«La plupart des tueurs en série ont été traumatisés pendant leur enfance»
Niveau d’organisation et de violence, type de blessures infligées, le tueur des sans domicile fixe (SDF) dans le Souss a finalement été appréhendé par la police, après plusieurs semaines de cavale. Dans cet entretien, le spécialiste en criminologie, Rachid El Mounacifi, analyse pour «le Reporter» le profil criminel du «fracasseur de têtes» qui a secoué le Souss.
Le tueur en série du Souss a été arrêté, après avoir fait 8 victimes parmi les SDF. Quelle analyse criminelle et comportementale faites-vous, concernant cet individu?
Il faut d’abord définir ce qu’est un serial killer. C’est un criminel atteint de troubles psychiatriques, qui assassine des personnes de façon régulière, en utilisant un schéma identique, uniquement pour retirer du plaisir de ses meurtres, généralement sadiques. La plupart des tueurs en série, qui ont défrayé la chronique dans le Royaume et dans le monde, ont été traumatisés pendant leur enfance. Dans le cas du serial killer du Souss, les premiers éléments de l’enquête indiquent que celui-ci avait été lui-même victime d’agressions sexuelles, de la part de sans-abri, durant son enfance. C’est ce qui a nourri chez cet individu une haine éternelle contre les vagabonds. Pour qu’il y ait meurtres en série, il faut un nombre déterminé de meurtres, pas moins de quatre, exécutés de la même façon, selon le même rituel et visant des victimes ayant le même profil. C’est exactement le cas de l’assassin des SDF au Souss.
Le fait d’avoir été abusé sexuellement par des SDF est-il un mobile suffisant pour s’en prendre, avec toute cette violence, à cette catégorie de gens?
En l’absence de stratégies de suivi psychologique des enfants victimes d’abus sexuels, il est tout à fait normal d’assister à ce genre de crimes odieux. Les autorités gouvernementales doivent mettre en place des stratégies pour le suivi psychologique de ces enfants. Dans le cas contraire, il ne faut pas s’étonner quand ils décident de se venger contre leurs agresseurs. Le désir de vengeance et la haine sont deux sentiments tout à fait normaux chez tout un chacun. Sauf qu’il y a des personnes qui passent à l’acte et pas d’autres.
Quels sont les traits caractéristiques d’un tueur en série?
Un tueur en série, même quand il est arrêté, aime donner l’impression de contrôler la situation. Souvent, il dissimule des informations capitales, croyant à tort qu’il va brouiller les pistes et compliquer le travail des enquêteurs. Les tueurs en série, généralement, n’ont pas de remords et n’éprouvent aucun regret face à l’atrocité des crimes qu’ils ont commis.
La majorité des tueurs en série sont de sexe masculin. Pourquoi, selon-vous?
Dans le monde, les femmes ne représentent que 5 à 10% des tueurs en série. Selon les scientifiques, la testostérone serait un facteur qui explique une bonne partie des différences de comportement agressif entre les hommes et les femmes. Dans la plupart des cas, les crimes en série commis par des hommes sont précédés d’agressions sexuelles.
Les crimes en série commis par le tueur du Souss a fait ressurgir le dossier de l’insécurité qui connaît des proportions alarmantes dans plusieurs villes du Royaume. Que faire face à ce phénomène?
L’insécurité n’est pas un phénomène récent au Maroc. Seulement, depuis quelques années, elle s’amplifie pour plusieurs raisons, dont les principales sont l’exode rural et le désespoir qui s’est emparé des jeunes. Il est temps d’approcher ce problème avec beaucoup de fermeté et en lançant des politiques sociales en faveur du citoyen.
Propos recueillis par Mohcine Lourhzal