Anissa, 50 ans, agent commercial, est mariée et a deux enfants. Le mariage avec un homme plus jeune qu’elle suscite la jalousie de son entourage. Voici le récit de ses tourments.
«Je suis une personne qui arrive à la cinquantaine et je n’ai pas l’allure d’une vieillotte pantouflarde, ronchonnant des litanies sur un passé meilleur. En plus, mon nouveau mariage a stoppé net un train-train de vie qui voulait me dominer, pour me couler dans le cliché usuel. N’en déplaise à certaines, je suis très satisfaite de ma vie de couple, je me sens belle, épanouie. Franchement, je ne regrette absolument pas d’avoir pris une des meilleures décisions de ma vie. Avec, bien entendu, le meilleur des compagnons qui puisse exister.
Ce que je n’avais pas prévu, par contre, c’est de devenir la mascotte du commérage de couloir.
Les aigris, avec leurs regards inquisiteurs et leurs remarques sur mon couple ou plus exactement sur moi, cela me porte sur les nerfs.
Le plus affligeant, c’est que ce ne sont même pas des proches, loin de là, tout juste des connaissances, des amis ou des voisins.
Nous sommes constamment attaqués par ces gens qui se mêlent de ce qui ne les regarde pas. Ils opèrent continuellement de façon sournoise. Leur jalousie viscérale se manifeste à tout bout de champ. Leur vision des choses, de ce qui est faisable ou non, ils veulent à tout prix et par la force nous l’inculquer. Grosso modo, nous sommes deux intrigants aux mœurs déplacées. Et puis, aussi bizarre que cela puisse paraître, ce sont en majorité des femmes qui m’attaquent. Ce qui les affole, c’est de nous voir complices et que notre couple fonctionne à merveille, malgré notre différence d’âge.
Mon mari est un jeune homme qui entame à peine la quarantaine. Avant moi, il a enduré six années de mariage foireux. L’entente entre son ex-épouse et lui s’effilochait de jour en jour, au point où il ne supportait plus de la voir en peinture. Ils passaient le plus clair de leur temps murés dans un silence lourd de reproches. Forcément, un tel climat ne pouvait générer de l’affection ou de la tendresse. Dans leur semblant d’union, une bombe à retardement sommeillait. Malgré cela, la jeune femme tenta par ruse de l’attacher à elle avec un enfant. Cependant, rien ni personne ne pouvait faire changer d’avis mon mari qui avait pris la résolution définitive de ne plus rester lié à une personne qu’il n’aimait plus.
Lorsque je l’ai connu, il était psychiquement très affaibli. Il gardait quand même une belle personnalité et un humour noir terriblement attachant. Je fus séduite par notre immédiate complicité. Nous étions tous les deux logés à la même enseigne. Ni lui, ni moi n’avions une situation financière mirobolante, ni biens. Vraiment du «juste juste», comme dirait ma meilleur amie. Par contre, nous étions riches d’une incommensurable envie de partager de bons moments, sans calcul, ni prise de tête. En ce qui me concerne, la vie ne m’avait pas gâtée non plus, jusque-là. J’avais dû trimer pour m’en sortir seule, avec deux enfants. Au final, je les ai vus s’éloigner de moi très tôt pour s’installer en couple à leur tour. Chaque soir, après mon boulot, je me retrouvais avec ma solitude à regarder la télé. Parfois, le scénario changeait avec du baby setting. Ma fille de 20 ans, mariée, m’a offert le titre de grand-mère cette année, un autre bonheur. Mon jeune mari m’a sortie de cette routine qui allait finir par me tuer d’ennui prématurément. Mes enfants n’ont pas été hostiles à ma décision, bien au contraire.
Tout a changé dans mon quotidien, c’est une belle nouvelle aventure. Je passe plus de temps à soigner mon apparence, ma santé et cela se remarque. Et puis, il n’y a rien que nous fassions séparément, mon époux et moi. Est-ce cela qui dérange ou est-ce moi, tout simplement? En tout cas, je suis dans le viseur de celles qui m’espionnent sans répit. Combien de fois ne m’ont-elles pas injecté leur venin lorsque je me suis trouvée sur leur chemin et seule. Elles me bombardent de phrases du genre: «Tu es magnifique, mais quand même, à notre âge, il faudrait se rapprocher du Créateur et en finir avec les plaisirs terrestres qui, eux, font peser la balance du mauvais côté». Ou: «Dis donc, c’est fou comme tu rajeunis de jour en jour, que le Tout-puissant te protège. Au fait, tu ne penses jamais à aller faire une omra ou un hadj avec ton mari? N’est-ce pas, c’est bien ton mari?». Ou pis encore: «Tu en as de la chance! C’est beau d’être grand-mère et puis, ton petit-fils, on pourrait croire que c’est le tien. Par contre, personne ne contredirait que c’est celui de ton époux».
Elles se lâchent, puis partent en éclats de rire très provocateurs qui expriment toute la méchanceté de ce qu’elles sous-entendent. Ces attaques bouleversent ma sérénité intérieure. Je ne comprends pas cet acharnement, mais je leur réponds par de grands sourires.
Une chose est sûre, malgré toutes leurs attaques, moi, je ne me sens pas dans la peau d’une cougar. Je ne ressens aucune différence d’âge. Je suis juste une femme heureuse auprès de son mari».
Mariem Bennani
Très bien, où est le problème? Cet homme et cette femme sont visiblement heureux… S’ils s’aiment c’est l’essentiel!