Les gisements d’opportunités offertes par la crise du covid-19 en termes de transformation digitale ont été explorés, ce weekend, par des acteurs de l’écosystème digital marocain.
Réunis dans un webinaire initié par le laboratoire des recherches juridiques, politiques et économiques de la faculté polydisciplinaire de Taza, relevant de l’université Sidi Mohamed Ben Abdellah (USMBA), les intervenants ont échangé autour des ‘’enjeux de la transformation digitale pour le Maroc et impératifs post COVID 19’’.
Parmi tant de réflexions, une idée centrale a traversé les approches des uns et des autres : Comment saisir la ‘’chance’’ du Covid19 au Maroc pour basculer véritablement et définitivement vers la digitalisation ?
Pour le fondateur de la ‘’London Academy Casablanca’’, Samir Benmakhlouf, le Maroc doit absolument bénéficier de cette transformation digitale, que ‘’la pandémie nous a forcé à en emprunter le chemin’’.
Il est nécessaire aujourd’hui, a estimé cet expert en digital, de transformer notre système éducatif de telle sorte à s’adapter aux besoins de l’étudiant, en passant d’un système basé sur la mémoire à un apprentissage de réflexion utilisant le cerveau comme ‘’un processeur et non pas comme un disque dur !’’.
‘’Nous avons un rendez-vous avec l’histoire, qui est à portée de main, et il ne faut pas que nous le rations ‘’, a-t-il lancé, faisant observer que 44pc de métiers qui existent aujourd’hui vont disparaitre entre 2030 et 2040.
Et de s’interroger : ‘’Est-ce que nous préparons nos étudiants pour le futur ou le passé ?’’. Dès le moment, a-t-il ajouté, que ‘’nous connaissons les tendances dans le digital, la santé, l’environnement, les énergies et le climat, nous devons préparer nos jeunes pour les défis du futur’’.
Insistant sur l’impératif de saisir les opportunités du digital, ‘’en révisant nos programmes’’, l’expert a plaidé pour ‘’une autosuffisance de numérique’’.
Pour y arriver, Abdelkhalek Zyne, fondateur de l’agence ‘’Equity’’ et spécialiste en stratégie digitale, a une idée. ‘’Nous avons un millier de jeunes entreprises innovantes et presque cinquante incubateurs. C’est ce vivier-là qui va permettre au Maroc de pouvoir basculer véritablement dans la digitalisation’’.
A ses yeux, l’acquis le plus important de cette période est la prise de conscience. D’où l’importance, a-t-il souligné, de capitaliser sur les succès et construire une feuille de route, à même de combler le décalage entre cette génération numérique et le système éducatif qui reste relativement classique.
Pour Abdelkhalek Zine, le digital est conçu comme une ‘’rupture de paradigme’’, dans laquelle le rêve, la confiance et l’estime de soi ont une place fondamentale.
‘’Ces éléments ont permis aux Marocains d’inventer le respirateur artificiel en plein Covid. Ce +thinking+ a permis aux Marocains de transformer des chaînes de productions textiles aux chaînes de production de masques exportables à l’étranger’’, a-t-il ajouté, mettant aussi en relief l’importance de ‘’tester et d’expérimenter pour casser les barrières psychologiques’’.
Il a préconisé, à cet effet, d’opérer un aménagement numérique du pays pour ‘’ne pas creuser les faussés de l’exclusion’’, d’inventer une sorte de ‘’MarocainTech’’.
Mettant le curseur sur le rôle de l’Etat, M. Abdelkhalek Zine a estimé qu’aujourd’hui l’Etat a joué un rôle ‘’très important’’ en matière de digitalisation et de modernisation de l’administration, citant l’expérience des services de douane, des impôts ou encore des tribunaux.
L’expert en technologies de rupture, Khalid Machchate, a expliqué, lui, que la crise de Covid19 a poussé aussi bien les grandes entreprises que les petites à adopter une stratégie de digitalisation, qu’il a qualifiée de ‘’nécessaire’’, du moment que le digital s’est présenté comme un moyen pour diversifier le business modèle.
D’après lui, le changement est une question de +Mindset+, estimant que l’entreprise marocaine aujourd’hui doit voir la digitalisation comme ‘’une stratégie, un parcours’’.
‘’Il convient d’opérer, en amont de toute tentative de digitalisation de l’entreprise, un +change management+ à l’intérieur de chaque département en essayant d’inculquer, de convaincre, de persuader les collaborateurs de l’importance de changement et de faire du digital un outil de performance organisationnelle’’, a-t-il expliqué.
Pour M. Machchate, il faut créer un CVE de digital indépendant, mettre en place une stratégie massive de reconversion vers le digital et procéder à une mise à jour des compétences techniques et technologiques des personnes en charge des systèmes d’information dans les différents organismes publics ou privés.
La technologie de rupture ou disruptive a besoin des personnes et compétences mobilisées dans une logique d’objectifs, a-t-il insisté. D’où la nécessité de ‘’ne pas rater le dernier train de développement pour ne pas se retrouver dans la classe de ceux qui consomment ce que font les autres’’.
Il faut, en d’autres termes, un ‘’leadership fort’’ pour tirer cette stratégie vers le haut’’, a-t-il plaidé.
Une ambition partagée par le président de l’USMBA, Redouane Mrabet, qui a rappelé le rôle des acteurs de l’écosystème digital marocain (Agence de développement du digital, Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel, écoles d’ingénieurs…) dans l’accélération du rythme de cette transformation digitale à plusieurs niveaux.
‘’Nous devrons continuer à travailler de plus en plus avec les entreprises et avec toutes les organisations pour aller de l’avant dans cette transformation numérique et nous sommes à leurs écoutes pour adapter nos formations et orienter nos axes de recherches’’, a-t-il souligné.
M. Mrabet a assuré que l’Université ‘’va se transformer’’, plus rapidement, pour que cette évolution numérique se fasse dans l’intérêt du Maroc et de ses entreprises.
Les débats de ce séminaire à distance ont été articulés autour de trois axes majeurs, en l’occurrence ‘’comprendre pour agir : cadre général, concepts et tendances’’, ‘’les enjeux clés du digital : opportunités, risques et les limites’’ et ‘’les perspectives et les enjeux de digital pour le Maroc Post Covid19’’.
LR/MAP