Le projet de résolution, proposé le 9 avril dernier par Susan Rice, la représentante permanente des Etats Unis auprès de l’ONU, qui prévoyait d’élargir le mandat de la MINURSO au contrôle des droits de l’homme au Sahara, a finalement été retiré.
Cette décision, qu’apparemment Mme Rice a prise seule, a suscité de vives réactions. Celles du Maroc, bien sûr, qui était prêt à tout pour défendre son intégrité territoriale et sa souveraineté et qui n’a eu de cesse d’expliquer que le prétexte des droits de l’homme n’était qu’une instrumentalisation à laquelle avaient, depuis longtemps, recours ses adversaires.
L’avant-projet de Susan Rice a également été fraîchement accueilli par quelques membres du «Groupe des Amis du Sahara» qui comprend les États-Unis, certes, mais aussi la France, la Russie, la Grande-Bretagne et l’Espagne. Ces membres –précisément la France et l’Espagne- n’ont pas compris que la diplomate américaine ait pris une telle initiative sans les consulter, alors que toute décision concernant le Sahara devrait, en principe, être préalablement débattue au sein de ce groupe.
Enfin, ce qu’a entrepris Susan Rice a sorti de ses gongs le Pentagone dont les responsables n’ont pas hésité à déclarer publiquement qu’ils n’avaient pas été informés de la démarche de la représentante américaine à l’ONU.
Mais après 15 jours de tension, course diplomatique et fermes négociations, Susan Rice, les diplomates marocains et ceux des pays membres du «Groupe des Amis du Sahara» sont tombés d’accord. L’avant-projet contesté sera retiré.
Tant mieux pour les relations du Maroc avec les Etats Unis, pays considéré comme un allié stratégique, comme viennent de le rappeler des responsables américains.
Tant mieux aussi pour les relations du Maroc avec les pays membres du «Groupe des Amis du Sahara» auprès desquels le Souverain a dépêché des émissaires, ainsi qu’auprès de tous les membres permanents du Conseil de Sécurité.
In fine, le Maroc a su faire entendre sa voix. Ce qui n’est pas peu.
Mais si cette affaire a permis au Maroc de préciser ses «lignes rouges» quant à d’éventuelles concessions sur la question du Sahara, elle lui a aussi permis de prendre conscience de la mobilisation de ses adversaires, de leur organisation méthodique (et peut être sous-estimée), comme de la duplicité de certains d’entre eux…
Aujourd’hui, c’est clair, dans cette guerre du Sahara, il y a plusieurs guerres. Nous pourrions longuement épiloguer sur toutes ces guerres et sur celles d’entre elles que le Maroc ne gagne pas. Nous pourrions aussi nous arrêter sur ce qu’il faudrait faire pour fermer, un à un, tous les fronts ouverts dans ce conflit. Mais ce ne sera pas le propos.
Ce qui a scandalisé, sidéré et révolté, par-dessus tout, nombre de Marocains, c’est la féroce guerre médiatique que l’Algérie a livrée au Maroc, toutes composantes confondues. Grace à l’observatoire marocain de la presse algérienne (OMPA), une revue de presse régulière et complète, informait qui voulait s’informer de ce qu’écrivaient les médias algériens sur l’affaire du Sahara. Et ce qu’ils écrivaient était d’une violence inouïe. C’était un déchaînement total, une hystérie collective, une surenchère de mauvaise foi, de fourberie et de provocations. Quand un média va jusqu’à suggérer à ses lecteurs que le Roi du Maroc a annulé l’African Lion 2013 (manœuvres militaires conjointes maroco-américaines qui étaient prévues à Agadir et qui ont en effet été reportées sine die par la partie marocaine) pour rappeler ses soldats dans la perspective d’une guerre contre l’Algérie, comment peut-on qualifier cela ? Et ce n’est qu’un exemple… Tous les éditorialistes d’Alger, ont célébré, chacun à sa manière, ce qu’ils ont appelé «la gifle américaine au Palais et à la diplomatie marocaine» et ce qu’ils ont pensé être «la fin de la relation» stratégique du Maroc avec les Etats Unis… Tous ont rivalisé d’idées pour accabler le Maroc sur la question des droits de l’homme, comme s’il s’agissait vraiment de cela et comme si l’Algérie était la plus grande démocratie du monde (ou même de la région). Et, lorsque la diplomatie américaine s’est rétractée, les attaques ont redoublé, n’ayant d’égal que la rage et le dépit qui les inspiraient. Un échantillon de ce qui s’est écrit ? Voici des extraits des commentaires du journal «El Watan» qui se veut indépendant… «Le lobbying marocain dans les travées des Nations unies semble avoir porté ses fruits, poussant les Etats-Unis à changer leur fusil d’épaule», écrit ce journal mercredi 24 avril. «Le Maroc peut désormais se frotter les mains de pouvoir pratiquer son sport national qui consiste à casser du Sahraoui, sans craindre d’être dénoncé et encore moins sanctionné par une Minurso désarmée. En maintenant cette mission dans un rôle de faire-valoir, les Etats-Unis, la France et l’Espagne notamment auront renouvelé le feu vert aux forces de sécurité marocaines», persifle le journal qui poursuit, rageur: «Rabat, qui avait rejeté catégoriquement des initiatives visant à dénaturer le mandat de la Minurso, aura donc obtenu gain de cause, sans coup férir (…) Il a fallu que le roi reporte un exercice militaire conjoint à Agadir pour que l’Oncle Sam décide de revenir à de meilleurs sentiments». Et d’envoyer le venin: «Mais en réalité, les Etats-Unis sont très soucieux de la stabilité de la monarchie chancelante en proie à une grave crise économique couplée à une corruption endémique du makhzen. Un rapport de l’institut de recherche du Congrès publié le 14 avril souligne le souci de l’Administration américaine de l’équilibre du régime de Mohammed VI. Le royaume de M6 est considéré comme un allié principal dans la région, un partenaire-clé dans la lutte contre le terrorisme et joue un rôle important au Moyen-Orient». La monarchie chancelante ? On aurait juré que c’est à Alger que le pouvoir fossilisé est chancelant, avec des signes qui ne trompent pas… Comme la lutte de pouvoir entre le DRS et Bouteflika, qu’a récemment rappelée l’affaire Sonatrach et Chekib Khalil ; ou bien la contestation des Kabyles ; ou encore les différents mouvements de contestation, au sud du pays et ailleurs… Mais l’adage sahraoui dit que le chameau ne voit jamais sa propre bosse ! Dommage que cette presse, qui à l’instar du régime, fonctionne encore selon les codes de la guerre froide, nous oblige à laisser le niveau intellectuel descendre si bas.