Aviv Kochavi
Le retrait annoncé de l’essentiel des forces américaines en Syrie change la donne pour Israël. Tel-Aviv va tout faire pour contrer l’influence de l’Iran désigné comme son ennemi principal.
Les Israéliens ont tenté, pendant des années, de ne pas se laisser entraîner dans la lutte directe contre Daech, cherchant à rester dans l’œil du cyclone. Cela semble de plus en plus difficile.
L’entrée en fonctions du nouveau chef d’Etat-major des armées israélien, Aviv Kochavi, a marqué le passage de l’Etat hébreu à une nouvelle politique en Syrie, écrit le quotidien russe Nezavissimaïa gazeta, bien informé sur la Syrie. Aviv Kochavi a pris ses fonctions de commandant de Tsahal, mardi 15 janvier. Pendant la cérémonie solennelle qui s’est tenue à Tel-Aviv, le Premier ministre israélien a de nouveau soulevé le thème de l’Iran, en suggérant à ce dernier et aux groupes affiliés déployés sur le territoire syrien de quitter les régions adjacentes aux frontières israéliennes. «Je leur suggère de partir rapidement, parce que nous poursuivrons notre politique offensive», a déclaré le chef du gouvernement.
L’Etat hébreu a affiché une approche conceptuelle nouvelle dans sa campagne en Syrie. Ainsi, dans une interview aux médias britanniques, l’ancien commandant de Tsahal, Gadi Eizenkot a réaffirmé que son pays aidait l’opposition syrienne, au sud de la Syrie, avec de l’argent et des armes. Un peu plus tôt, Benjamin Netanyahu avait reconnu qu’Israël était l’auteur d’une frappe de missiles contre le territoire syrien. Jusque-là, l’Etat hébreu s’était efforcé de cacher son implication dans de telles opérations.
Pour Le Figaro, le risque de l’escalade est clairement assumé.
L’aviation israélienne a mené, lundi 21 janvier, des raids d’une rare intensité contre des positions iraniennes en Syrie. Ces attaques se sont accompagnées d’un changement de cap dans la politique de communication de l’Etat hébreu. Les Forces israéliennes de défense (IDF) ont rendu compte, sans tarder, de leurs activités dans le ciel syrien, alors qu’elles avaient observé le silence sur les centaines de bombardements effectués, depuis le déclenchement de la guerre en Syrie, contre des cibles militaires iraniennes ou contre la milice libanaise du Hezbollah, alliée de Téhéran. Les porte-parole de Tsahal ont détaillé les cibles visées avec une étonnante volonté de transparence.
L’armée israélienne a frappé des entrepôts d’armes, dont l’un était situé à l’aéroport international de Damas, une base de renseignement et un camp d’entraînement dans le sud. La dizaine de sites frappés appartiendraient à la force d’élite iranienne al-Qods, chargée des opérations extérieures du corps des Gardiens de la Révolution
Pour l’hebdomadaire Le Point, on peut parler d’une autre guerre de Syrie.
Si la guerre entre Bachar Al-Assad et ses opposants est sur le point de s’achever en Syrie, après huit ans d’un conflit dévastateur qui a fait plus de 360.000 morts et des millions de déplacés et que l’organisation Etat islamique a perdu son califat autoproclamé en 2014 à cheval entre l’Irak et la Syrie, une autre guerre redouble actuellement d’intensité au Levant. Elle oppose l’armée de l’air israélienne aux forces al-Qods, les combattants de la branche extérieure des Gardiens de la Révolution iraniens.
«L’aviation a porté hier soir un coup sévère contre des cibles iraniennes en Syrie après que l’Iran eut tiré de là-bas un missile vers Israël», a déclaré, ce lundi 21 janvier, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, lors de l’inauguration d’un nouvel aéroport près de la mer Rouge. «Nous ne laissons pas passer de tels actes d’agression, ni les efforts de l’Iran pour s’établir militairement en Syrie».
Une fermeté qui tranche avec l’inquiétude qu’a provoquée en Israël l’annonce surprise, il y a un mois, de Donald Trump de retirer ses forces spéciales (2.000 soldats) de Syrie, ouvrant un boulevard à la République islamique et à ses milices chiites. «Tous ceux qui se demandaient si Israël allait réagir contre l’Iran après les déclarations de Donald Trump ont leur réponse», souligne une source diplomatique.
A en croire le ministère russe de la Défense, cité par l’agence de presse officielle Spoutnik, c’est l’aviation israélienne qui aurait entamé les hostilités qui ont fait, d’après Moscou, quatre morts du côté de l’armée syrienne.
Le 17 septembre, un grave incident avait opposé les deux pays, lorsque l’incursion en Syrie de l’aviation israélienne avait déclenché des tirs de représailles de la DCA syrienne, qui avait abattu un avion militaire russe avec quinze passagers à bord. Dès lors, Moscou a accepté de livrer à Damas son système de missile S-300, plus avancé, compliquant la tâche de Tsahal en Syrie. Depuis, l’armée israélienne avait considérablement réduit ses opérations contre l’Iran en Syrie.
On est de toute évidence entré dans une nouvelle phase d’une «drôle» de guerre en Syrie.
Patrice Zehr