Moi, victime d’une agression au sabre ?!

Maha, 15 ans, est collégienne. Cette jeune fille raconte son éprouvante rencontre avec un aliéné vagabond armé d’un sabre. Ce genre d’individus dont l’Etat devrait se charger… Voici son récit.

«Les histoires d’agressions au sabre donnent froid dans le dos. Mais, en toute franchise, je me suis toujours sentie en sécurité, pas vraiment concernée par ce genre de sauvagerie. En plus, mon univers de lycéenne est vraiment éloigné de cette cruauté barbare que j’ai toujours considérée comme propre aux malfrats des quartiers malfamés. Cependant, aujourd’hui, je ne suis plus dans cette complaisante manière de penser, puisque je me suis trouvée de manière complètement inattendue face à ce danger. Désormais, l’insouciance dans la rue, c’est terminé pour moi et ce, pour un bon bout de temps. Il est certain que je ne marcherai plus jamais les oreilles armées d’écouteurs transmettant ma «zik» favorite, ou le nez plongé sur l’écran de mon portable. Clairement, une fois dehors, je contraindrai mes quatre sens à se tenir en alerte permanente. D’ailleurs, je recommande fortement à tous de faire pareil.

Je suis une collégienne qui, depuis deux ans, n’attend plus qu’on l’accompagne ou qu’on vienne la chercher. J’ai beaucoup de chance d’habiter en plein centre-ville et que mon collège se situe aux alentours de chez moi. Du coup, en passant, j’applaudis mes parents pour leur choix judicieux.  Bien entendu, je suis bien consciente que ce n’est pas le cas pour un bon nombre de jeunes écoliers, collégiens ou lycéens. J’ai par ailleurs beaucoup de peine d’en apercevoir,  chaque jour, qui s’agrippent aux portes d’un bus déglinguant et archicomble pour rentrer chez eux. De ce fait, on peut facilement imaginer aussi la raison pour laquelle certains collectionnent les billets de retard au lycée. Franchement, il faut les féliciter pour leur courage. Il n’y a pas photo, ceux comme moi qui marchent ou ceux qui se font accompagner sont assurément vernis.

Evidemment, cela n’avait pas été une mince affaire que de me défaire du chaperon, alias notre gardien d’immeuble. Mes parents avaient vraiment disjoncté face à ma détermination à vouloir aller et venir seule. Ils se fichaient catégoriquement de ce que j’avançais pour arriver à mes fins. Franchement quoi? J’ai un boulevard à traverser et deux ruelles à contourner, toujours bondés et enguirlandés de piétons et d’automobilistes, sans parler des commerces et cafés. Pour moi, ce n’est pas circuler dans la «jungle», comme ils aiment à le répéter. Mais bon, ce n’est pas facile pour eux, vu que je suis une fille et enfant unique de surcroît.

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Sachant que j’ai une liberté sous caution, j’évite de leur infliger un sang d’encre. Je m’applique à leur indiquer par sms que je suis bien arrivée à mon collège. Je fais pareil une fois sortie. Généralement, je suis la première à rentrer à la maison. Mes parents travaillent tous les deux; ils m’ont appris très tôt à me débrouiller seule durant leur absence. Je me garde également à distance des groupements de camarades de classe après les cours. Même s’il m’en coûte quelques déboires, comme par exemple celui d’être mise à l’écart systématiquement. Mais ces futilités ne comptent pas pour moi. Ce qui m’importe vraiment, ce sont mes études, mes cours d’art plastique et la tranquillité à la maison avec mes parents.

De temps à autre sur mon chemin, il m’arrive d’être spectatrice consternée de rixes entre élèves, de colère d’automobilistes, d’accidents de la circulation et j’en passe et des meilleures. Aussi, ce qui me dérange, c’est d’être souvent sollicitée pour de l’aumône. Certains mendiants ou mendiantes sont plutôt collants. Néanmoins, avec le temps, j’ai appris à passer mon chemin sans jamais polémiquer avec eux. Et quand bien même il y a insistance exagérée de leur part, je résiste en gardant un silence absolu. Mes parents m’ont aussi fait promettre qu’en cas de danger, je ne devais pas hésiter à entrer dans un commerce ou un café pour me protéger. Franchement, jusqu’à très récemment, je n’avais jamais eu de problème. Par contre, ce n’était pas le cas pour quelques-uns  de mes camarades de classe et autres qui avaient eu de fâcheuses expériences sur leur trajet avec des voleurs ou des vagabonds agressifs. Cela arrive de plus en plus fréquemment, malheureusement!

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Les histoires de différends réglés à coups de sabre, je n’en avais eu écho qu’à travers les partages via les réseaux sociaux. Mais très peu pour moi que de perdre mon temps à visionner des scénars sordides et affolants. Par conséquent, je n’y attachais aucune importance, assurée en mon for intérieur que jamais de telles situations ne pouvaient se dérouler sous mes yeux. Je me trompais, parce que j’allais pour la première fois de ma vie ressentir la glaçante terreur provoquée par un attaquant au sabre.

Je marchais tranquillement, comme d’habitude, pour rentrer chez nous. Je voyais qu’un bon nombre de personnes couraient dans le sens inverse, mais ma musique en sourdine dans les oreilles distrayait mon attention. Au moment où je devais tourner au coin de la rue, je me suis trouvée face à un fou tout en guenilles. Je ne pouvais pas l’éviter, ni reculer, ni traverser. Je n’avais pas encore eu le temps de réfléchir à la situation qu’en une fraction de seconde, l’aliéné avait sorti de son pantalon un sabre scintillant, aussi long que son bras. J’étais tétanisée, au bord de l’apoplexie…

Heureusement pour moi, un groupe de gamins très chahuteurs traversaient de l’autre côté. Voyant  la scène, ils s’en prirent au fou avec des jets de pierres pour qu’il décampe. Il ficha le champ en trombe droit devant lui. Je l’avais échappé belle grâce à de très jeunes enfants, je ne l’oublierai jamais. Je n’oublierai jamais non plus que le danger n’est pas prévisible, mais sans mes écouteurs, j’aurais sans aucun doute entendu les avertissements de ceux qui fuyaient. Il y a quelques questions que je me suis posées tout de même, après cette énorme frayeur qui aurait pu virer au drame. Est-ce normal qu’un aliéné mental se balade avec un sabre? Comment a-t-il pu se le procurer si facilement? Et pour finir, est-ce qu’il a été intercepté, au moins? Je ne le saurais jamais, mais je l’espère.»

Mariem Bennani

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