De g.à.d : Mehdi Bensaid, Fatima Zahra Mansouri et Salaheddine Abou El Ghal
Le Parti Authenticité et Modernité (PAM) a annoncé la mise en place d’une direction collégiale en lieu et place du Secrétaire Général unique. Cette démarche suscite une vive controverse.
Quelque 3.500 participants ont pris part au cinquième Congrès National du PAM, dont les travaux ont eu lieu du 9 au 11 février 2024 à Bouznika.
Lors de la séance inaugurale du Congrès, le Secrétaire Général sortant du PAM met fin au suspense qui entourait sa candidature pour un second mandat à la tête du parti qui forme la majorité gouvernementale aux côtés du Rassemblement National des Indépendants et du Parti de l’Istiqlal. Abdellatif Ouahbi, qui occupe également le poste de ministre de la Justice dans l’actuel gouvernement, a ainsi annoncé ne pas se porter candidat à sa propre succession.
A ce moment, Fatima Zahra Mansouri, alors Présidente du Conseil National du PAM, par ailleurs ministre de l’Aménagement du Territoire National, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville, était donnée favorite pour succéder à Abdellatif Ouahbi. Finalement, le Parti du tracteur optera pour une autre option, celle d’une direction à trois.
Idée de génie ou prémices d’un échec?
Officiellement annoncée au deuxième jour du 5ème Congrès National du Parti Authenticité et Modernité, la direction tripartite du PAM qui a nécessité une modification expéditive des Statuts du parti, est composée de Fatima Zahra Mansouri (Coordinatrice Nationale), Mohamed Mehdi Bensaid, membre du Bureau Politique du Parti et ministre de la Culture, de la Jeunesse et de la Communication et Salaheddine Abou El Ghali, également membre du BP du PAM, Coordonnateur régional du parti à Casablanca et Président de la Commune de Médiouna.
Etait-ce une bonne idée de privilégier une direction à trois pour gérer les affaires du Parti Authenticité et Modernité au cours des quatre prochaines années?
Les avis divergent sur la question. Si la plupart des membres du PAM, notamment le trio Mansouri-Bensaid-Abou El Ghali, estiment que la désignation de trois membres à la tête du parti permettra de prendre des décisions qui concernent l’avenir du parti de manière collégiale et non unilatérale.
Dans le communiqué final ayant sanctionné les travaux de son 5ème Congrès National, rendu public samedi 10 février 2024 en début de soirée, le Parti Authenticité a souligné que «le contexte actuel de la scène partisane au niveau national, nécessite un examen critique des choix et des approches adoptés par les formations politiques marocaines». Et d’ajouter que la formule de direction collégiale du parti constitue «(…) une formule organisationnelle créative, un exercice démocratique qui permettra de stimuler la créativité au sein du PAM, tout en œuvrant à la moralisation de la vie partisane.
Rachid Lazrak, porte un regard critique sur les raisons réelles qui auraient poussé le PAM à opter pour une direction collégiale en ce moment précis et ses conséquences sur le parti. Joint par Le Reporter, ce Professeur de Droit Constitutionnel à l’Université Ibn Tofail de Kénitra estime qu’«il est impossible de porter un jugement sur cette expérience à l’heure actuelle, étant donné qu’elle est encore à ces débuts». Notre interlocuteur estime toutefois que «diriger le PAM à travers une direction tripartite signifie une dispersion des responsabilités, bien que ladite direction ait choisi Fatima-Zahra Mansouri comme coordinatrice nationale».
Pour Rachid Lazrak, une direction à trois à la tête du Parti Authenticité et Modernité risque d’avoir l’effet inverse de celui escompté, dans la mesure où au lieu de contribuer à souder les rangs au sein du PAM elle pourrait aboutir à des dissidences au sein de cette formation politique, en cas de divergences de vues entre le trio Mansouri-Bensaid-Abou El Ghali.
Le choix d’une direction collégiale aux commandes du Parti Authenticité et Modernité témoigne de l’incapacité à se mettre d’accord sur une seule personne pour succéder à Abdellatif Ouahbi. C’est ce qu’explique le politologue Naoufal Bouamri. Selon lui, «des affrontements se sont déroulés en coulisses entre le clan Ouahbi et celui de Fatima-Zahra Mansouri. Pour ne pas sombrer dans la division, le PAM, a trouvé cette parade, celle d’une direction tricéphale, question de satisfaire tout le monde», ajoutant que «dans la configuration actuelle, on peut dire que c’est Fatima-Zahra Mansouri qui dirige réellement le PAM».
Hormis l’Union Nationale des Forces Populaires (UNFP) ancêtre de l’USFP qui en a fait l’expérience au début des années 60 sans résultat concluant, il n’est pas d’usage que la direction d’un parti politique marocain soit partagée. Selon certains analystes, l’adoption de ce mode de gouvernance par le PAM, traduit une forme de discorde au sein de cette formation politique qui forme la majorité. Cette hypothèse est rejetée par les nouveaux dirigeants du parti.
Seul le temps dira si le passage à une direction tricéphale au Parti Authenticité et Modernité était une bonne idée ou non.
Mohcine Lourhzal
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Saïd Naciri-Abdenbi Bioui-Escobar du Sahara
Fatima Zahra Mansouri appelle à éviter l’amalgame!
A l’issue du cinquième Congrès du Parti Authenticité et Modernité, une conférence de presse a été tenue par la nouvelle direction collégiale du PAM, à savoir Fatima-Zahra Mansouri, en tant que Coordinatrice nationale, Mohamed Mehdi Bensaid et Salah Eddine Abou El Ghali. L’affaire «Escobar du Sahara» y a été évoquée.
Lors de ce point de presse tenu aux premières heures du dimanche 11 février 2024 à Bouznika, Fatima Zahra Mansouri a souligné que cette affaire relève du ressort de la justice et que le PAM respectait pleinement le processus judiciaire en cours et les décisions qui en découleront.
La coordinatrice nationale de la nouvelle direction collégiale du Parti Authenticité et Modernité a insisté sur le fait que l’implication de deux membres du parti (Saïd Naciri et Abdenbi Bioui, Ndlr) ne peut en aucun cas être généralisée au parti dans son ensemble, rappelant l’importance de la présomption d’innocence et la nécessité que «chacun assume ses responsabilités».
Tout en insistant sur la volonté du parti de «mettre un terme à plusieurs pratiques ancestrales et de se diriger vers un renouveau du parti avec sa jeunesse et ses militants», Fatima-Zahra Mansouri a également mis en avant l’esprit démocratique du parti, affirmant que «toutes les critiques étaient les bienvenues», rejetant par ailleurs et de manière ferme, «les accusations infondées portées contre le PAM, connu pour son intégrité».