malgré le potentiel économique croissant de l’Afrique Atlantique. «Nous nous condamnons à ne pas récolter le potentiel de notre espace, si nous ne mobilisons pas son potentiel de coopération. Car, il ne suffit pas d’avoir l’Atlantique en partage. Il s’agit aussi de partager une perspective, une vision et des actions», a conclu le ministre, insistant sur le fait qu’il faut avoir une identité stratégique et agir collectivement, pour répondre aux impératifs de sécurité, de développement durable et de prospérité dans cette zone.

Cette 1ère réunion constitue ainsi une occasion de concevoir une vision africaine commune sur cet espace vital, de promouvoir une identité atlantique africaine et de défendre d’une seule voix les intérêts stratégiques du Continent.

La Déclaration de Rabat du 8 juin 2022

Conscients du nouveau contexte, les ministres des Etats africains atlantiques ont conclu leurs travaux en s’accordant sur l’importance d’optimiser l’espace Africain Atlantique et d’avoir une gestion davantage concertée et coordonnée. Dans «La Déclaration de Rabat» adoptée au terme de leur travaux, ils ont exprimé leur plein soutien à la Conférence des États africains atlantiques en tant que cadre approprié pour capitaliser sur les opportunités mutuellement avantageuses de coopération, y compris avec les mécanismes régionaux, sous-régionaux et inter-régionaux existants, dans le but de générer des synergies et de produire des réponses efficaces et proactives aux défis de cet espace partagé.

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Ils ont souligné la nécessité d’agir collectivement à travers une coordination des actions sur un ensemble de thématiques stratégiques et de secteurs structurants, en vue de répondre aux impératifs de sécurité, de développement durable et de prospérité de cette zone commune.

Ils se sont engagés à poursuivre leurs échanges de coopération et de coordination appelant à un dialogue politique et de sécurité axé autour des thématiques de lutte contre le terrorisme, contre la criminalité transnationale organisée dans toutes ses formes, la piraterie maritime, le trafic des migrants et les prises d’otage en mer. Ils ont également appelé à des échanges approfondis pour saisir les opportunités dans les secteurs de l’économie bleue, de la connectivité maritime, et de l’énergie, ainsi qu’à des concertations continues pour relever les défis environnementaux.

Et des décisions concrètes…

Pour ce faire, les ministres des Etats africains atlantiques ont décidé d’établir trois groupes thématiques, chargés du dialogue politique et de sécurité, de l’économie bleue, de la connectivité maritime et de l’énergie, et du développement durable et de l’environnement. Dans ce sens, trois chefs de file ont été désignés pour diriger les 3 groupes thématiques, respectivement : le Nigeria, le Gabon et le Cap Vert.

Ils ont également décidé de réactiver le Secrétariat Permanent de la Conférence, basé à Rabat, chargé de coordonner les actions et de préparer les réunions et acté que ce Secrétariat Permanent agira également comme une plateforme d’échange sur les défis et les opportunités dans l’espace Africain Atlantique.

Ils ont enfin décidé d’instituer le processus africain atlantique de Rabat pour le renforcement de la coopération entre les États et appelé à renforcer la coopération transatlantique avec les États Riverains de l’Atlantique, notamment avec les pays de l’Amérique latine.

Saluant la Vision de Sa Majesté le Roi Mohammed VI qui consiste à faire de l’espace africain atlantique, un cadre de coopération interafricaine pragmatique et opportune, ainsi que l’engagement du Souverain à réactiver ce cadre géostratégique de concertation entre les pays africains atlantiques, les ministres ont décidé de tenir leur prochaine réunion au Maroc.

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