Loi de Finance 2018 : Boussaid Comme Macron… ou presque

Loi de Finance 2018 : Boussaid Comme Macron… ou presque

Pour beaucoup d’analystes et d’observateurs, le gouvernement aurait été très clément avec les entreprises, lors de l’élaboration du projet de loi de Finance de 2018. Boussaid aurait ainsi, dans un élan d’encouragement et d’incitation, privilégié, voire choyé l’entreprise…

Boussaid fait ainsi du «Macron», en ce sens qu’il sort une loi de finances avec beaucoup de largesse vis-à-vis du secteur privé et de l’entreprise en particulier. Le raisonnement consiste à soutenir que favoriser les entreprises, c’est préserver, voire booster la création d’emploi. Et là, c’est du pur Macron…

Le projet, en discussion aujourd’hui au Parlement, est par ailleurs très contesté au motif qu’il n’apporte rien de nouveau et qu’il ne s’agit que de mesures en deçà des attentes et des grandes aspirations de la population. Dans le concret et mis à part cette main forte prêtée aux entreprises et au secteur privé, il n’y a vraiment pas «de quoi faire un feu», estime-t-on déjà du côté du Parlement…

Mais, loin d’une vision un peu étroite des choses et au-delà de cette comparaison trop limitative des visées de cette loi de Finances, il faut dire que le gouvernement a travaillé à trouver des solutions aux grands «maux» du Maroc d’aujourd’hui. Peut-être avec des insuffisances, mais il y a quand même un effort déployé qui traduit une volonté d’aller de l’avant dans certains secteur vitaux.

Il est vrai que, quand le ministre parle d’une augmentation du budget de l’enseignement de 5 MMDH, pour le ramener à 59.286 milliards pour 2018 (54.407 MMDH en 2017), cela paraît insuffisant pour mettre en œuvre une réforme tant espérée de l’Enseignement. Et c’est pire pour un autre secteur tout aussi important qui est la Santé qui n’a vu son budget avancer que d’un «petit» demi-milliard, passant de 14.295 MMDH en 2017 à 14.790 milliards pour 2018. Il va de soi pour la création des postes budgétaires où l’on remarque que les postes à créer dans l’enseignement (20.000) quintuplent ceux à pourvoir dans la Santé (4.000). Des nombres jugés insuffisants pour une réelle relance des deux secteurs…

Côté hypothèses, le projet table sur un taux de croissance de 3,2%, un taux de déficit budgétaire contenu à -3% du PIB, un cours moyen du gaz butane de 380 $/tonne, un cours du pétrole de 60 $/bbl, un taux d’inflation à 1,5% et une production céréalière de 70 Mqx. Compte tenu de facteurs tant endogènes qu’exogènes, ces paramètres risquent de s’avérer incorrects, ce qui entraverait l’exécution de ce budget.

Depuis début septembre, le pétrole connaît un trend haussier. Au 1er novembre, il est déjà à 55,01 $ et le Brent à plus des 60$ (61,53 $). Le trend haussier est, selon les experts, loin d’être fini, ce qui risque fatalement de fausser les calculs. Sur le plan de la production céréalière, elle aussi en baisse passant de 103 Mqx en 2016 à 90 Mqx en 2017. Les 70 Mqx, compte tenu de la dépendance de la pluviométrie et l’annonce d’une saison relativement sèche, semblent relativement exagérés, ce qui peut engendrer un manque à gagner…

Le gouvernement examine la possibilité de subventionner certains produits

Ces prévisions semblent cependant basées sur celles de la Banque mondiale qui prévoit, à cet effet, une hausse du stock du blé du Maroc pour atteindre 5,2 millions de tonnes au titre de la campagne agricole 2017-2018, contre 4,5 millions de tonnes pour l’actuelle campagne et 6,9 millions de tonnes en 2015-2016.

Au-delà de toutes ces remarques, Boussaid défend ce projet qu’il trouve équilibré et adéquat, vu la conjoncture tant à l’échelon national qu’à l’échelon international. Le ministre insiste sur la portée sociale de «son» PLF.

Ce que préconise le gouvernement au juste…

Pour revenir à la similitude avec ce que veut Macron en France, en ce sens de prêter main forte à l’entreprise privée, le PLF 2018 vise, par cette action, à redynamiser l’investissement privé, accompagner l’entreprise nationale, afin de l’encourager à créer des opportunités d’emplois pour les jeunes et continuer de soutenir les investissements publics dans la même finalité. L’Etat, à lui seul, n’est plus en mesure de résorber le chômage. Il a fallu penser à soutenir le privé pour dynamiser l’emploi. L’augmentation des investissements publics dans le cadre de la loi de Finances et l’adoption de mesures destinées à promouvoir l’investissement privé, visent surtout à rétablir la confiance des investisseurs et à encourager les entreprises à créer des opportunités d’emploi pour les jeunes, martèle Boussaid. Bien entendu, le secteur privé «profitera» d’incitations fiscales, notamment la décision de reconduction, en 2018, de l’opération de l’exemption des pénalités de retards de paiement des impôts d’avant 2015. Une opération menée dans ce sens en 2013 avait réussi. Aujourd’hui, avec l’évolution que connaissent la DGI et la TGR, cette opération est relancée pour permettre aux petits porteurs qui ont un cumule de payer leurs arriérés mais, note Boussaid, «avec une touche de nouveauté en ce sens que le paiement se fera en 2 tranches de 50%. Une en 2018 et une autre jusqu’en 2019».
Là où le PLF 2018 s’éloigne, voire même se différencie de ce qui se passe en France, c’est qu’il est, avant tout, un projet volontariste et à forte vocation sociale qui accorde la priorité à la création de l’emploi et au soutien et à l’encouragement de l’investissement privé.

Le PLF 2018 s’articule autour de quatre axes s’érigeant en priorités absolues pour le gouvernement, à savoir: l’appui des secteurs sociaux, l’enseignement, la santé, l’emploi et la réduction des disparités spatiales, avec un intérêt particulier au monde rural; le développement de l’industrialisation, l’incitation à l’investissement privé et le soutien aux PME; la consécration de la régionalisation avancée pour qu’elle constitue un levier de développement; et l’amélioration de la gouvernance et l’accélération du rythme de la mise en œuvre des réformes lancées, outre la poursuite de la réforme de l’administration,

Sur un autre volet, le PLF accorde un intérêt particulier à l’extension et à la consolidation des différents programmes et actions sociaux (INDH, RAMED, Tayssir, l’Initiative royale un million de cartables, etc.), dont les bénéficiaires sont des populations pauvres et vulnérables.
Dans ce contexte, une enveloppe d’environ 130 MMDH sera accordée aux secteurs sociaux, soit 50% du budget général du projet qui vise à répondre aux besoins et aux aspirations des citoyens, notamment en ce qui concerne les services sociaux; et à renforcer la confiance dans l’économie nationale.
Pour promouvoir l’emploi des jeunes, plusieurs mesures visent à soutenir la dynamique de l’«auto-entrepreneur» (50.000 auto-entrepreneurs ont été enregistrés à fin août 2017), la réduction de l’IS et de l’IR suite à la prise de participation dans le capital des jeunes entreprises innovantes en nouvelles technologie et l’amélioration de l’attractivité du dispositif «Tahfiz».
Les investissements publics étant la locomotive du développement, leur montant global de atteindra en 2018 près de 195 MMDH, en hausse de 5 MMDH par rapport à 2017. Il reste cependant très important d’évaluer préalablement les projets, d’assurer un suivi rigoureux des réalisations et l’accroissement des retombées sur l’emploi et l’amélioration des conditions de vie des citoyens.
D’autres mesures seront prises pour encourager l’investissement privé. Il s’agit notamment de l’extension du bénéficie des avantages de l’exportation au matériel importé dans le cadre de conventions d’investissement signées avec le gouvernement ou de projets financés au moyen d’une aide financière non remboursable; de l’exonération en matière de droits d’enregistrement des actes constatant les opérations de constitution et d’augmentation de capital des sociétés ou des groupements d’intérêt économique; et de la dynamisation du secteur touristique à travers l’exonération des droits d’enregistrement des terrains nus destinés à la construction des établissements hôteliers, selon des conditions définies.
Pour ce qui est de l’accélération de la mise en œuvre du chantier de la régionalisation avancée, il est prévu, dans le cadre du PLF 2018, une augmentation de la part de l’IR et de l’IR affecté aux régions de 3% à 4%, l’adoption des textes d’application de la loi organique relative aux régions (66 textes adoptés sur 69) et l’accélération de la déconcentration administrative.
La consolidation et l’accélération des réformes engagées dans le Royaume est aussi un axe très présent dans le PLF 2018. Il s’agit de la réforme de la justice, de l’administration, de la loi organique relative à la loi de Finances, l’amélioration de la gouvernance des établissements et entreprises publics, la réforme fiscale et la 2ème phase de la réforme de la retraite.

Réaction au discours royal d’ouverture du Parlement (11 octobre 2013)

En somme, Si Boussaid se défend en notant que le PLF 2018 est un projet qui a de grandes visées et de grandes ambitions et est tourné vers le social et que certaines mesures qui y sont comprises sont loin d’être un «cadeau» à l’égard de quiconque… Cela traduit un élan de pragmatisme et de réalisme qui a quand même marqué l’élaboration de ce projet qui, d’emblée ne fait pas l’unanimité et qui fera encore parler de lui, en attendant son adoption ou non par les deux Chambres du Parlement, car déjà jugé, comme les projets des années précédentes ou presque, quand le gouvernement le juge plutôt équilibré, adéquat et «parfait» ou… presque.

Hamid Dades

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