La politique est généralement considérée comme l’apanage des personnes d’un certain âge, considérées comme étant les plus expérimentées. De facto, les jeunes, même quand ils sont compétents, sont soigneusement tenus à l’écart par l’élite politique dite traditionnelle.
Dans son discours à l’occasion du 19ème anniversaire de la fête du Trône, le 29 juillet 2019, SM le Roi Mohammed VI a appelé les partis politiques à attirer de nouvelles élites, à inciter les jeunes à s’engager dans l’action politique et à rénover leurs modes de fonctionnement. Il semble qu’aujourd’hui encore, les partis politiques dans leur grande majorité, n’ont pas saisi la finesse du message royal. Il est vrai que certaines formations politiques s’efforcent de s’acquitter au mieux de leurs tâches. Néanmoins, il leur faudra attirer de nouvelles élites. Les générations d’aujourd’hui étant les mieux placées pour connaître, comprendre et traiter les problèmes de leur époque.
Se renouveler ou disparaître
Au Maroc, le ras-le- bol des jeunes est dû principalement au fait qu’ils sont rarement pris au sérieux. Certains leaders politiques vont même jusqu’à considérer la jeune génération comme immature et incapable d’assumer des postes de responsabilité, notamment au sein des partis. Pourtant, nos jeunes ne sont pas indifférents. Si l’occasion se présente à eux, ils sont capables de surprendre avec leurs compétences, contrairement aux apparences.
L’éclosion d’une nouvelle élite politique n’est plus un luxe pour le Maroc, mais une nécessité. La crise sanitaire due au nouveau Coronavirus (Covid-19), a montré que le pays a besoin de toutes ses compétences et forces vives, surtout les jeunes qualifiés, pour relever les défis actuels et futurs liés principalement à la relance de l’économie nationale, la refonte des secteurs sociaux, la redynamisation de l’emploi… Le Maroc s’attend également à un nouveau modèle de développement, qui constituera un cadre de référence pour les différents acteurs appelés à mettre en œuvre de nouvelles politiques publiques. C’est là que le bât blesse. Reconsidérer le modèle de développement du Maroc, pour le mettre en phase avec les évolutions que connait le pays nécessite de nouvelles méthodes de travail et des approches novatrices.
Ce n’est donc pas un hasard si la Commission spéciale chargée d’élaborer le nouveau modèle de développement comptait parmi ses rangs des jeunes. Ce n’est pas un hasard non plus si cette Commission a tenu, dans le cadre de ses rencontres de concertation, à ce que les jeunes de toutes obédiences et sensibilités aient leur mot à dire. De ce fait, il est inconcevable que la jeunesse marocaine reste en marge des grands débats et défis nationaux. Il est inconcevable que les jeunes restent en marge des grands débats nationaux. Les partis politiques marocains devraient montrer leurs jeunes compétences plutôt que de les cacher, pour ne pas dire les mettre au placard. L’encouragement et la mobilisation des jeunes en politique, aura un effet certain sur leurs semblables qui croient, par la force des choses, que ce domaine n’est pas fait pour eux.
Un constat sans appel!
Dans une récente étude sur la place des jeunes dans les partis politiques, le Haut-Commissariat au Plan (HCP), a indiqué que la jeunesse marocaine se désintéresse de plus en plus de la politique. Le HCP a souligné que les partis politiques n’arrivent plus à séduire les jeunes. Du coup, le fossé ne cesse de se creuser entre les deux parties. Sur le terrain, les mêmes statistiques ont fait savoir que seuls 1% des jeunes exercent la politique au sein des partis. Et le Haut-Commissariat, dirigé par Ahmed Lahlimi, de faire remarquer que le nombre de jeunes qui s’expriment sur les réseaux sociaux ne cesse de croitre, alors que lors des manifestations partisanes, leurs interventions se font de plus en plus rares. Ce constat s’explique notamment, par le refus de la plupart des leaders politiques marocains, de céder la place aux jeunes, outre le fait qu’ils ne balisent pas assez la voie devant la nouvelle génération, pour s’épanouir politiquement et se préparer à prendre la relève au sein des différentes formations politiques que compte le Royaume. Ce facteur de vieillissement des acteurs politiques constitue la principale raison de cette désaffection des jeunes pour la politique.
L’Etat ne ménage aucun effort pour permettre aux jeunes d’accéder aux postes de responsabilité politique. Ces mesures ont permis à un grand nombre de jeunes de moins de 35 ans, d’accéder au Parlement. Ces mesures, certes, sont louables, mais le plus gros du travail doit être réalisé par les partis politiques.
Mohcine Lourhzal
Micro-trottoir
Entre ceux qui ne se sentent pas concernés et ceux qui souhaitent s’engager mais ne trouvent pas un terrain propice, la perception des jeunes de l’action politique diffère en fonction des expériences des uns et des autres. Pour y voir plus clair, le Reporter a approché de jeunes casablancais. Leurs réponses expriment, toutes, les mêmes idées, que l’on retrouve globalement dans ces 3 avis.
Youssef K. Etudiant
«La politique est devenue un métier»
«Très peu de leaders politiques sont issus de la classe ouvrière où ont déjà été simples employés. Pourtant, ces deux catégories constituent la majorité des Marocains. Comment voulez-vous que je fasse confiance à des personnes qui ne partagent pas les mêmes préoccupations que moi. La politique est devenue un métier réservé à des acteurs issus des catégories supérieures de la population».
Yassine A.
«Je ne crois plus à cette histoire de rajeunissement des élites au Maroc»
«J’ai été membre d’un parti connu sur la scène nationale. Malheureusement, je n’ai jamais eu l’occasion de gravir les échelons de la hiérarchie partisane. Dans la plupart des partis politiques, être jeune est synonyme d’exclusion, sauf pour ceux et celles qui font preuve de fausse modestie pour recevoir des éloges et monter en grade. Personnellement, je ne crois plus à cette histoire de rajeunissement des élites au Maroc».
Imane Y.
«L’expérience de nos aînés est une richesse pour les jeunes mais… »
«La concrétisation du futur modèle de développement pose avec acuité le problème des profils qui prendront en charge la transition économique et sociale du pays. Nous vivons une véritable crise liée au refus des élites actuelles, de donner l’opportunité à la nouvelle génération pour montrer ce dont elle est capable, sans préjugés ni jugements de valeur. Le Maroc a besoin d’un changement de mentalités pour pouvoir valoriser sa jeunesse».