Moussaoui Ajlaoui, membre de l’IRA et spécialiste en Histoire des sciences et techniques dans l’espace saharien

Moussaoui Ajlaoui, membre de l’IRA et spécialiste en Histoire des sciences et techniques dans l’espace saharien

«Créer un ministère en charge des affaires africaines»

Le Maroc a réintégré l’Union Africaine (UA) après 33 longues années d’absence. Ce retour a mis un terme aux allégations répandues contre le Royaume par ses ennemis au sein de cette Organisation panafricaine. Le retour du Maroc au sein de sa famille institutionnelle africaine ne doit pas pour autant le pousser à crier victoire trop tôt. C’est ce qu’explique Moussaoui Ajlaoui, membre de l’Institut de Recherches Africaines (IRA) à l’Université Mohammed V Agdal et spécialiste en Histoire des sciences et techniques dans l’espace saharien. Selon Ajlaoui, le vrai travail ne fait que commencer et il doit se faire au sein des instances et organes décisionnels de l’UA.

Le Maroc est aujourd’hui membre de l’Union Africaine. Que reste-t-il à faire au niveau des instances de l’organisation panafricaine?

Certes, le Maroc a gagné une bataille, mais pas la guerre. Le retour du Royaume à l’Union Africaine n’est que le début d’un long chemin qu’il doit parcourir au sein des différents organes de l’UA. Depuis 1984, les ennemis du Royaume avaient le champ libre pour le diaboliser aux yeux des membres de l’Union. Pour inverser la tendance et défendre les positions du Royaume, en tant que pays africain désireux de régler cette question le plus rapidement possible, notre pays doit mener une offensive politique au niveau des divers organes de l’UA. Le vrai travail ne fait que commencer pour les officiels et politiques marocains.

En tant que membre de l’UA, le Maroc a-t-il le droit d’être membre de tous les organes de l’Union?

En tant que membre de l’Union Africaine, le Maroc a désormais le droit de siéger dans les différentes instances de cette organisation, à savoir la Conférence de l’Union,  le Conseil exécutif, le Parlement panafricain, la Cour de justice, les Commissions, le Comité des représentants permanents et les institutions financières. Ces instances sont d’une importance majeure dans le fonctionnement de l’UA et influent directement sur les décisions prises par cette organisation. Néanmoins, il existe une commission au sein de l’UA, dans laquelle il va valoir faire preuve d’une réelle offensive diplomatique de la part du Maroc. Il s’agit de la Commission Paix et Sécurité. Cette instance, qui est toujours entre les mains de l’Algérie, en la personne de Smail Chergui, qui est un diplomate algérien, dispose de pouvoirs très importants à l’UA. Ce Chergui ne cache pas son hostilité envers le Royaume. Il était assis à droite du Souverain, lors du discours royal devant le dernier Sommet d’Addis-Abeba. Il a fait preuve d’une grande impolitesse en ne se présentant pas, pour éviter de saluer le Souverain comme le veut le protocole.

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Vous avez évoqué l’urgence pour le Maroc de s’introduire avec force au sein des différentes instances de l’UA. Cette procédure obéit-elle à des conditions de délai?

Le Maroc dispose encore de temps pour parachever l’ensemble des procédures qui doivent accompagner son retour officiel à l’Union Africaine. Normalement, la nomination des représentants du Royaume au sein des institutions de l’UA devra se faire d’ici à juillet 2017, date de la tenue du prochain Sommet de l’Union.

La société civile et les acteurs économiques devront eux aussi représenter le Maroc dans les organes de l’UA. Quelle est la procédure à suivre dans ce sens?

La société civile et les différents acteurs économiques auront, eux aussi, leur mot à dire au sein de l’UA. Cependant, je me demande si le Parlement est prêt et apte à jouer le rôle qui lui incombe pour renforcer la position du Maroc dans les instances de l’Union Africaine. Les parlementaires auront une mission patriotique à jouer dans les jours et mois à venir. Les politiques et les  parlementaires marocains doivent couper définitivement avec la logique du partage du «gâteau» au détriment des intérêts du Maroc. Il ne faut pas oublier que le gouvernement doit voir le jour dans les plus brefs délais, afin de concrétiser les différents chantiers et projets dans lesquels le pays est engagé ou le sera à l’avenir, surtout dans le continent africain.

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Certains estiment que le Maroc pourrait se diriger vers la nomination d’un représentant permanent au sein de l’UA ou la constitution d’un ministère dédié aux affaires africaines. Lequel de ces deux scénarios est le plus plausible, selon vous?

Le Maroc va certainement nommer un représentant permanent à l’Union Africaine. On évoque aujourd’hui le nom de Nezha Alaoui M’hammdi,  ambassadeure du royaume à Addis-Abeba, qui serait nommée à ce poste. Pour donner plus de poids au retour du Royaume à l’UA, il faut peut-être créer un ministère en charge des affaires africaines qui sera chargé de centraliser l’action du Maroc au sein de l’Union Africaine. Le ministère des Affaires étrangères, à lui seul, ne peut mener à bien cette mission.

Selon le ministre délégué aux Affaires étrangères, Nasser Bourita, le retour du Maroc à l’UA ne veut pas dire la reconnaissance des séparatistes et leur république fantomatique, mais pas seulement. Selon lui, le Maroc redoublera d’efforts afin que cette entité fantoche ne fasse plus partie de l’UA. Comment le Maroc peut-il atteindre cet objectif?

En tant que membre à part entière de l’Union Africaine (UA), le Maroc peut débarrasser l’UA de la fantomatique  RASD de deux manières. La première consiste en le vote d’une motion visant à suspendre cette entité fantomatique de l’Organisation panafricaine. La seconde, c’est l’amendement de l’Acte constitutif de l’UA, afin d’inclure des dispositions portant sur la suspension des membres de l’organisation dès que ceux-ci ne remplissent pas un certain nombre de conditions. Il ne faut pas oublier que la RASD n’est soutenue que par une poignée de pays africains membres de l’UA. Or, pour être membre de l’Union, il faut impérativement être soutenu par au moins la majorité des pays membres, ou être reconnu comme Etat par la communauté internationale. Ce qui n’est pas le cas pour le Polisario et son entité créée de toutes pièces avec le soutien de l’Algérie, entre autres.

Propos recueillis par: Mohcine Lourhzal

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