Pétitions & lois : Démocratie participative !

Secretariat general du gouvernement maroc

Deux avant-projets de loi organique, l’un sur le droit de pétition, l’autre sur l’initiative législative.

Les citoyens auront le droit de présenter des pétitions aux pouvoirs publics et des motions en matière législative. Pour fixer les conditions et les modalités de ce droit, deux projets de loi organique (44-14 et 64-14) ont été publiés sur le site du Secrétariat général du gouvernement il y a quelques semaines. Jeudi 23 avril, ils ont été examinés par le Conseil de gouvernement. Après l’adoption définitive des deux textes, les citoyens désirant présenter des propositions en matière législative pourront s’adresser directement à la Chambre des représentants ou à la Chambre des conseillers, mais sous conditions.

Teneur des deux projets

Le premier texte, qui regarde le droit de pétition, précise un certain nombre de conditions et de modalités requises.
Le projet de loi organique 44.14 impose la collecte de 7.200 signatures pour la validation de ces pétitions présentées directement au chef de gouvernement. Pour les militants des droits de l’homme, ce chiffre serait trop élevé. La requête doit être présentée par écrit, ce qui est la règle dans la majorité des pays. La signature doit être légalisée, ce qui permet l’authentification de l’identité du requérant, mais aussi de sa capacité juridique. Cette formalité assure ainsi qu’il a pleine jouissance de ses droits civils et politiques, qu’il est inscrit sur les listes électorales et qu’il est un contribuable en règle avec la fiscalité. Le mandataire des pétitionnaires adresse ensuite la requête au chef de gouvernement qui, à son tour, la soumet à une commission ad hoc. Celle-ci dispose d’un délai de 30 jours pour statuer sur les suites à donner (art. 8). Le projet gouvernemental dispose que la pétition est rejetée si elle porte atteinte «aux constantes de la nation» (Islam, unité nationale, régime monarchique, choix démocratiques de la nation, acquis des droits et libertés); si elle est contraire aux conventions internationales ratifiées par le Maroc; si elle empiète sur les compétences du Conseil des ministres, à l’exception des politiques publiques (art. 4); et si elle porte sur la défense nationale, sur une affaire soumise à la justice, sur des faits instruits par des commissions d’enquête parlementaire ou sur des revendications syndicales et partisanes.

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Qu’en est-il de l’initiative législative?

Il s’agit du droit des citoyens de présenter des pétitions populaires tendant à l’adoption de nouvelles lois ou l’abrogation d’une partie ou la totalité d’une loi existante. Ici, le seuil minimum requis pour la recevabilité est de 25.000 électeurs. Les pétitionnaires sont tenus de désigner un mandataire qui déposera la proposition de loi à la Chambre des représentants ou à celle des conseillers. Ailleurs, le parrainage d’un parlementaire est nécessaire. Une fois la recevabilité de la pétition actée par l’une ou l’autre des deux chambres du Parlement, celle-ci a un délai de 60 jours pour étudier le texte, puis 15 jours pour statuer et informer le requérant. En cas de refus de la proposition de loi, il n’est pas prévu la justification des motifs de ce rejet. Des amendements doivent être apportés tant aux règlements intérieurs des deux Chambres du Parlement qu’aux législations afférentes aux collectivités locales pour pouvoir organiser cette procédure ouverte aux pétitionnaires. Il s’agira notamment de régler la suite du mécanisme de transmission des pétitions recevables: examen par la commission compétente, délibération, délai depuis le dépôt, renvoi ou non au gouvernement…
Ces deux avant-projets de loi organique installent l’une des pièces de l’ensemble du dispositif devant conforter et promouvoir la démocratie participative consacrée par la nouvelle Constitution et ce, sur la base des articles 14 et 15, mais aussi 139 pour ce qui est des collectivités territoriales… Selon une déclaration du ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi, même si le Conseil de gouvernement a donné son aval à ces deux projets de loi, il a décidé de créer une commission interministérielle chargée d’introduire «des observations formulées par certains ministres» dans les deux textes.

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La société civile réagit

Ces deux projets ont été critiqués par les organisations de la société civile, vu les nombreux obstacles dressés devant la mise en œuvre de ces deux lois et leur effectivité. Concernant les pétitions, on avance que ledit projet ne comporte pas de préambule définissant le cadre de cette loi et exposant les motifs de sa promulgation. Ce préambule devrait contenir toutes les dispositions constitutionnelles ayant trait à la participation des citoyennes et des citoyens et les conventions internationales que le Maroc a ratifiées et insister sur le rôle de la société civile dans la présentation de ces pétitions.
Pour la société civile ce mécanisme exclut les millions de citoyens non inscrits sur les listes électorales. L’aspect restrictif du texte se vérifie également, pour ce qui est des résidents étrangers, ce qui les pousse à entraver leur participation aux affaires publiques. Ces derniers auront cependant la possibilité de présenter des pétitions aux ambassades du Royaume dans le monde et que celles-ci se chargent de les transmettre au Parlement. Concernant l’article 10 du projet de loi organique relatif au droit de présenter des pétitions aux pouvoirs publics, selon lequel la décision de refus d’une pétition par le bureau de la Chambre des représentants ou des conseillers ne peut faire l’objet d’aucun recours, la société civile rejette cette disposition et propose qu’elle puisse faire l’objet d’un recours devant le Tribunal constitutionnel. Elle propose également de sanctionner tous ceux qui font pression ou interviennent pour retirer une pétition.

Bouchra El Khadir

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