Le conflit israélo-palestinien détermine largement toute recomposition du Moyen-Orient et donc toute chance de paix durable dans le monde.
La présidence Obama a été sur ce dossier très décevante, sinon inexistante. Avec Trump, cela devrait changer, mais dans quels sens?
Donald Trump semble plus favorable à Israël mais, avec lui, il faut être prudent. Ainsi, s’il est certain que les Américains d’origine arabe ou de confession musulmane n’ont pas voté Trump, c’est beaucoup plus flou sur le vote juif. Trump séduit les milieux juifs américains sionistes, mais révulse ceux qui redoutent le racisme de l’extrême droite blanche.
La haine de Trump pour l’islamisme radical et son terrorisme doit normalement rapprocher les USA d’Israël et est, par amalgame, inquiétante pour les Palestiniens. Il va y avoir le test de Jérusalem. Une promesse de campagne qui serait bien plus dangereuse que la construction du mur mexicain.
Il s’agit bien sûr de sa promesse de déménager l’ambassade américaine en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem. Une telle mesure, maintes fois répétée avant son élection, romprait avec la politique historique des Etats-Unis et irait à l’encontre de la position de l’ONU, pour laquelle le statut de Jérusalem, dont la partie Est palestinienne a été occupée en 1967, puis annexée par Israël en 1980 (ce qui est jugé illégal par l’ONU), doit se régler par la négociation. Un déménagement serait interprété comme la reconnaissance des revendications israéliennes, pour faire de Jérusalem leur «capitale indivisible», là où les Palestiniens veulent faire de Jérusalem-Est la capitale de l’Etat auquel ils aspirent.
Dans son interview au «Times» et à «Bild», Donald Trump a esquivé la question et a répondu: «Nous verrons ce qui se passe». Plusieurs présidents américains, notamment George W. Bush et Bill Clinton, ont, avant lui, promis de déplacer l’ambassade dans la «Ville trois fois sainte». Le Congrès avait même adopté une loi en 1994 pour la réinstallation de l’ambassade. Jamais ils n’ont mis à exécution leurs promesses.
Cependant, la donne a changé. Le mois dernier, David Friedman, le conseiller de Donald Trump pour Israël, déclarait par ailleurs que Trump ne considérait pas les colonies juives établies dans les territoires palestiniens de Cisjordanie occupée comme illégales. Toujours selon David Friedman, Donald Trump serait «extrêmement sceptique» quant à l’idée d’une solution «à deux Etats». Il «ne mettrait jamais Israël sous pression» pour promouvoir cette solution, d’après le conseiller, ou toute autre solution en contradiction avec «la volonté du peuple israélien».
Les personnalités juives de l’entourage du candidat républicain n’ont pas cessé de proclamer leur soutien sans faille à Israël. Reprenant une déclaration de Benjamin Netanyahu, ils ont accusé l’OLP de vouloir faire de la Cisjordanie un territoire «Judenrein» (sans juifs). Et puis, les noms évoqués pour détenir des postes-clés dans la nouvelle administration Trump sont accueillis à Jérusalem avec une grande satisfaction. Rudy Guliani, à la Justice et Newt Gingrich, au département d’Etat, sont de grands amis de la droite israélienne et de Benjamin Netanyahu. Si Donald Trump peut sembler imprévisible, Benjamin Netanyahu pourrait toutefois être soulagé d’avoir un républicain à la Maison Blanche, tant ses relations avec l’administration Obama étaient difficiles.
«Il y a beaucoup de signes que l’administration Trump pourrait être très accommodante dans ses relations avec le gouvernement israélien actuel», estime en tout cas Shmuel Rosner, du Jewish People Policy Institute. «Le Premier ministre israélien de droite, Benjamin Netanyahu, aura un homologue à Washington qui ne lui sera pas instinctivement opposé», prédit-il.
Cela étant, le Premier ministre israélien a adopté une attitude extrêmement prudente au cours des dernières semaines. Certes, il n’a pas toujours eu des relations tranquilles avec Hillary Clinton mais, au moins, il la connaissait et lui faisait confiance. En revanche, Donald Trump lui semble imprévisible. Il faut rappeler qu’au début de sa campagne, il avait annoncé que tous les pays qui reçoivent une aide militaire des Etats-Unis devraient désormais la payer. Cela concernait aussi Israël.
Côté palestinien, le président Mahmoud Abbas a lui aussi félicité Donald Trump, en émettant l’espoir que la paix avec Israël pourrait être atteinte au cours de son mandat.
Cependant, l’inquiétude est, là aussi, de mise. «Nous sommes inquiets, parce que nous avons ici quelqu’un qui a été complètement imprévisible, un franc-tireur», a confié un responsable de haut rang à l’AFP, sous le couvert de l’anonymat. «Ses déclarations sont tellement […] illogiques et en contradiction avec le droit et le consensus international, qu’elles ne peuvent pas être mises en œuvre», a-t-il ajouté. «Les choses changeront quand il sera confronté aux réalités de la fonction».
C’est aussi ce que pensent certains analystes. Le chroniqueur du journal israélien Maariv, Ben Caspit, par exemple, selon qui «Trump a brisé toutes les règles possibles et il n’hésitera pas, s’il le souhaite, à briser le soutien traditionnel des Etats-Unis à Israël».
Avec un tel personnage il faut se méfier des espoirs, comme des inquiétudes.
Patrice Zehr
Trump et le Maghreb C’est une mauvaise nouvelle pour le régime islamiste «modéré» au pouvoir en Tunisie, malgré la couverture républicaine et moderniste que procure l’actuel président, Béji Caïd Essebsi, à ce régime. Le chef des Frères musulmans locaux, Rached Ghannouchi, croyait et espérait ardemment la victoire d’Hillary Clinton sur Donald Trump. L’Algérie peut faire jouer l’atout économique. Elle est perçue par l’administration américaine depuis un certain temps, surtout par un homme d’affaires avisé comme Donald Trump, comme un marché énergétique potentiel. Le Maroc est un allié stratégique traditionnel de l’administration américaine. Il joue un rôle extrêmement important dans la lutte contre le terrorisme. Cette vision du Maroc en tant qu’acteur incontournable dans cette lutte, est un élément stabilisateur dans la région et elle peut également être vue comme un élément valorisateur. Le problème du Sahara occidental risque de connaître un développement majeur. On peut imaginer que la nouvelle administration puisse percevoir ce conflit comme un élément qui peut constituer un terreau pour les terroristes et les éléments déstabilisateurs de la région. A partir de cette lecture-là, on peut s’attendre à ce que l’administration américaine, sous Trump, puisse avoir une vision beaucoup plus tranchée et claire des enjeux stratégiques que nécessite la résolution de ce conflit. On s’attend à ce que la nouvelle administration ait moins de sympathie pour les séparatistes du Polisario, puisque la réalité du terrain stratégique et sécuritaire prime forcement sur toute autre vision. PZ
Trump et les frères musulmans L’administration du président américain Donald Trump examine la possibilité d’ajouter le mouvement des Frères musulmans à la liste des organisations terroristes, relate l’agence Reuters, citant des sources proches du dossier. Selon la source, c’est Michael Flynn, conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, qui insiste sur cette décision. Dans le même temps, d’autres conseillers, des diplomates, ainsi que des représentants des services spéciaux s’opposent à cette démarche, tout en soulignant que l’organisation en question se développe pacifiquement dans nombre de pays. Ils estiment également que des mesures sévères contre les Frères musulmans pourraient nuire aux relations entre les Etats-Unis et la Turquie, un partenaire clé dans la région. Les Frères musulmans sont une organisation internationale, politique et religieuse, fondée en 1928 en Egypte. Elle a de nombreux alliés parmi les pays arabes. Les Frères musulmans figurent sur la liste des organisations terroristes interdites en Russie, en Syrie, en Arabie Saoudite, au Bahreïn et aux Emirats Arabes Unis. En Egypte, l’organisation a été interdite et reconnue terroriste après le renversement de son chef, l’ex-président du pays, Mohamed Morsi. PZ