Maroc-Suède-Sahara : La Gifle

Sit in maroc devant ambassade de suede

Les Marocains sont quelque peu désorientés face au flot d’informations qui leur parviennent, concernant ce «projet» du gouvernement suédois de reconnaître la «république» du Polisario.
Ils ont appris, avec stupéfaction, que ce n’est pas sur un coup de tête que la Suède agit aujourd’hui, mais qu’elle était, depuis des années, le pays européen le plus hostile aux intérêts du Maroc.

En quelques jours, ils ont eu une avalanche de détails concernant cette hostilité qui se traduisait sur les plans diplomatique, économique et politique.
Ils ont donné libre court à leur colère, sur les réseaux sociaux et sur le macadam, lors de la gigantesque manifestation organisée dimanche 4 octobre, devant l’ambassade de Suède au Maroc.
Aujourd’hui, ils se demandent où ils en sont vraiment avec le gouvernement social-démocrate suédois ?
Suite à la visite à Stockholm d’une délégation de partis de gauche, la tendance serait à l’apaisement.
Les déclarations des responsables suédois, bien que souvent en demi-teinte, semblent accréditer cette tendance.
En Suède, c’est le gouvernement et non le parlement qui a compétence pour reconnaît les éventuels Etats et le gouvernement suédois dit n’avoir pas de projet dans ce sens «pour le moment».
C’est un camouflet pour les séparatistes, eux qui pensaient lancer une offensive d’envergure dans les pays scandinaves, en commençant par ouvrir une brèche en Suède où le terrain leur était favorable.
Le dossier est-il clos pour autant ? Certainement pas.
Il reste la gifle magistrale…

Il y a un dicton populaire au Maroc qui dit: «Kebberha tsghar», ce que l’on pourrait traduire par: si tu veux qu’une affaire reprenne une dimension normale, donne-lui une grande ampleur.
Jusque-là, le Maroc fermait plus ou moins les yeux sur les décisions et actes de la Suède, de plus en plus nombreux, exprimant un soutien de ce pays aux séparatistes du Polisario.
Les Marocains viennent de l’apprendre, la Suède ne se contentait pas d’un soutien diplomatique –déjà différent de celui des autres pays de l’Union européennes, puisqu’elle était la seule à demander chaque année, par écrit, au Conseil de Sécurité, d’élargir les pouvoirs de la Minurso au contrôle des droits de l’homme au Sahara- mais qu’elle passait aussi à l’acte.
Sur le plan économique, acquise aux thèses séparatistes, elle refusait que les entreprises suédoises traitent avec le Maroc au Sahara, allant jusqu’à se retirer de leur capital, ou à les traduire en justice, si elles le faisaient.
Tout ceci, le Maroc le savait, mais ne réagissait pas, tant que le gouvernement suédois restait dans ces limites-là.
Or, cette année 2015, c’est un nouveau contexte qui se profile.
D’abord, l’arrivée au pouvoir des partis entièrement pro-Polisario et résolument hostiles au Maroc: les socio-démocrates et les verts.
Ce sont eux qui avaient fait adopter par le Parlement suédois, en décembre 2012, une proposition de loi tendant à reconnaître l’entité séparatiste du Polisario. La reconnaissance par l’Etat suédois n’avait pas eu lieu parce qu’elle avait été bloquée par le gouvernement de l’époque.
Arrivés au pouvoir (2014), les socio-démocrates et les verts ont désormais les pleins pouvoirs pour le faire puisque, en Suède, la reconnaissance des Etats relève des attributions du gouvernement.
Par ailleurs, le Polisario et l’Algérie, qui n’avaient pas encore vraiment utilisé cette carte, ont décidé d’engager une offensive d’envergure ciblant les pays scandinaves et nordiques en général. Selon des informations dignes de foi, le ministère des Affaires étrangères algérien aurait alloué un budget de 10 millions d’euros à cette stratégie (d’où, par exemple, l’envoi le 2 octobre dernier, à Oslo (Norvège), d’une délégation de séparatistes dirigée par le coordinateur du Polisario avec la Minurso, M’Hamed Khadad).
Le Maroc ne pouvait rester les bras croisés.
Aussi, dès l’intention des socio-démocrates suédois de remettre sur le feu la question du Sahara annoncée, le Maroc est sorti de son apparente indifférence, passant lui aussi à l’offensive.
L’ambassade de Suède au Maroc (dont l’ambassadrice venait, le 17 septembre, d’être reçue par le Roi Mohammed VI, pour être accréditée à son poste, ainsi d’ailleurs que les ambassadeurs de Norvège et de Finlande) a confirmé cette intention. «Le gouvernement suédois procède actuellement à une analyse interne de la politique de la Suède sur le Sahara occidental, à la lumière de l’intérêt porté pour cette question au sein de la société suédoise», a-t-elle indiqué dans un communiqué adressé à la presse, ajoutant toutefois que: «la Suède n’a pas reconnu le Sahara occidental comme un Etat».
En conjugaison, le participe passé (n’a pas reconnu) n’est pas le futur (ne reconnaîtra pas), ni même le présent (ne reconnaît pas). Rien dans le communiqué ne rassurait vraiment le Maroc.

Griefs et mises en garde

Saisissant l’occasion de rencontres avec son homologue, la ministre des Affaires étrangères et de la Coopération suédoise, à New York, en marge des travaux de l’Assemblée Générale des Nations Unies, Salaheddine Mezouar lui a fait part de «la ferme condamnation et de la grande inquiétude du Maroc à l’égard des développements dangereux de la politique et de la position suédoises négatives à l’égard de la question du Sahara marocain».
De son côté, au sortir du Conseil de gouvernement, le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi, a détaillé les griefs retenus par le Maroc contre la Suède. Tentatives de reconnaitre la «république» auto-proclamée du Polisario ; campagnes régulières en Suède visant à boycotter les produits marocains originaires du Sahara ; présentation à la justice des entreprises suédoises qui ne respectent pas la politique suédoise ; boycott des entreprises marocaines, boycott des sociétés étrangères qui ont des liens avec le Maroc et qui opèrent au Sahara ; campagnes contre certains accords entre l’UE et le Maroc ; mobilisation d’autres pays pour qu’ils adoptent la même position ; soutien à des ONG internationales et marocaines afin qu’elles adhèrent à ces politiques… La liste est longue.
Aussi, a annoncé M. El Khalfi, à la lumière de cette situation qui dure depuis plusieurs années, le temps est venu de prendre «une décision claire et ferme» à l’égard de la position hostile de la Suède. Et de préciser: «le Maroc réfléchit, de manière sérieuse, à prendre des mesures similaires à l’égard de la Suède, conformément au principe de la réciprocité». D’autant que les échanges commerciaux avec la Suède sont largement déficitaires pour le Maroc, les exportations suédoises vers le Maroc étant près de sept fois supérieures aux exportations marocaines à destination de la Suède.
Dans les propos d’El Khalfi, tout est au conditionnel. Aucune décision n’est présentée comme définitivement arrêtée. Aucune date n’est avancée pour un quelconque boycott effectif des entreprises et produits suédois, ou pour quelque mesure de rétorsion économique que ce soit.
Néanmoins, coïncidence ou non, l’enseigne suédoise IKEA, qui devait ouvrir ses magasins casablancais, a vu son inauguration suspendue par décision des autorités de Casablanca pour documents administratifs manquants, dont le certificat de conformité.

Le Roi au Parlement | Sahara et diplomatie partisane et parlementaire au cœur de la rentrée politique

Trois partis font leurs valises pour Oslo

La réaction du Maroc a également emprunté la voie de la diplomatie parallèle.
La gauche étant au pouvoir en Suède, trois partis marocains de gauche ont pris rendez-vous à Stockholm: le PSU (Parti socialiste unifié), l’USFP (Union socialiste des forces populaires) et le PPS (Parti du progrès et du socialisme).
La délégation, présidée par la Secrétaire générale du PSU, Nabila Mounib, a eu plusieurs rencontres avec des think tanks, y compris pro-Polisario, avec la Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, la Commission des AE et la vice-présidente du parlement suédois.
Selon ce qu’ont rapporté les membres de la délégation marocaine, les responsables suédois affirment n’avoir pris aucune décision relative à la reconnaissance du Sahara en tant qu’entité indépendante et jouent l’apaisement.
Les déclarations de ces responsables vont du reste dans ce sens.
Interrogé par le quotidien suédois à grand tirage, Expressen, le 4 octobre, à propos de la reconnaissance de la «république» du Polisario, le Chef du gouvernement social-démocrate, Stefan Löfven, a répondu: «nous n’avons pas pris une telle décision».
De même, la ministre suédoise des Affaires étrangères, Margot Wallström,
a affirmé que «les conditions ne sont pas réunies pour la reconnaissance pour le moment».
Le président de la Commission des Affaires étrangères au parlement suédois, Kenneth G. Forslund, qui est membre du Parti Social-démocrate au pouvoir, a déclaré à son tour que la Suède «n’est pas pour le moment sur le point de prendre une position dans une direction ou une autre», concernant la question du Sahara.

Ces sit-in et manifs que la Suède ne comprend pas

Cela a été dit aux membres de la délégation marocaine qui s’est déplacée à Stockholm, le gouvernement suédois ne comprend pas l’organisation de sit-in et manifestations au Maroc et en Suède. Selon Nabila Mounib, chef de la délégation, ils préféreraient l’ouverture d’un dialogue.
En effet, le sit-in organisé dimanche 4 octobre devant l’ambassade de Suède à Rabat était impressionnant.
Des milliers de manifestants, venus de toutes les villes du Maroc, de Tanger à Lagouira, ont défilé avant de s’arrêter devant l’ambassade pour scander des slogans dénonçant la partialité de la Suède dans l’affaire du Sahara et appelant Oslo à ne pas attenter à l’intégrité territoriale du Maroc.
De plus, un autre sit-in est prévu, samedi 10 octobre, en Suède-même, devant le Riksdag (Parlement suédois). Plusieurs ONG et acteurs associatifs marocains établis dans les pays nordiques y ont appelé et entendent l’organiser, y compris dans le cas où les autorités suédoises l’interdiraient.

Camouflet et gifle magistrale

Les gestes d’apaisement et appels au dialogue des responsables suédois en direction du Maroc sont autant de camouflets pour le Polisario et l’Algérie qui étaient loin de s’attendre à la tournure que prennent les choses.
En effet, cette affaire a non seulement entravé les visées des séparatistes en Suède –même si rien n’est définitivement acquis pour le Maroc- mais également dans les autres pays nordiques.
L’attachement au processus onusien a été rappelé par tous. Y compris par l’UE, en la personne de la vice-présidente de la Commission européenne et Haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Fedredica Mogherini, qui a dit: «l’UE encourage les parties à rechercher une solution négociée au conflit et soutient le processus onusien». Ajoutant, en réponse à un eurodéputé, le 6 octobre, que l’UE soutient les efforts du Secrétaire général de l’ONU pour parvenir à une «solution politique juste, durable et mutuellement acceptable» (formule reprise systématiquement par toutes les résolutions du Conseil de Sécurité de ces dernières années).
Il est peu probable qu’après tout cela, un dialogue sérieux et constructif ne soit pas engagé entre le Maroc et la Suède. Comme il est peu probable que le Maroc ne saisisse pas cette occasion pour entamer plus généralement un travail de sensibilisation auprès des pays nordiques.
Cela ne veut pas dire que la tâche sera facile, mais le Maroc a de nombreuses cartes crédibles en main et la realpolitik finit toujours par l’emporter. Il n’est que de voir ce que sont devenues les relations du Maroc avec l’Espagne. Aussi bien l’Espagne du PSOE que celle du Parti populaire. Ce dernier parti était récemment des plus hostiles au Maroc. Pourtant, c’est sous son mandat que l’Espagne a obtenu l’appui du Maroc (et de tous les amis mobilisés par le Maroc) pour devenir membre du Conseil de Sécurité… Ce que souhaite aujourd’hui la Suède…
Si «grâce» aux manœuvres des séparatistes, le Maroc élevait ses relations avec les pays nordiques à un niveau supérieur, ce sera alors la gifle magistrale !

Madagascar se félicite de l’ouverture prochaine de son Ambassade à Rabat

BA

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Flashs

Sit in devant l’ambassade de Suède
Des dizaines de milliers de Marocains ont observé, dimanche 4 octobre, un sit-in devant l’ambassade de Suède à Rabat pour protester contre la position du gouvernement de Stockholm concernant la question de l’intégrité territoriale du Maroc.
Les participants, venus des quatre coins du Maroc, appartenant à des organisations de la société civile et des droits de l’Homme, ainsi qu’à des partis politiques, ont scandé des slogans comme : «Oui aux relations maroco-suédoises. Non à l’atteinte à notre intégrité territoriale», «Ne touche pas à mon pays» et «Le Sahara est marocain et restera marocain jusqu’à la fin des temps».

Le Polisario en Norvège
Une délégation présidée par le coordinateur du Polisario avec la Minurso, M’Hammed Khaddad, comprenant également Limam Khalil, représentant du Polisario à Oslo, s’est rendue en Norvège le 2 octobre dernier et a été accueillie au siège du ministère norvégien des Affaires étrangères.
L’offensive en direction des pays scandinaves va fort !

Intérêts suédois au Maroc
Les responsables suédois le reconnaissent: «les exportations suédoises vers le Maroc ont plus que doublé ces dix dernières années et une vingtaine de sociétés suédoises sont installées dans le Royaume, devenu un des principaux partenaires en Afrique».

Haïdar en Suède
Aminatou Haïdar devrait se rendre, le 15 octobre, à Stockholm, à l’invitation du Parlement suédois. Elle sera accompagnée de deux autres séparatistes: Rebab Amine et Sonnia Abderrahmane. Toutes trois sont invitées à témoigner contre de présumées violations des droits de l’homme au Sahara.
Elle y enfoncera des portes ouvertes !

Johan Büser, l’inconditionnel
Celui qui avait pris, le premier, l’initiative de proposer au parlement suédois la reconnaissance de la république des séparatistes, c’est Johan Büser, membre de la «SSU» (Ligue de la jeunesse social-démocrate suédoise) et député du Parti social-démocrate. C’est lui, l’inconditionnel du Polisario, pris en mains par les services algériens, qui, depuis, déploie un lobbying tous azimuts en faveur des séparatistes.

L’appel du Maroc au HCR
Lors de la 66ème session du comité exécutif du HCR, cette semaine, le Maroc a appelé, mardi 6 octobre, le Haut-commissariat de l’ONU aux réfugiés (HCR) à mettre en place les procédures qu’il faut pour l’enregistrement des populations des camps de Tindouf qui «devraient cesser de faire l’exception» en la matière. Les habitants des camps de Tindouf sont les seuls au monde à ne pas pouvoir être recensés par le HCR. La raison ? L’Algérie s’y oppose. Cela dépasse l’entendement, mais la communauté internationale ne se mobilise pas pour ça. D’où l’expression «Les séquestrés de Tindouf».

Sensibilisation
Le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami, s’est entretenu, mardi 6 octobre à Strasbourg, avec le président du Parlement européen, Martin Schulz ainsi qu’avec les chefs des principaux groupes politiques de cette institution.
R. Talbi Alami, président de l’Assemblée parlementaire de l’Union pour la Méditerranée (AP-UpM), a eu ainsi des entretiens avec Manfred Weber, président du groupe du Parti populaire européen (PPE) et Gianni Pittella, président du Groupe de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates (S&D).
Lors de ces rencontres, le projet du gouvernement suédois de reconnaitre l’entité du Polisario a soulevé les interrogations des interlocuteurs européens qui cherchent à trouver des explications à cette attitude, a indiqué le président de la Chambre des représentants, mettant l’accent sur la volonté des groupes politiques PPE et S&D de collaborer avec le Maroc en vue de convaincre le gouvernement suédois de reconsidérer ses positions.

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