Peut-être qu’enfin, les réformes en matière de presse écrite vont-elles être remises sur rails ?
Très franchement, au sein de la profession –depuis longtemps désabusée- plus personne n’était pressé de voir aboutir ces réformes.
Chaque fois que le sujet revenait entre hommes et femmes de médias marocains, les uns disaient aux autres, sur un ton mi-amer, mi-détaché: «Bof… Ils feront leurs réformes quand ils le voudront… De toutes les manières, quand ils ont la presse dans le collimateur, ce n’est pas le code de la presse –réforme ou pas- qui est appliqué dans les tribunaux, mais le code pénal».
Pour autant, jamais la Fédération des éditeurs de journaux (FMEJ), ni le syndicat national de la presse marocaine (SNPM) n’ont pratiqué la politique de la chaise vide.
Partenaires du ministère depuis le message royal de 2004 qui recommandait d’associer la profession à toute réforme concernant le secteur (notamment celle du code de la presse), la FMEJ et le SNPM ont participé à toutes les concertations, tous les débats (dont le grand débat national sur la presse qui a remis au Parlement ses conclusions et recommandations, cette semaine) et à toutes les commissions qui ont eu à plancher sur les réformes.
La FMEJ et le SNPM ont également défendu, devant la commission Mennouni de réforme de la constitution, le principe d’autorégulation de la profession. Principe qui a été retenu par la constitution de juillet 2011.
Aujourd’hui, c’est un membre de la FMEJ (et de son bureau) qui se voit confier le département de la Communication. Le nouveau ministre, Mustapha Khalfi est donc parfaitement au fait des attentes du secteur. Et ce sont ses débuts en tant que ministre qui redonnent confiance.
Déjà, quand il était membre du bureau de la FMEJ) et qu’il préparait les élections pour le compte de son parti (le PJD), Mustapha Khalfi était connu pour être un travailleur rigoureux et acharné. Nommé à la tête du ministère de la Communication, il confirme ces qualités. Il est déjà allé à la rencontre de presque tous ceux qui relèvent de son département, écoutant les attentes et doléances, procédant à une sorte d’état des lieux et se préparant à agir vite.
Mustapha Khalfi a en particulier impressionné ses ex-consœurs et confrères quand, immédiatement après le vote d’investiture du gouvernement par la Chambre des représentants –et sans perdre un seul jour- il a reçu FMEJ et SNPM autour d’un déjeuner de travail pour préciser les chantiers à ouvrir et fixer le calendrier des actions à lancer.
Lors de ce déjeuner-débat auquel ont participé plusieurs membres de la FMEJ et du syndicat (et Mustapha Khalfi, qui n’a pas les complexes de Saad-Eddine El Othmani, bien qu’il soit aussi islamiste que lui, avait à sa table 4 femmes, 3 du syndicat et une de la FMEJ), les chantiers auxquels le ministre compte s’attaquer ont été passés en revue.
Ces chantiers sont les suivants: un nouveau contrat-programme dans les plus brefs délais (le précédant, arrivé à échéance depuis deux ans, ayant juste été prorogé par un avenant) ; une nouvelle mouture de conventions collectives ; la réforme du code de la presse, la mise en place –dans 3 à 4 mois- d’un conseil national de la presse (conformément aux dispositions de la nouvelle constitution qui prévoit l’autorégulation de la profession) ; le chantier du droit d’accès à l’information (droit désormais consacré par la constitution) ; celui du secteur publicitaire (impliquant médias, groupement des annonceurs et association des agences conseils) ; et enfin, le gros morceau du secteur public (télés, radios, MAP…).
Preuve de sa volonté de ne pas perdre de temps, Mustapha Khalfi a proposé à la FMEJ et au SNPM une rencontre toutes les deux semaines. Personne n’est dupe. Il y a ce qui pourra déboucher très vite et ce qui n’échappera pas aux complications habituelles. Mais la volonté commune est là. FMEJ et SNPM seront encore à tous les rendez-vous de travail. Pour le reste, c’est aux politiques de savoir s’ils veulent une réussite en la matière ou pas.