Finalement, l’activité de pêche aux céphalopodes ne doit pas reprendre à sa date officielle prévue initialement par le département de la Pêche (15 décembre). Selon des sources professionnelles, la saison hivernale de pêche au poulpe ne devra démarrer que le 1er janvier 2020.
Le feu vert est donné, ce mardi 3 décembre, par l’Institut national de la recherche halieutique (INRH), sur la base de l’état des stocks dans les pêcheries concernées par cette espèce. Les résultats des analyses effectuées par l’Institut confirment que les tailles seront normales, à cette date, expliquent les mêmes sources.
Pour cette nouvelle campagne qui s’étendra jusqu’au 31 mars 2020 prochain, les trois segments de pêche (hauturière, côtière et artisanale) devront se partager un quota global dans la zone aménagée, lequel quota n’a pas encore été fixé, affirment nos sources.
Celles-ci font savoir que la question de la reprise de l’activité a fait débat lors d’une rencontre qui a réuni, mardi 3 décembre, les responsables du ministère et les représentants de 22 instances professionnelles. A l’ordre du jour, la question des quotas, la zone de pêche et la date de la reprise de la saison hivernale, qui – chaque année- divise les professionnels de la profession.
Quelle réaction des professionnels à ce report ?
A en croire nos sources bien informées, l’idée de reporter la reprise de l’activité poulpière à été bien accueillie par les hauturiers. Explication de nos sources : Des quantités énormes de poulpe sont toujours stockées dans des unités, depuis la saison estivale. Ce sont surtout les armateurs de la pêche hauturière qui seront donc satisfaits de cette décision. Dans les milieux professionnels, on parle de plus de 10 mille tonnes de poulpe qui attendent d’être écoulées à des prix élevés sur les marchés internationaux.
Pour leur part, les marins-pêcheurs de la pêche côtière et artisanale se disent, quant à eux, en colère contre cette mesure. Nos sources indiquent que la décision de reporter la reprise de l’activité n’a pas manqué de susciter la colère et un sentiment de frustration chez quelque 30.000 pêcheurs exerçant dans la pêche artisanale et 8.000 pêcheurs opérant dans la pêche côtière.
«Cela fait plus de trois mois que ces marins pêcheurs sont en arrêt d’activité. Ils attendaient impatiemment le lancement de la saison hivernale du poulpe à sa date officielle. Ils sont maintenant frustrés à l’idée de ne pas pouvoir reprendre leur activité le 15 décembre», expliquent les mêmes professionnels de la pêche côtière.
Ces derniers évoquent, par ailleurs, une surexploitation de la ressource. «Cette décision a, d’ailleurs, été prise par le Comité de suivi, après que l’INRH a tiré la sonnette d’alarme en présentant, lors de la rencontre du mardi 3 décembre, son rapport scientifique», indiquent nos sources.
Pour ces dernières, le poulpe ne se porte pas bien. Le quota de l’été 2019 a d’ailleurs été épuisé à hauteur de 60%. A en croire les mêmes voix, les captures de céphalopodes sont en baisse. C’est ce qui explique que le sujet fait l’objet d’une grande polémique au sein des milieux professionnels, à quelques jours de la reprise de la saison hivernale de poulpe (15 décembre 2019), confie-t-on.
«La pêche aux céphalopodes est en train de s’intensifier. Les ressources ont beaucoup diminué. D’ailleurs, lors de la campagne dernière, on n’a pas atteint notre quota. Certains opérateurs ont fait seulement 60% de leur quota », soutient Youssef Kadimi, un opérateur de la pêche côtière à Agadir.
Pour ce dernier, plusieurs raisons expliquent cette baisse. «Il y a une surexploitation des ressources, notamment dans les zones sud du pays. On utilise de plus en plus des engins prohibés. Près de 90 % des opérateurs hauturiers utilisent d’ailleurs la double poche, un moyen de pêche interdit», déplore Kadimi, également membre de la Chambre des pêches maritimes de l’Atlantique Centre-Agadir (CPMA).
Notre interlocuteur évoque également l’utilisation des pots par les opérateurs de la pêche artisanale, notamment à Dakhla. «Ces gens, qui pêchent le poulpe en utilisant des pots, tuent le juvénile. Le ministère doit prendre des dispositions fermes pour mettre un terme à l’utilisation des engins prohibés. Car il y va de la préservation des ressources», conclut, fermement, la même source.
Dans le même sens, Mohamed Allalou, un autre professionnel membre de la Confédération nationale de la pêche côtière (CNPC), déplore, quant à lui, un braconnage avéré du poulpe pendant le repos biologique. Les ressources continuent d’être surexploitées par les contrebandiers, affirme ce professionnel. «Le ministère doit renforcer le contrôle pendant le repos biologique. Car, des braconniers sont très actifs pendant cette période», souligne l’ancien président de la CNPC, Mohamed Allalou, qui pointe des propriétaires de barques artisanales. «Un nombre non déterminé de barques artisanales opèrent de manière illégale durant l’arrêt d’activité, sans être inquiétées. Le plus grave c’est que ces gens vendent leur poulpe à des unités frigorifiques dont les propriétaires sont connus de tous dans le sud», déplore notre interlocuteur.
Naîma Cherii