Driss Jettou jette un pavé dans la mare en ressortant un dossier qui lui est cher, à savoir celui de la réforme du régime de retraite marocain. Un régime bien en souffrance.
Initiateur de ce grand débat en tant que Premier ministre en 2004, Jettou revient à la charge, cette fois en sa qualité de président de la Cour des comptes. Cette dernière vient de rendre public un rapport accablant sur le système de retraite au Maroc dans lequel elle recommande une réforme des régimes de retraite. Une réforme voulue progressive, dans la perspective d’un système à régime unique qui devrait prendre en considération la pénibilité caractérisant certains métiers.
La Cour préconise, en effet, une réforme répartie sur deux grandes phases, à savoir «la réforme paramétrique» ayant pour objectif d’augmenter l’horizon de la viabilité et de diminuer la dette des régimes les plus fragiles, et une «réforme systémique» globale couvrant tous les régimes.
La réforme dans le concret
Avec la mise en place d’un régime additionnel et l’effet de l’abattement fiscal qui est passé en 2013 de 40% à 55%, la réforme paramétrique proposée devrait maintenir les pensions servies à un niveau proche de la situation actuelle et, par conséquent, préserver le pouvoir d’achat des retraités, explique un communiqué de la Cour des comptes relatif au rapport sur le système de retraite au Maroc. «À l’horizon 2060, l’effet combiné des réformes proposées permettra d’augmenter l’horizon de viabilité du régime à 2028 et de réduire la dette implicite de près de 60%», précise le rapport.
La réforme systémique comportera deux principales étapes, une première intermédiaire qui devrait être effectivement réalisée dans un horizon de 5 à 7 ans, où il s’agira d’introduire des réformes permettant d’assurer une plus grande convergence et harmonisation des différents régimes et une deuxième étape où le système cible sera mis en place.
La mise en place de deux pôles de retraite (public et privé), qui consistera essentiellement à fusionner les régimes du secteur public et à maintenir des régimes avec notamment une réforme profonde du régime des pensions civiles de la Caisse marocaine des retraites (CMR) en vue de son rapprochement des autres régimes existants, surtout au niveau du plafonnement, est parmi les principales options qui pourraient être envisagées dans l’étape intermédiaire.
Une logique de piliers
En effet, le nouveau système de retraite devrait adopter une logique de piliers comprenant un régime de base unique, des régimes complémentaires et des régimes facultatifs.
Le régime de base unique sera basé sur la répartition. Il sera caractérisé par le plafonnement et la fixation d’un taux de remplacement permettant d’assurer un niveau de pension convenable et la détermination des taux de cotisation compatibles avec les impératifs de compétitivité, de préservation du pouvoir d’achat des cotisants et de la viabilité du régime.
Concernant les régimes complémentaires, ils seront à cotisations définies et fonctionneront en mode capitalisation, sans écarter l’option de la répartition, en particulier dans le secteur privé. Le caractère obligatoire de ces régimes peut être limité, dans un premier temps, au secteur public avant d’être progressivement généralisé.
Pour leur part, les régimes facultatifs seront destinés à prendre en charge la partie des revenus supérieure au plafond des régimes complémentaires, avec comme mode de fonctionnement la capitalisation, note la Cour, précisant que les cotisations seront supportées exclusivement par les affiliés.
Pour l’accompagnement de la mise en œuvre de la réforme, la Cour des comptes propose la création d’un organe indépendant de veille et de suivi du système ayant pour mission, notamment, le suivi permanent de la situation du système de retraite et l’accompagnement de la mise en œuvre de la réforme.
Constat Dans son rapport, la Cour des comptes a constaté que le système de retraite en vigueur au Maroc se caractérise par la diversité et la non convergence des régimes, la diversité des modes de gouvernance, le faible taux de couverture des actifs (à peine 33% de la population active bénéficie d’une couverture retraite), la non pérennité et le déséquilibre structurel de certains régimes. |