De la région de l’Oriental où il est à pied d’œuvre depuis une semaine, lançant de grands projets structurants et une kyrielle de projets socio-économiques, destinés à affranchir cette région de la double fatalité de l’enclavement et de la contrebande, SM Mohammed VI a dépêché un émissaire auprès du Secrétaire Général de l’ONU.
L’émissaire, Taïb Fassi Fihri, ex-ministre des Affaires étrangères et actuel Conseiller du Roi, devait remettre ce 26 juin à Ban Ki-Moon, un message royal portant sur «l’évolution de la question du Sahara marocain».
A l’issue de l’audience, qui a eu lieu au siège des Nations unies à New York, un communiqué a fait savoir que «Le Secrétaire général a exprimé sa reconnaissance vis-à-vis du soutien apporté par SM le Roi Mohammed VI et le gouvernement du Maroc aux efforts des Nations unies visant à trouver une solution au différend autour du Sahara» ; que Ban Ki-Moon a «appelé le Maroc à continuer de travailler avec son envoyé personnel, Christopher Ross, ainsi qu’avec la Minurso» ; et qu’il a «souhaité que les relations bilatérales entre le Maroc et l’Algérie continuent de s’améliorer».
L’information officielle se limite à cela. Aucune autre précision n’a été apportée. Mais un émissaire portant un message royal au Secrétaire général de l’ONU, n’est pas un fait courant.
Contrairement au Polisario dont les envois de courriers et rapports, au secrétariat général des Nations Unies, se font à tout bout de champ, le Maroc n’a recours à cette voie diplomatique (messages et émissaires) que lorsqu’il est acculé à employer les grands moyens.
Les «fuites» habituelles ne manqueront sans doute pas d’apporter, dans les prochains jours, un plus grand éclairage sur cette initiative (Christopher Ross doit d’ores et déjà avoir été bombardé de coups de fil)…
En attendant, le Secrétaire général de l’ONU est bien seul à constater une amélioration dans les relations bilatérales entre le Maroc et l’Algérie (amélioration qui devrait se poursuivre, dit le communiqué).
Au Maroc, si les milieux politiques ignorent la presse algérienne et ses virulentes attaques contre le Maroc –tout simplement parce qu’ils ne la lisent pas- ils sont, par contre, extrêmement attentifs aux déclarations des responsables algériens.
Ainsi, lorsque le premier ministre algérien, Abdelmalek Sellal, prend la parole devant tous les membres des délégations participant au 21ème sommet de l’Union africaine, fin mai dernier, pour leur dire que leurs «grandes victoires» «attendent d’être couronnées par le parachèvement de la décolonisation du continent à travers l’exercice par le peuple du Sahara, de son droit inaliénable…», le propos est accueilli à Rabat comme une indéniable confirmation de la poursuite des hostilités. D’autant que Abdelmalek Sellal apparaît, de plus en plus, comme le possible successeur du Président Bouteflika au palais d’Al Mouradia.
Une chose est sûre, pour le Maroc, le dossier du Sahara n’est rien d’autre que celui de son intégrité territoriale. Il compte donc mettre tous les moyens qu’il faut pour le défendre et ne s’en cache pas.
La récente mobilisation -par et autour du Roi- à l’occasion de l’examen, par le Conseil de Sécurité, du rapport annuel sur l’évolution de la question du Sahara et du renouvellement du mandat de la Minurso, en avril dernier, l’a bien démontré.
L’initiative royale de cette semaine s’inscrit dans le même sillage.
Quant à l’amélioration des relations algéro-marocaines, elle ne tient qu’à l’Algérie, pensent les Marocains à l’unanimité. L’Algérie à qui il est reproché de ne cesser d’attiser le feu entre le Maroc et ses enfants Sahraouis dont elle persiste à vouloir faire un peuple distinct du peuple marocain.
Ban Ki-Moon peut donc émettre les vœux qu’il veut, hélas, on ne semble pas près de les voir exaucés.
PS : Deux nouveaux éléments se sont ajoutés à cela.
1 – Même à Moscou où il effectuait une visite, le 25 juin, le ministre algérien des affaires étrangères, Mourad Medelci, n’a pas épargné le Maroc. Il a déclaré à une chaine TV russe que l’Algérie est «presque visée» par le Maroc en matière de trafic de drogue. Toute la question est dans le «presque»…
2 – Exaspéré par les accusations et déclarations officielles algériennes, le Maroc a réagi mercredi 27 juin. Un communiqué du ministère des Affaires étrangères a d’abord rappelé que le porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères a récemment assorti la normalisation des relations bilatérales et la réouverture des frontières terrestres entre les deux pays de trois conditions, qualifiées d’«infondées» et «incompréhensibles», avant d’indiquer que le Royaume du Maroc «ne peut que dénoncer, vigoureusement, l’esprit et la lettre de ces déclarations et regretter vivement ces positions anachroniques dans leur démarche et injustifiées dans leur substance». Soulignant que ces trois conditions appellent «les réserves les plus fortes et les interrogations légitimes du Maroc», le communiqué a précisé que si les deux premières sont des allégations portant sur une prétendue «campagne de dénigrement menée par des cercles officiels et non officiels marocains contre l’Algérie» et sur une «coopération effective du Maroc pour arrêter les flux de trafics, notamment de drogues», la troisième est «plus grave» et confirme que «l’Algérie place la question du Sahara au coeur de la relation bilatérale».
Le communiqué a ensuite déploré le fait que «l’Algérie rompt unilatéralement un accord, convenu au plus haut niveau et réitéré à maintes reprises, de découpler la gestion du dossier du Sahara marocain de l’évolution des relations bilatérales», faisant remarquer que, depuis la décision commune d’organiser des rencontres ministérielles visant à une normalisation bilatérale, «le Maroc a respecté pleinement l’approche préconisée, protégeant le processus bilatéral et laissant parallèlement et distinctement les deux pays défendre leurs points de vue respectifs sur la question du Sahara marocain». Ajoutant que «le Maroc prend, aujourd’hui, à témoin la communauté internationale face à cet énième reniement par l’Algérie des engagements pris et à ce nouveau revirement par rapport aux approches convenues», il a conclu: «personne n’a le droit de prendre en otage le destin d’une population. Rien ne saurait justifier un tel acharnement contre les aspirations des deux peuples frères, notamment leur droit reconnu à la libre circulation».