En 2015, le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) avait donné son avis sur la réforme des retraites. La Cour des comptes en avait fait de même en émettant un certain nombre de réserves à ce sujet.
Malgré qu’elles soient restées lettre morte, ces recommandations tendaient toutes vers la garantie de la pérennité des Caisses des retraites en préservant les acquis et droits des fonctionnaires et travailleurs marocains. Quelles ont été ces recommandations et pourquoi n’ont-elles pas été prises en compte par la primature?
Pour une réforme globale et profonde
Le CESE a d’abord estimé que la réforme des retraites n’était possible qu’à travers une approche globale. Selon le Conseil, il fallait mettre en place un régime des retraites à deux pôles, un pour le secteur public et un autre pour le privé.
Concernant l’augmentation de l’âge de départ à la retraite, le CESE a recommandé une prolongation volontaire et non obligatoire de la durée de service dans les administrations. S’agissant de l’augmentation de la cotisation des fonctionnaires, il a appelé à la préservation des acquis et droits sociaux et économiques des travailleurs marocains. Cependant, à la lecture des textes de loi réformant les retraites, il semble que l’Exécutif n’a pas pris en compte les propositions du CESE à ce sujet.
Non aux mesures de colmatage!
Le CESE n’est pas le seul à voir la réforme des retraites d’un œil sceptique. La Cour des comptes a elle aussi émis plusieurs réserves à ce sujet. Selon cet organe de contrôle, la réforme menée par l’Exécutif pour éviter la faillite des régimes de retraites est insuffisante et ne fait que retarder la crise. La Cour des comptes justifie ce scepticisme par le fait que l’approche paramétrique dans le traitement de ce dossier urgent ne permettra en aucun cas de juguler le déficit des Caisses, surtout au niveau de la CMR.
Les cris à l’injustice se multiplient
Face à cette situation, les syndicalistes ont décidé de monter au créneau. Ainsi, la Coordination nationale contre la réforme des retraites (CNARR) a organisé un sit-in de protestation devant le Parlement. Les manifestants ont scandé des slogans hostiles au gouvernement de Benkirane. Ils ont fait savoir que le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite, bien que progressivement, est inacceptable. De leur côté, les membres de l’Union nationale des administrateurs marocains (UNAM) ont exigé «le retrait immédiat des textes de loi relatifs à la réforme des retraites» votés au Parlement. Des coordinations locales, notamment dans la région de Taourirt, ont appelé une nouvelle fois à l’annulation des retraites des ministres et des parlementaires, au lieu de donner le coup de grâce aux fonctionnaires et travailleurs marocains.
Les nouvelles mesures apportées par les textes de loi sur la retraite entreront en vigueur progressivement dès la fin de septembre 2016. Bien qu’elles ne soient pas du goût des fonctionnaires, ces mesures sont nécessaires, selon le gouvernement. De l’avis des analystes politiques et des syndicalistes, le parti au pouvoir fera l’objet d’un vote sanction de la part des électeurs directement touchés par cette réforme.
Mohcine Lourhzal
Selon la Cour des comptes, la réforme des retraites dans le secteur public ne fera que masquer le déficit de la CMR. Ce dernier dépasserait 4,1 MMDH en 2021. Pour éviter ce scénario catastrophe, la Cour présidée par Driss Jettou recommande une réforme en profondeur des régimes des retraites au Maroc dans les secteurs public que privé.