L’Egypte a fait un pas de plus vers une intervention militaire en Libye, au risque d’un affrontement avec des éléments turcs. Alors que sont déjà impliqués dans le bourbier libyen, à divers degrés, l’ONU, la Russie, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l’Union européenne, avec la France en première ligne.
Le Caire s’est fait plus explicite encore, avec un vote à l’unanimité du Parlement donnant autorisation au président Abdel Fattah Al Sissi de lancer une intervention militaire. Le Président avait demandé la veille aux soldats égyptiens de se «tenir prêts» au cas où les forces du GNA se rapprochaient de Syrte, qui ouvre l’accès aux gisements pétroliers libyens.
Le risque d’un affrontement direct entre l’Egypte et la Turquie reste faible, tant les deux pays auraient à y perdre, en raison de leur situation respective délicate sur le plan économique, financier et social. Mais un conflit n’est plus du domaine de la science fiction au vu des déclarations récentes et des intérêts en jeu. Le Caire et Ankara entretiennent en outre des relations tendues depuis la destitution, en 2013, du Président islamiste Mohammed Morsi, issu de la confrérie des Frères Musulmans soutenue par le président turc, Recep Tayyip Erdogan. Paris, Berlin et Rome ont demandé la fin de toutes les ingérences étrangères en Libye et le plein respect de l’embargo sur les armes établi par le Conseil de sécurité des Nations unies.
Une déclaration adressée à la Turquie, qui viole régulièrement cet embargo et exporte, en outre, en Libye, des combattants syriens issus des rangs de Daesh, dont les services de renseignement français estiment le nombre à plusieurs milliers. Les militaires français craignent que les mercenaires islamistes payés par Istanbul en Libye se dispersent dans la durée au Sahel, que l’armée française tente depuis 2013 de stabiliser. La Turquie accuse de son côté la France de soutenir en sous main le «putschiste» Haftar et appelle toutes les parties à soutenir le GNA contre la LNA.
Patrice Zehr