La décision du Président américain, Donald Trump, de reconnaître Al-Qods/Jérusalem capitale d’Israël a, certes, soulevé une vague d’indignation de par le monde. Et puis…?
Le Conseil de sécurité, l’Union européenne, la Ligue arabe, ainsi que de nombreux pays, chefs d’Etats, personnalités… ont rejeté cette reconnaissance.
Des voix se sont élevées (notamment de la Ligue arabe) pour appeler les Etats Unis à revenir sur cette décision.
SM Mohammed VI, en sa qualité de Président du Comité Al-Qods, a fermement condamné cette décision avant même qu’elle ne devienne officielle ; et s’est directement adressé au Président Trump l’exhortant de ne pas franchir le pas… De même qu’il a adressé un message au Secrétaire général de l’ONU, le priant d’intervenir…
Mais faisant fi de toutes les sollicitations et mises en garde, Donald Trump a fait ce qu’il a dit vouloir faire et annoncé que les Etats Unis reconnaissaient Jérusalem comme capitale d’Israël, en même temps qu’il ordonnait le transfert de l’ambassade américaine en Israël, de Tel Aviv à Jérusalem.
Et maintenant ?
Tous ceux qui mettaient en garde Trump contre la décision qu’il allait prendre lui prédisaient un embrasement de la région.
Il y a eu, en effet, de nombreuses manifestations. Dans les territoires-même (Cisjordanie et Gaza), mais aussi dans plusieurs capitales arabes et musulmanes (hormis à Alger où toutes les manifestations sont interdites, quelle qu’en soit la raison). Il y a eu 4 morts dans les rangs palestiniens (2 en Cisjordanie et 2 à Gaza). Les Arabes, les musulmans et de nombreux chrétiens –pour lesquels Jérusalem est aussi leur ville sainte, puisqu’elle abrite le Saint-Sépulcre (tombeau du Christ)- sont toujours sous le choc.
Cependant, le monde entier est bien conscient qu’il a été mis devant le fait accompli. Et que personne, aujourd’hui, n’a les moyens de faire faire machine arrière aux Etats Unis.
Aucune riposte ne serait assez forte pour être dissuasive… Il faut bien en convenir.
La rue ne décolère pas, mais les manifestations ne peuvent durer éternellement. Et puis, quel est leur impact sur Donald Trump et les dirigeants d’Israël qui ne se soucient ni de l’avis de la communauté internationale, ni des résolutions de l’ONU ? (Voir la suite de notre dossier)
Les seules manifestations qui peuvent préoccuper Netanyahu sont celles qui ont lieu dans les territoires. Mais, face à l’armée israélienne, surarmée et n’hésitant ni à tirer à balles réelles, ni à pilonner Gaza au moindre projectile parti de la Bande, les pierres des manifestants palestiniens n’ont aucune chance ! Les Palestiniens eux-mêmes en sont conscients. Indépendamment des désaccords qui les minent, c’est bien ce constat qui affaiblit leur mobilisation. Leur dilemme est simple: se résigner en attendant une hypothétique action politique ; et donc faire profil bas ; ou s’insurger jusqu’à la mort, avec la menace d’un nouveau décembre noir dans la Bande de Gaza… Le choix semble avoir été fait. L’Intifada de ce décembre 2017 est loin d’être celle tant redoutée la veille de l’annonce de Donald Trump.
Tout, hélas, semble donner raison au Hezbollah dont le chef, Hassan Nasrallah, a déclaré qu’Israël et les Etats Unis ne croient qu’à la force. L’illustration de ce constat a été faite cette semaine. Face aux Arabes, musulmans et Palestiniens dépourvus de capacité de dissuasion, l’administration Trump a foulé aux pieds les négociations de paix qui devaient en principe permettre aux deux parties (Israéliens et Palestiniens) de chercher un accord sur Jérusalem. Dans le même temps, face à la force nucléaire, désormais évidente, de la Corée du Nord, la même administration Trump, par la voix du Secrétaire d’Etat Rex Tillerson, propose au chef d’Etat coréen, Kim Jong-un… Des négociations sans conditions préalables, même s’il n’y était question que d’échange autour du temps qu’il fait ou de la forme, ronde ou carrée, de la table des négociations ?! Voilà le message que les Etats Unis envoient au monde. Et voilà comment ils s’en font haïr. Pourtant, ils pourraient avoir le meilleur rôle et entrer dans l’Histoire par la grande porte, tout en reconnaissant Jérusalem comme capitale d’Israël. Il suffirait de préciser qu’il s’agit de Jérusalem-Ouest et d’ajouter que Jérusalem-Est, Al Qods acharquia, est reconnue capitale de l’Etat palestinien dont les frontières définitives seront fixées par les négociations de paix entre les deux parties. Les Palestiniens ne reconnaissent pas tous ce partage, mais c’est celui des «deux Etats» que la communauté internationale soutient, Etats arabes et musulmans compris et qui est le plus rationnel.
Aucune solution qui n’irait pas dans ce sens n’aurait de chance d’aboutir. Quant à la riposte, la partie n’est sûrement pas finie.
Bahia Amrani