Le Maroc commémore le 10 décembre de chaque année la journée internationale des droits de l’homme. Le 10 décembre 1948, les membres des Nations unies ont adopté la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, en s’accordant sur les principes permettant aux êtres humains de vivre dans la liberté, l’égalité et la dignité.
Le Maroc, qui a ratifié cette Déclaration, s’est engagé à respecter les principes des droits de l’Homme reconnus universellement. La question se pose: Où en est le Maroc ?
En effet, le Maroc a ratifié un grand nombre de conventions relatives aux droits de l’Homme, telles les Conventions de Genève (1956), la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide (1958), la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (1969), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1979), la Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants (CAT – 1993), la convention sur l’élimination de toute forme de discrimination à l’encontre des femmes (CEDAW – 1993), la convention sur les droits de l’enfant (CRC – 1993) et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (ICRMW – 1993).
Il en va de même de la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant (CRPD – 2009), la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (2013), ainsi que le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture (2014).
Aussi, le Maroc s’est engagé à respecter les principes des droits de l’homme reconnus universellement, comme cela a été prévu dans toutes ses Constitutions, depuis celle de 1992. Il est en particulier énoncé dans le préambule de la Constitution du 1er juillet 2011: «le Royaume du Maroc, membre actif au sein des organisations internationales, s’engage à souscrire aux principes, droits et obligations énoncés dans leurs chartes et conventions respectives, il réaffirme son attachement aux droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus».
Ces principes de droits de l’Homme sont davantage renforcés par les dispositions de la nouvelle Constitution 2011. Le premier chapitre de cette Constitution sous le titre: «libertés et droits fondamentaux» consacre 22 articles garantissant les droits des citoyens marocains, tandis que le deuxième chapitre sous le titre «institutions et instances de protection des droits et libertés, de la bonne gouvernance, du développement humain et durable et de la démocratie participative», est consacré aux institutions constitutionnelles dont la mission est de protéger ces différents droits dorénavant constitutionnels.
Dans ce contexte, on se demande si le Maroc a rempli ses obligations internationales et constitutionnelles en matière de respect des principes des droits de l’homme.
Il est vrai de dire que la situation des droits de l’homme au Maroc s’est nettement améliorée depuis les années 90. Le Maroc a réalisé d’importantes avancées axées sur la consolidation et la promotion des droits et libertés. Et ce, à travers la modification et l’amélioration de son arsenal juridique national pour qu’il soit harmonisé avec les conventions internationales ; et la création des institutions œuvrant dans le domaine de la promotion et la protection des droits de l’Homme, avec en tête le Conseil Consultatif des Droits de l’Homme.
D’autant plus que le Maroc a connu, en 2004, des événements remarquables: la grâce accordée aux prisonniers politiques; la création de l’Instance Equité et Réconciliation pour enquêter sur des violations graves des droits de l’Homme passées entre les années 1956 et 1999 et réaliser la réconciliation afin d’envisager l’avenir à la lumière des recommandations de cette instance.
Sans oublier que le Maroc a fait de nombreuses réalisations dans la promotion des droits des femmes. Depuis Son accession au Trône, le Roi Mohammed VI mène un processus remarquable de modernisation du statut de la femme marocaine ; comme il a souligné dans plusieurs Discours la nécessité de promouvoir le rôle des femmes et d’ouvrir les perspectives de leur participation dans les centres de prise de décision et dans les institutions représentatives.
L’une des lois importantes en faveur des droits des femmes marocaines, le code de la famille, qui a été annoncée en 2003, est l’une des premières initiatives d’adoption de leurs droits. Cette loi était considérée comme «Une révolution sociale et législative».
Sans oublier de saluer les multiples réformes initiées par le Maroc en vue de promouvoir les droits de la femme et d’œuvrer pour son autonomisation. Citons le code de la nationalité, la scolarisation des filles, l’accès des femmes aux postes de décision, l’adoption de l’approche genre dans tous les domaines et des programmes de lutte contre la violence à l’égard des femmes, la ratification de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et de la levée des réserves la concernant, ainsi que de l’institution de l’égalité, la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination dans la Constitution de l’année 2011.
Ce processus est couronné en 2017 par la décision du Roi Mohammed VI de charger le ministre de la Justice d’ouvrir aux femmes la profession d’Adoul, et de prendre les mesures nécessaires pour réaliser cet objectif. Cette décision confirme bien le haut niveau de formation et de culture scientifique acquis par la femme et de la qualification, la compétence et la capacité dont elle a fait preuve dans les différentes hautes fonctions qu’elle a assumées.
Mais, malgré ces réformes remarquables, nous constatons encore, une présence modeste de la femme marocaine, aussi bien dans les postes de prise de décision (postes de responsabilité dans l’administration publique, fonctions gouvernementales…), ou dans les institutions représentatives (Parlement et Collectivités territoriales), ou encore dans les partis politiques entant que dirigeante.
Cette réalité incompatible avec le statut avancé de la femme, comme nous l’avons constaté, est liée à la nature de la société. La mentalité masculine prévaut toujours, donnant la priorité aux hommes en tant que leaders sociaux et politiques et en tant qu’individus ayant des capacités plus fortes que les femmes pour gérer les affaires publiques et occuper des postes de direction.
L’accès des femmes aux postes de décision ou aux institutions représentatives est parfois très difficile et complexe, malgré la rhétorique selon laquelle les partis politiques soutiennent cette question, qui reste parmi les défis les plus majeurs confrontés aujourd’hui par la femme. C’est un indicateur du degré d’égalité entre les sexes.
D’autre part, les associations de défense des droits de l’homme, aussi bien nationales qu’internationales, ont toujours soulevé les questions relatives aux droits sociaux, auxquelles le gouvernement doit donner la priorité.
D’après les enquêtes du Haut-Commissariat au Plan, trois domaines -Santé, éducation et emploi- souffrent d’insuffisances malgré les efforts déployés.
Concernant la santé, plus de la moitié des Marocains revendiquent la gratuité, la qualité des services et la proximité des établissements comme facteur indispensable à leur satisfaction. S’agissant de l’éducation, ils soulignent également la proximité des centres et la qualité de l’enseignement. En ce qui concerne l’emploi, aussi, plus de la moitié de la population active dit ne pas être satisfaite de son emploi et de son revenu. En plus du taux de chômage important enregistré Chez les jeunes diplômés.
C’est pour ces raisons, et d’autres, que vient l’idée de rénover le modèle de développement national pour concevoir un nouveau modèle mieux adapté aux évolutions et fixer des mesures concrètes pour répondre à toutes les attentes des citoyens, satisfaire leurs besoins, réduire les disparités sociales et les écarts territoriaux et réaliser la justice sociale et spatiale porteuse d’espoir et d’égalité pour tous.
En conclusion, le Maroc a réalisé un progrès et des acquis considérables en matière de promotion et de défense des Droits de l’Homme, surtout sous le règne du Roi Mohammed VI, qui témoignent de l’existence au Maroc d’une forte volonté de consolider un Etat de droit.
Enfin, je souligne que le respect des droits humains exige davantage d’efforts et de progrès au niveau des réformes législatives, de la mise en application des lois et des droits énoncés dans la Constitution, ainsi que de la diffusion de la culture des droits de l’homme.
Sans oublier de souligner que le Maroc figure parmi les cinq pays en tête du classement du Comité des droits de l’homme des Nations Unies concernant la mise en œuvre de certaines recommandations prioritaires au titre de l’année 2019.
Par Khalid Cherkaoui Semmouni, ex-président du Centre Marocain des Droits de l’Homme
LR