Pour Rome, la coupe est pleine. «Notre ambassadeur auprès de l’Union européenne a informé personnellement le commissaire européen en charge de l’immigration, Dimitris Avramopoulos, que les vingt-deux navires qui sont engagés dans ces opérations de secours et qui se dirigent vers les ports italiens représentent un signal pour l’Italie», a expliqué le ministre de l’Intérieur, Marco Minniti. «Un signal clair», a précisé M. Minniti: «Les limites du supportable sont atteintes. Si aucun signal concret de solidarité de la part des autres pays de l’Union européenne ne nous parvient, l’Italie ne sera plus en mesure de garantir l’arrivée dans ses ports des bateaux qui ne font pas partie des missions européennes». En clair, les bateaux des ONG qui secourent les migrants en mer ne pourront plus débarquer les migrants dans les ports italiens, contrairement aux embarcations qui font partie des opérations menées par l’agence européenne Frontex. L’Italie a accueilli 181.000 migrants en 2016 et déjà plus de 75.000 depuis le début de 2017.
«Nous ne nous sommes jamais défilés et nous ne le ferons jamais face au devoir humanitaire», a assuré Paolo Gentiloni, le président du Conseil des ministres. «Mais nous demandons de l’aide et des ressources pour travailler en Libye et sur les programmes de relocalisation des migrants dans les autres pays européens. Certains pays de l’Union doivent arrêter de détourner la tête face à une telle urgence», a-t-il insisté lors de la réunion de préparation du sommet du prochain G20. En 2013, après le naufrage d’un bateau et la mort de 336 migrants, au large de Lampedusa, le gouvernement italien avait lancé l’opération Mare Nostrum. Les bateaux de la marine militaire sillonnaient le canal de Sicile pour sauver les migrants. Ils ont recueilli plus de 100.000 personnes. Le coût de cette opération s’élevait à 9 millions d’euros par mois, totalement pris en charge par le Trésor italien.
Mais depuis l’an dernier, ce sont les ONG qui ont pris le relais et la présence des bateaux au large de la Libye a soulevé de vives critiques, certains estimant que ces nombreux bateaux incitent les passeurs à mettre les migrants à la mer, convaincus qu’ils seront sauvés.
Patrice Zehr