Maroc : Le précieux trésor

Qui ignore encore la fable de Jean de la Fontaine «Le laboureur et ses enfants» ? Ce laboureur qui, «sentant sa mort prochaine, Fit venir ses enfants, leur parla sans témoins»… A l’école, les enfants l’apprennent par cœur. Elle a fait l’objet d’innombrables traductions et les contes populaires la reproduisent aux quatre coins du monde.

Dans cette fable, le laboureur, juste avant de mourir, dit donc à ses enfants: «Gardez-vous de vendre l’héritage que nous ont laissé nos parents. Un trésor est caché dedans (…) Remuez votre champ dès qu’on aura fait l’oût. Creusez, fouillez, bêchez ; ne laissez nulle place où la main ne passe et repasse». L’immortel J. de la Fontaine poursuit: «Le père mort, les fils vous retournent le champ, deçà, delà, partout… Si bien qu’au bout de l’an, il en rapporta davantage».
Les Marocains se sont toujours plaints de ce que leur pays dépende quasi-totalement de l’agriculture qui dépend à son tour quasi-totalement de la pluviométrie. Ce qui livre le pays et sa croissance aux aléas climatiques. Voyant qu’année après année, c’est la croissance du PIB agricole qui détermine la croissance globale du pays, les différents gouvernements qui se sont succédé ont tenté de tourner l’économie nationale vers l’industrie, plus budgétivore, certes, mais considérée comme plus sûrement rentable…
Le Maroc y a davantage pensé lorsque ses produits agricoles, qui constituaient une bonne part de ses exportations (et devaient donc assurer une bonne part de ses recettes en devises), ont commencé à être sérieusement concurrencés par ses partenaires commerciaux eux-mêmes (on en vit actuellement un épisode crucial avec la récente révision unilatérale, par l’Europe, des accords qui touchent la tomate…).
Sous le règne Mohammed VI, une nouvelle stratégie est donc adoptée, celle des MMM (métiers mondiaux du Maroc). Elle consiste à identifier les métiers où le Maroc peut être compétitif et à en assurer l’émergence industrielle. Cela a permis un développement des secteurs de l’automobile (Renault à Tanger), de l’aéronautique (Bombardier à Casablanca), de la pharmacie… Stratégie qui, d’ailleurs, vient de recevoir un coup de neuf avec le plan «d’accélération industrielle 2014-2020» de Mouay Hafid El Alami (actuel ministre de l’industrie et du commerce) et les 14 conventions public-privé signées, à l’occasion, devant le Roi et visant à en assurer la mise en oeuvre.
Mais, parallèlement à ce souci d’affranchir le PIB de sa dépendance des aléas du climat par le biais de l’industrialisation, la réflexion sur l’agriculture a aussi, de son côté, fondamentalement changé.
La fable de J. de la Fontaine est remontée à la surface et «la recherche du trésor légué par les ancêtres» a commencé. L’idée est que, aléas climatiques ou pas, le secteur de l’agriculture peut également évoluer et améliorer son propre PIB. C’est ce qui a conduit au lancement du Plan Maroc Vert (PMV), en 2008. Il s’agit d’une nouvelle stratégie de développement agricole qui concerne les secteurs de l’agriculture et de l’agro-industrie. Avec ses deux piliers -l’agriculture à forte valeur ajoutée et l’agriculture solidaire- le PMV a permis au Maroc d’accéder au positionnement qui est le sien aujourd’hui. La croissance agricole a atteint 7,6% cette année. Et la 7ème édition des assises de l’agriculture qui s’est tenue à Meknès, ce 23 avril, de même que le SIAM (Salon international de l’agriculture) qui a ouvert ses portes le lendemain -pour une semaine- ont constitué une vraie consécration pour le Royaume.
Consécration et honneurs. Les assises ont été organisées en partenariat avec la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) dont le directeur général, José Graziano Da Silva, a fait le déplacement à Meknès. Il y a signé un partenariat entre le Maroc et la FAO, portant sur la coopération Sud-Sud en faveur du continent africain (un Fonds fiduciaire de 1 million de dollars qui sera administré par la FAO et alimenté par des dons annuels échelonnés de 2014 à 2020, provenant du gouvernement et du secteur privé marocains). Et il y a félicité le Maroc d’avoir réalisé les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), deux ans à l’avance, lui promettant un prix pour cela, en juin prochain.
A cette 7ème édition des assises de l’agriculture, ont également assisté deux chefs d’Etat -Alpha Condé, de Guinée et Ibrahim Boubabakar Keita, du Mali- dont les pays souhaiteraient s’inspirer du PMV, de même que les ministres de l’agriculture espagnol, français, saoudien, malien et ivoirien (excusez du peu !).
Le thème de cette année étant l’agriculture familiale, tout ce beau monde se penchera sur les petits agriculteurs et les produits du terroir. Quelques conventions ont été signées pour appuyer ce pilier-là du PMV (pilier agriculture solidaire). Enfin, les petites mains au cœur d’une grande stratégie ! Une attention bien méritée et dont il faut espérer qu’elle dure et soit efficace, car ce sont ces petites mains qui, par leur labeur, révèlent le «précieux trésor» de tout le pays. De plus, comme le soutenait, il y a plusieurs années Edgard Pisani (Un vieil homme et la terre), l’on gagne mieux à associer les intéressés.

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