Le ministère de la Justice et des Libertés et le ministère de la Solidarité de la Femme, de la Famille et du Développement social ont élaboré un projet de loi sur la violence contre les femmes, mais…
Le texte, élaboré dans le cadre d’un partenariat, a été soumis à l’appréciation du gouvernement. Celui-ci a jugé qu’il nécessitait plus de concertation et une approche particulière, surtout que certaines parties de la société civile ont émis quelques réserves sur ce projet. «Aussi, avons-nous jugé utile de mettre en œuvre, a souligné le ministre de la Justice, l’approche participative en impliquant l’ensemble des partenaires de la société civile intéressés».
Un ministre en colère
Le groupe socialiste (USFP) à la Chambre des représentants a sévèrement critiqué l’action du gouvernement en l’accusant de n’avoir rien fait dans ce sens, ce qui a provoqué la colère du ministre, Mustapha Ramid, qui n’a pas mis de gants pour répondre du tac au tac et non sans ironie: «Vous soulevez le phénomène de la violence contre les femmes comme s’il s’agissait d’un phénomène qui a vu le jour à l’aube de l’actuel gouvernement, alors qu’il a existé durant votre mandat». Il sous-entendait bien sûr le gouvernement présidé à l’époque par Abderrahman Youssoufi. Et Ramid de lancer à l’adresse de la députée Nouzha Skalli (PPS): «Mme Skalli avait présenté à l’époque un projet de loi sur la violence contre les femmes. Il s’est trouvé alors des membres du gouvernement de l’époque qui s’y sont opposés. Vous parlez donc aujourd’hui de choses que vous avez été incapables de mettre en œuvre», a conclu le ministre sous les applaudissements du groupe PJD en guise de félicitations pour un point marqué contre l’opposition.
L’on se souvient que le chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, avait annoncé, lors du conseil de gouvernement du 7 novembre 2013, la création d’une commission qui avait pour tâche d’étudier le projet de loi sur la violence contre les femmes. Cette commission ne s’est jamais réunie et les potins sont allés bon train, spéculant sur le fait que le gouvernement aurait peut-être renoncé à la création de cette commission. La mise au point du ministre de la Justice, Mustapha Ramid, est donc venue à point nommé démentir ces rumeurs et annoncer qu’un projet de loi sur cette problématique de taille se trouverait au centre d’un débat entre le gouvernement et la société civile.
Les ministres, pas tous d’accord
Pour Bassima Hakkaoui, ministre de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social, l’agenda du chef de gouvernement serait peut-être à l’origine de la non tenue, jusqu’à aujourd’hui, de cette commission sur la violence contre les femmes créée par Abdelilah Benkirane.
Ce projet de loi sur la violence contre les femmes aurait provoqué un débat houleux en conseil de gouvernement du 7 novembre 2013. «Nombre de ministres ont émis des réserves, principalement sur ce qui a trait aux mesures coercitives à prendre pour sanctionner tout délit de violence contre les femmes», nous a confié un député PJD. Le point de vue du chef de gouvernement, toujours selon la même source, est connu et Benkirane l’a notifié en public lors du Colloque régional sur la prévention et la lutte contre la violence sur les femmes en précisant: «L’approche juridique est nécessaire mais insuffisante pour lutter contre le phénomène».
Le projet de loi est sévère puisqu’il prévoit une amende de 3.000 dirhams pour tous propos dégradants ou insultants à l’égard de la femme ou pour la publication sur sites électroniques de photos sexuelles. L’amende est assortie de peines privatives de liberté de cinq années. Messieurs, faites gaffe!
Mohammed Nafaa