Nombreux sont ceux qui se demandent pourquoi le Maroc réagit aujourd’hui, avec une telle fermeté, aux incursions du Polisario dans les zones tampons à l’Est du dispositif de sécurité, alors que ces incursions se sont multipliées tout le long des années précédentes.
Cela fait, en effet, des années que le Polisario qualifie Bir Lahlou de «territoires libérés», qu’il y entre et en sort comme il veut, qu’il prétend émettre des programmes radiophoniques et signer ses communiqués à partir de cette zone tampon. C’est aussi à Bir Lahlou qu’il a enterré son 1er chef, Mohamed Abdelaziz. Et c’est même là qu’en mars 2016, il avait accueilli l’ex-Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon.
Certes, le Maroc n’a jamais accepté ces faits, s’évertuant à rappeler aux différents représentants de l’ONU (Conseil de sécurité, Secrétariat général, Minurso) ses positions claires sur tout ce qui concerne l’ensemble du territoire du Sahara. L’escale de Ban Ki-moon à Bir Lahlou avait soulevé un tollé et constitué le point de rupture entre le Maroc et l’ex-Secrétaire général onusien…
Mais, la réaction de ce début avril 2018 se distingue nettement par la fermeté de ton de toutes les voix autorisées du Maroc: du Représentant Permanent auprès des Nations Unies, Omar Hilale, au ministre des Affaires étrangères, Nasser Bouritta, en passant par le chef de Gouvernement, Saad-Eddine El Othmani, ou encore le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit… Sans oublier les présidents des deux Chambres du Parlement, Habib Malki et Hakim Benchemmas, les chefs des partis politiques -représentés ou non au Parlement- les secrétaires généraux des syndicats… C’est la 1ère fois que le «Casus belli» est officiellement évoqué par la partie marocaine, qui plus est dans une correspondance à l’ONU !
Pourquoi cette réaction inédite ?
Les explications les plus farfelues ont été avancées… Les plus pernicieuses aussi.
Pourtant, les choses sont claires. Il y a une goutte qui a fait déborder le vase. Tant que les incursions étaient épisodiques et la présence du Polisario symbolique, le Maroc protestait sans plus, sans jamais se départir de sa retenue et sans cesser de répéter qu’il plaçait toute sa confiance dans le processus onusien. Mais les provocations du Polisario sont allées crescendo, ces dernières semaines. Omar Hilal les a énumérées dans le courrier adressé au Conseil de sécurité et Nasser Bourita les a portées à la connaissance de l’opinion publique marocaine, avant d’entamer une tournée à l’international, pour informer de la position du Maroc. Les diplomates marocains ont rapporté qu’à Mahbes, «plusieurs éléments armés du Polisario se sont introduits dans cette zone, à bord de véhicules militaires et y ont dressé des tentes, creusé un fossé et érigé des constructions à l’aide de sacs de sables». Lors de son point de presse, le porte-parole de l’ONU, Stephan Dujarric, dont l’impartialité est fortement mise en doute par l’opinion publique marocaine, a déclaré que «la Minurso n’a observé aucun mouvement d’éléments militaires sur le territoire du Nord-Est». Sans doute, l’incursion d’une dizaine d’hommes armés ne constitue-t-elle pas, à ses yeux, ni à ceux de la Minurso, un «mouvement d’éléments militaires». Mais le Maroc n’est pas tenu d’attendre qu’une centaine de blindés se déploie sur les zones-tampons pour alerter la communauté internationale ! Encore que ce ne soit pas là la goutte qui ait fait déborder le vase…
Ce qui a fait déborder le vase, c’est l’annonce faite par le Polisario de son intention de «transférer les locaux de certaines de ses structures administratives et militaires, des camps de Tindouf en Algérie, où ils ont toujours été établis depuis le début du différend en 1975, vers la zone située à l’Est du dispositif de sécurité au Sahara Marocain, dont font partie les localités de Bir Lahlou et de Tifariti», comme l’ont clairement dit Omar Hilal et Nasser Bourita.
Le Polisario et son créateur algérien, inspirés sans doute par un certain transfert de capitale (qui a récemment soulevé un tollé mondial), ont pensé pouvoir reproduire le fait accompli dans la zone-Est du dispositif de sécurité du Sahara. (A rappeler à ceux qui font la confusion, qu’il n’est pas question de la zone-tampon de Guergarate qui se trouve à l’extrême sud du Sahara et où le Polisario impose déjà sa présence, mais de la zone–tampon de Bir Lahlou, qui est au Nord-Est, non loin des camps de Tindouf).
Fermer les yeux sur le transfert des structures du Polisario à Bir Lahlou, c’est acter l’existence des prétendus «territoires libérés» et renoncer à ces zones-tampons que le Maroc avait confiées à l’ONU, lors de l’accord de cessez-le feu de 1991. C’est donc changer le statut juridique et historique de ces zones, alors que le dossier du Sahara est un tout indivisible. C’est ce qu’a rappelé Omar Hilal dans son courrier. Le déplacement de toute structure civile, militaire, administrative ou de quelque nature que ce soit, du Polisario, des camps de Tindouf en Algérie, vers l’Est du dispositif de sécurité au Sahara marocain, constitue un casus belli, a écrit l’ambassadeur du Maroc auprès de l’ONU au Président du Conseil de sécurité. Et tout le pays l’a réaffirmé et continue de le réaffirmer, depuis ! Car s’il est une question sur laquelle le front intérieur est le plus large et le plus solide qui soit, c’est bien celle du Sahara. La raison en est simple: c’est une question d’intégrité territoriale. Et pour les Marocains, cette cause est sacrée. Quant au Polisario, les Marocains –même dans les couches les plus populaires- pensent qu’il a bien de la chance d’avoir, face à lui, un Maroc, «bon élève de l’ONU», attaché au droit international et qui prend son mal en patience, malgré tout ce que ce choix lui impose. D’autres, ailleurs, ne s’embarrassent pas d’autant de scrupules. Il n’est que de voir ce qu’il advient des kurdes. La Turquie ne se contente pas de les pourchasser chez elle. Elle les bombarde en territoire voisin. Et là, le droit international s’efface devant la force et les alliances… Alors que, dans le dossier du Sahara, c’est à qui tordra le mieux le bras du Maroc !
Bahia Amrani
L’article ne vaut que par sa conclusion. Vous rêvez de bombarder les sahraouis en territoire occupé et même chez le voisin. Territoire occupé parce qu’aucun pays au monde ne reconnaît votre souveraineté sur le Sahara occidental. Vous pouvez peut être les bombarder chez eux mais chez le voisin c’est un peu plus compliqué. Voyez vous à l’est ce n’est ni la Syrie ni l’Irak exsangues. C’est un peu plus costaud. Y a des risques voyez vous et des mauvaises surprises…